21/04/2022
Alerte rouge
Mei est une ado de 13 ans d'origine chinoise, tiraillée entre respect des traditions familiales et désir de modernité et d'émancipation. Selon les souhaits de ses parents et particulièrement de sa mère très protectrice, elle est une élève studieuse et obéissante. L'ado rêve d'aller au concert d'un boys band avec ses amies, mais sa mère refuse. La jeune fille découvre que lorsque ses émotions débordent, elle se transforme en panda roux, et que cette malédiction est partagée par les femmes de sa famille... Voir la bande annonce en lien.
Alerte rouge, (turning red en anglais) fait évidemment référence aux règles, puisque l'héroïne se métamorphose lorsque les anglais débarquent et que sa mère l'embarrasse en lui apportant un paquet de serviettes hygiéniques devant ses camarades.
De rares spectateurs ont déploré qu'ils ne pouvaient ainsi pas s'identifier au personnage, d'autant plus qu'elle est Chinoise et que sa religion est importante dans le film (ses parents possèdent un temple). J'ai peu de points communs avec Mei, pourtant j'ai apprécié Alerte rouge.
Dans la grande majorité des scénarios, le personnage principal est un homme. Enfant je m'identifiais ainsi aux héros des films du dimanche soir, donc à James Bond, Indiana Jones, Bebel ou même l'anti héros Pierre Richard, car les femmes dans ces films n'étaient pas des modèles, présentées soient comme des femmes fatales traîtresses responsables de la chute du héros, des femmes faciles et vénales, soit comme des femmes "pures et innocentes", mais cruches et dépendantes que le héros devait sauver.
Je salue l'originalité (l'audace ?) de Pixar de choisir d'évoquer les règles et aussi les communautés ethniques et religieuses. Je ne suis ni Chinoise ni croyante, pourtant le propos du film reste universel, car il traite avant tout d'adolescence, cette période de bouleversements physiques et émotionnels qui crée de fortes tensions, la nécessité de les contrôler ou de vivre avec. Alerte rouge parle du choix de rester ou non dans les valeurs familiales que traversent tous les jeunes : normalement, on est tous passé par une phase de crise d'ado rebelle, où on trouve nos parents ringards, peu compréhensifs et tyranniques. La relation entre Mei et sa mère est très réaliste, on sent le vécu (la réalisatrice et scénariste a convoqué des souvenirs). La relation progresse lorsque Mei se rend compte que sa mère vit les mêmes tourments avec sa propre mère. Mei s'imaginait que sa mère avait toujours été cette adulte inflexible et sûre d'elle, mais sa mère redevient une ado devant sa propre mère.
L'importance de l'identification à un groupe autre que la famille pour l'émancipation des ados est également bien traduite, à travers les liens forts qui unissent Mei à ses copines. L'importance de s'intégrer et de faire comme les autres aussi, avec les goûts vestimentaires et les boys band à la mode.
je n'ai pas connu le groupe d'amies de l'héroïne (je préférais lire au cdi pendant la récré que me mêler à mes camarades), ni sa passion pour les 2be3, euh les 4town, même si les boys band ont émergé à mon époque. J'avais déjà des goûts de vieux (pas les mêmes que mes parents, aux goûts encore plus anciens !) en écoutant les Beatles et d'autres groupes pas de mon âge. Le film a pourtant réussi à me mettre dans la tête la chanson du groupe, nobody like U, à écouter en lien. Chanson typique pour ado : faire croire qu'ils sont différents alors que les paroles sont calibrées pour plaire au plus grand nombre. A cet âge, j'appréciais un air qui parlait de différence aussi, I'm not like everybody else des Kinks.
J'ai lu le complexe du homard de Dolto deux fois, mais je ne me retrouvais pas vraiment dans la description de l'ado typique, comme elle est décrite dans le film. Pourtant malgré toutes ces différences, j'ai pu quand même apprécier Alerte rouge, drôle, enlevé, pertinent. Un bon film, mais pas le meilleur Pixar, il n'atteint pas les niveaux des Toy story, Le monde de Nemo, Monstres et cie ou Les indestructibles. Je déplore qu'il ne soit pas sorti en salles, comme les précédents (Soul, très bien, et Luca, pas mal).
- Alerte rouge de Domee Shi, Pixar sur Disney+


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07/04/2022
Bilan "je suis culturée" de mars
8 FILMS :
Coup de cœur :
- Alerte rouge de Domee Shi, Pixar sur Disney+
Bien :
- La boîte noire de Yann Gozlan, 2021, sur Mycanal
- Les 2 Alfred de Bruno Podalydès, 2021, Mycanal
Pas mal :
- The Batman de Matt Reeves, 2022
- Kaamelott volet 1 d'Alexandre Astier, 2021, sur Mycanal
- Un espion ordinaire de Dominic Cooke, 2021, sur Mycanal
- Fisherman's friends de Chris Foggin, 2020, sur Mycanal
- Les traducteurs de Régis Roinsard, 2020, sur Mycanal
4 SERIES :
Coup de cœur :- Ovni(s) saison 2, de Martin Douaire et Clémence Dargent, 2021, sur Mycanal
Pas mal :
- Yellowjackets, 2021, sur Mycanal
- Why women kill, de Marc Cherry, 2020, M6
Bof :
- La femme qui habitait en face de la fille à la fenêtre, de Rachel Ramras, 2022, Netflix
9 LIVRES :
Coups de cœur :- Algues vertes, l'histoire interdite d'Inès Léraud et Pierre Van Hove, 2021
- Grandeur et décadence de Liv Strömquist, 2017
- La rose la plus rouge s'épanouit, Strömquist, 2019
- I'm every woman de Liv Strömquist, 2018
- Il était une fois Idées noires, André Franquin
Pas mal :
- Meta maus de Art Spiegelman, 2011
- Insolente Veggie, une végétalienne très très méchante, de Rosa B, 2015
- Kiki de Montparnasse de José-Louis Bocquet, Catel Muller, 2007
- Les cerveaux de la ferme, au cœur des émotions et des perceptions animales, Sébastien Moro, Layla Benabid, 2021
28 DOCUMENTAIRES :
Portraits :
Coups de cœur :- Jim Carrey : l'Amérique démasquée, sur Arte.tv jusqu'au 08/06
- Gisèle Halimi, la cause des femmes, La case du siècle sur France.tv jusqu'au 06/05
Bien :
- L'alpiniste de Peter Mortimer, 2021, sur Mycanal
- Poutine, l'espion devenu président, sur France.tv jusqu'en 2023
- Zelensky, l'homme de Kiev sur Arte.tv jusqu'en 2023
Pas mal :
- Marguerite Duras, l'écriture et la vie, aux arts et caetera, France.tv
- Pierre-Auguste Renoir, entre rococo et impressionnisme, sur Arte.tv jusqu'au 30/05
Société :
Coup de cœur :
- Il était une fois l'amour à la française
Bien :
- Buried, la mémoire enterrée sur Mycanal
- Quand les bourgeois font leur cinéma d'Alain Riou, sur Mycanal
- Hollywood interdit, l'heure du pré code (1929/1934) sur Mycanal
- People et politiques, petits services entre amis ? Complément d'enquête, Sur France.tv jusqu'en 2023
- Bad vegan sur Netflix
Animaux :
Coups de cœur :- Des fraises pour le renard sur France.tv jusqu'au 12/04
- Caméras espions au pays du froid
- Planète animale, les jeux de l'amour sur France.tv jusqu'au 09/04
- L'Europe sauvage, faune et flore des Alpes
Pas mal :
- Les animaux sauvages d'Europe : le lynx, sur Arte.tv jusqu'au 01/06
- Le panda géant sur Arte.tv jusqu'au 22/05
- Le fabuleux destin des mésanges sur Arte.tv
- Au cœur des Carpates, le royaume de l'ours, sur Arte.tv jusqu'au 30/04
Nature / évasion :
- Les îles Féroé, beautés brutes en Atlantique sur Arte.tv jusqu'au 04/06
- Les parcs nationaux américains : great smoky mountains sur Arte.tv
- Les 4 saisons du Yorkshire
Sciences :
42, la réponse à presque tout : sur Arte.tv
- Pourquoi manger ce qu'on mange ?
- Pouvons-nous sauver les arbres ?
- Les algues vont-elles sauver la planète ?
- Et si la poussière n'existait pas ?


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28/03/2022
Invisible man, la femme manipulée
Le film est classé par mycanal en horreur, mais c'est en réalité un thriller psychologique. Il revisite le mythe de l'homme invisible, mais du point de vue de sa femme. L'homme invisible est ici un scientifique réputé et millionnaire, mais est aussi (comme souvent chez les hommes assoiffés de pouvoir, comme le démontre Marie-France Hirigoyen dans son excellent livre Les Narcisse) un manipulateur pervers, un tyran domestique qui surveille les moindres faits et gestes de sa compagne. Cette dernière est interprétée par Elisabeth Moss, qui choisit toujours aussi bien ses rôles (Mad men, La servante écarlate...) La femme parvient à s'enfuir de la demeure où elle est maintenue captive, le compagnon délaissé se suicide. Pourtant, elle se sent toujours traquée, observée, les objets bougent autour d'elle... Elle est convaincue que le brillant opticien a réussi à développer une invention le permettant de devenir invisible, mais personne ne la croit.
Un film qui surfe habilement sur les thèmes actuels du harcèlement, de la manipulation perverse et des violences conjugales. Certains peuvent penser que l'héroïne exagère, est forcément coupable de quelque chose : "pourquoi elle ? elle a dû le chercher ! Puis elle n'est pas si malheureuse, elle vit dans une maison gigantesque, son mec est riche et peut lui offrir tout ce qu'elle désire !"
La mise en scène, faite de plans larges, nous permet d'être aux aguets comme l'héroïne : on cherche en arrière-plan un objet qui bouge, qui trahirait la présence de l'homme invisible. La suggestion, ce qu'on ne voit pas, ce qu'on imagine, est toujours plus effrayante qu'une démonstration dans les films d'horreur, qu'une créature souvent grotesque mal modélisée (c'est ça leur monstre ? mais il est mal fait ! il bouge mal !)
Cette mise en scène crée un climat d'angoisse, mais ce qui m'a véritablement glacé le sang, c'est lorsque même l'entourage proche de la victime se désolidarise d'elle et la pense paranoïaque. Le pire, dans le film comme dans la réalité, ce ne sont pas les blessures physiques et morales. C'est de ne pas être crue, de passer pour folle et se retrouver isolée. C'est exactement ce qu'on entend après les féminicides et dans chaque Faites entrer l'accusé : "Je ne peux pas croire qu'il ait tué sa femme, c'était un collègue irréprochable, toujours serviable." "Mon fils, mon frère est doux et gentil avec moi, c'est impossible qu'il frappe sa femme !"
On ne sait jamais comment les gens se comportent réellement dans l'intimité de leur couple. Par exemple, Jonathan Daval était un collègue et un gendre idéal, un homme doux, effacé, serviable, tout petit, avec une voix aigue et tremblotante, une tête ronde de poupon. Tout le monde se souvient de son discours où il pleurait à chaudes larmes pour qu'on lui rende sa femme, soutenu par les parents de la victime, qui semblaient presque moins atteints que lui. Ces derniers le consolaient comme un petit enfant. Et pourtant, ce gendre qu'ils pensaient insoupçonnable a frappé, étranglé de longues minutes et brulé le corps de leur fille.
Dans la réalité, les victimes subissent souvent sans être crue et sans pouvoir agir. Dans le film, la femme parviendra-t-elle à se défendre contre un homme qui fait deux fois son poids, et en plus, invisible ? Un thriller original et efficace, à voir.
- Invisible man de Leigh Whannell , 2020 sur Mycanal
- Les Narcisse, ils ont pris le pouvoir de Marie-France Hirigoyen


16:48 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma | |
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27/03/2022
Inventing Anna, accro à Insta
Après L'arnaqueur de Tinder, encore une histoire vraie de fraude, mais cette fois-ci, c'est une jeune femme qui mène une vie de luxe sans en avoir les moyens. Contrairement au faux fiancé qui a ruiné des femmes anonymes, court toujours et continue ses méfaits scandaleux, Anna a escroqué la haute société new-yorkaise et les banques, en empruntant sans apport. Elle projetait d'ouvrir un centre d'art contemporain, mais on ne prête qu'aux riches. Voler les puissants, ça, on ne pardonne pas ! Anna est-elle une sorte de Robin des bois qui redonne aux pauvres ? Elle fait en effet profiter ses amies modestes, comme l'hôtesse d'accueil d'un palace. Mais son vrai objectif, c'est de faire partie de la jet-set elle aussi, car elle est fascinée par l'argent et la célébrité.
Une histoire qui ne pouvait que plaire à Shonda Rhimes (Scandal) qui l'a adaptée en série, en accentuant le côté girly superficielle qui m'agace. J'ai saigné des oreilles en écoutant la catastrophique b.o de pouffe, j'ai perdu la vue devant la réalisation clinquante (ralentis kitsch). La fascination pour le luxe et la haute couture, les restos chics où on paie une simple salade 400 balles sont ridicules pour moi.
Le besoin de s'afficher constamment sur Instagram dont est victime Anna m'est également incompréhensible. Je connaissais une fille comme ça. Dès qu'on sortait, elle se photographiait, devant tout et n'importe quoi, un tableau du musée, en train de manger au resto... Peut-être pour faire la fille branchée et sociable : "on y était à cette avant-première avec vue sur la tour Eiffel !" Comme si la photographie rajoutait de la valeur aux choses : "j'ai payé ce poke bowl 15 balles alors que c'est une simple salade d'ingrédients non mélangés, oui mais il est joli !" "Je m'ennuie dans cette soirée, mais je souris devant l'objectif pour prouver le contraire !"
Quand j'étais partie en Islande, cette fille m'avait demandé de lui envoyer des photos. Je lui ai donc transmis les superbes paysages, les montagnes couvertes de lupins, les cascades. Elle m'a répondu : "mais non ! des photos de toi !" Pourquoi faire ?! Alors que j'attendais ma commande dans un resto islandais, je faisais le tri de mes photos du jour, et je pouvais voir ma voisine faire de même avec les siennes. On avait visité les mêmes lieux, donc fait les mêmes clichés, sauf que sur tous les siens, on la voyait en premier plan, nette, et à l'arrière-plan, le paysage, flou. Toutes ses photos étaient donc gâchées.
Je possède un Instagram, mais il ne me viendrait pas à l'esprit de montrer ma tête. Si je vous suis sur insta, vous pouvez constater que je like essentiellement vos paysages, vos chats, vos réalisations (peintures, couture etc) mais les portraits dans des ascenseurs ou toilettes (si ça existe !) je ne vois pas l'intérêt ! Contrairement à ce que le nom Instagram indique ("instantané") je ne poste jamais en direct. Je préfère vivre le moment et trier les images plus tard (ou jamais).
Dans la série, rapporter ses faits et gestes en temps réel trahit Anna : la police et l'enquêtrice peuvent la localiser et reconstituer son parcours. La jeune femme s'immortalise dans un lieu célèbre, montrant à la police où elle se trouve, et laissant croire à ses fans à des vacances de rêve. En réalité, elle est en cure pour dépressifs suicidaires...
Comme le prouve son Instagram, Anna est ultra narcissique. Elle se croit supérieure et au-dessus des lois ("les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît"). Elle est donc tête à claques au possible, et c'est inconcevable qu'elle ait pu séduire tant de gens, surtout qu'elle leur parle comme à des chiens. Mention spéciale à son amie carpette débile qui débourse à sa place 60 000 euros (!!) en frais d'hôtel (!!) et attend 3 mois le remboursement avant de réagir (!!) en trouvant des excuses à celle qu'elle persiste à nommer son amie (!!) Le paillasson chouine en suppliant son bourreau, qui lui rétorque : "pourquoi tu me déranges pour si peu ?" Mais bon sang, je lui aurais fait bouffer son sac chanel à la voleuse !
Autre toutou carpette, le mari de la journaliste qui enquête sur Anna. Au mieux, il fait tapisserie, ou sert de punchingball, pendant que son épouse à moitié hystérique lui aboie dessus. Comme un chien fidèle, il se tient assis sans bouger derrière sa maîtresse pendant qu'elle bosse jusqu'à sa perte des eaux (ah l'Amérique, ce pays des droits sociaux et de la sécu sociale, où les femmes n'ont presque pas de congé maternité et paient leur accouchement 30 000 balles, si elles ne meurent pas en couches (une des plus grandes mortalités infantiles au monde, comme l'explique le regretté effet papillon, ruinés par bébé, à voir absolument en lien.) La journaliste m'a presque autant agacée qu'Anna, avec son accent nasillard américain et ses gestes démesurés (elle ne peut pas s'empêcher d'en faire des caisses, de rouler des yeux comme une possédée, d'ouvrir une bouche béante et d'agiter ses mains comme des ailes de mouche pour marquer son étonnement ou sa joie).
Autre truc qui m'a fait tiquer, c'est l'avertissement au début de chaque épisode : "toute cette histoire est complètement vraie, sauf les parties qui sont totalement inventées". Pourquoi créer cette confusion ?
Bref, une série intéressante pour le contexte social, mais... agaçante ! et qui plaira surtout aux accros à Instagram.
- Inventing Anna, sur Netflix


15:31 Publié dans On connaît la série | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : série netflix | |
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