18/11/2012
Agad la télévision et pis dors
Voici les toutes premières lignes du roman semi autobiographique de Romain Monnery, Libre seul et assoupi, évoqué dans le billet précédent :
« Contrairement à toutes les prophéties lues ici et là, la fin du monde n’avait pas eu lieu. Mes études terminées, j’avais survécu à cette dépression post orgasmique qui guette peu à peu tous les étudiants lorsque sonne la fin de leur cursus. Comment ? Je n’avais rien fait ? Sans but, sans cadre et sans horaires, je m’étais laissé vivre. C’est tout. Quelques livres, un peu d’ennui, beaucoup de musique, j’avais façonné mes jours de pas grand-chose en les regardant passer d’un œil distrait. Le calendrier rangé au placard, mon esprit avait banni les notions menaçantes d’avenir et de lendemain. J’avais cessé de réfléchir. J’avais dormi. »
Je m’identifiais à ces lignes lorsque, comme l’auteur, j’étais au chômage. Maintenant que je bosse, ces mots me correspondent pourtant toujours autant, si ce n’est plus. Je passe mes journées à faire un boulot peu intéressant mais qui demande beaucoup de concentration, et le soir, je rentre lobotomisée et sans force.
Pour vous dire, vendredi, alors que je projetais d’écrire, je me suis affalée à la place dans mon canapé-lit, et j’ai regardé pour la première fois de ma vie Koh-Lanta, puis Qui veut épouser mon fils, et j’ai fini au fond du trou avec Premier amour, émission glauque et beauf à mort. Oui, moi, toujours branchée sur Canal+ ou Arte, j’ai regardé TF1, sachant que depuis janvier je n’ai zappé que deux fois sur cette chaîne, pour voir La grande vadrouille et Very bad trip (j’ai vérifié sur mon précieux carnet où je note tous les films).
Je n’ai même pas eu la force de dégainer mon portable et sortir des bons mots sur Twitter, pourtant ces sujets m’en évoquaient pas mal (c’est facile de tirer sur une ambulance). Le pire, c’est que je vous avoue avoir apprécié la soirée, et même avoir trouvé intéressant le principe de Koh Lanta. Enfin, je n’ai pas vraiment intégré le concept du « pour survivre en milieu hostile il faut des gens à poigne et sportifs » car pour moi la question ne se posait pas, je préférais garder le petit vieux faible mais très cool, pensant qu’il serait indulgent avec moi et rirait de mes blagues, plutôt qu’un agressif musculeux. Je crois que sur l'île, on est juste là pour converser tranquillement au coin du feu (ah non, justement ils n’en ont pas). Bref, à Koh Lanta, je ne ferais pas long feu.
Je vous rappelle que la destination la plus lointaine et exotique testée par mémé Papillote est Londres, et que j’ai tenté une seule fois, avec horreur, le camping (on a dû me monter ma propre tente, je ne parvenais même pas à planter un… je sais plus comment ça s’appelle, le truc gris dans lequel on passe une ficelle puis après on tape dessus avec un espèce de gros marteau) (vous voyez mon niveau).
Je parle de Koh Lanta de la semaine dernière (mémé est toujours en retard de deux guerres). Cette semaine, je n’étais même pas rentrée du boulot à temps pour le voir. J’ai regardé Qui veut épouser mon fils ? » et ai fini très étonnée : « Un deuxième père apparaît dans l’émission ? La blondasse a pris un coup de vieux depuis 5 minutes… mais… ce n’est pas elle ! » Je regarde le réveil : il était en fait 2 heures du matin, je dormais comme une larve depuis 1h30 et avais donc loupé la fin de la télé réalité (quelle perte). Par contre j’étais en pleine forme après cette petite sieste. Comme tous les soirs.
J’incarne le sketch des Nuls « agad la télévision, et pis dors » Comme je suis sûre de louper la fin des films, je les regarde rarement en direct. A part Drive mardi sur canal +, mais comment peut-on s’endormir devant Ryan Gosling ? Avec ma chansonnite aigue, j’ai eu la musique du générique en tête toute la journée après la diffusion du film.
Ceci me fait penser que j’ai encore réussi l’exploit de payer ma redevance télé le jour même de la date limite. 123 euros pour financer France 2 et France 3 que je ne regarde jamais, ça vaut le coup (mais j’aime beaucoup France 5 et Arte.)
A la télé cette semaine, ce soir Inglorious Basterds de Tarantino sur TF1 (justement). Je trouve que ce n’est pas son meilleur film. Idem pour Invictus de Clint Eastwood sur France 2, il ne vaut pas Gran Torino ou Sur la route de Madison. Quant à Le jour où la Terre s’arrêta de Scott Derrickson (son nouveau film Sinister est en salles) sur france 4, c’est un navet qui ne vaut pas l’original de Robert Wise (réalisateur de l’excellent La maison du diable et de West Side Story). Pour les abonnés Canal +, je conseille plutôt L’affaire Rachel Singer sur canal+ cinéma, très bon thriller.
Lundi, soirée Jane Austen sur NRJ 12, avec les films Orgueil et préjugés et Raisons et sentiments. Je les connais déjà par cœur, il ne faut pas que je zappe dessus car je le sais, je vais encore les regarder jusqu’au bout :« nan mais allez, seulement 5 minutes… juste pour voir le passage de la rencontre… et puis celui de la déclaration… qui arrive dans la dernière scène… ». W9 programme le film de Robert Redford, L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, où l’on peut voir l’une des toutes premières apparitions de Scarlett Johansson, en 1998 à l’âge de 14 ans (dans un rôle qui était d’abord attribué à Natalie Portman !) France 4 rediffuse la série Les piliers de la terre, complots dans l’Angleterre du Moyen Age.
Mardi, suite du cycle Charlie Chaplin sur Gulli, avec La ruée vers l’or et Les temps modernes. Mercredi, 3524 ème rediffusion de la pièce de théâtre Le père noël est une ordure sur France4. Arte programe Ajami, un film réputé que j’ai enregistré sur canal + l’année dernière et que je n’ai toujours pas pris le temps de regarder…
Jeudi sur canal +, 5ème saison de Mad Men. Je vais faire mon coming out : je n’ai pas accroché aux deux premières et j’ai abandonné. Je trouve qu’il ne se passe pas grand-chose, le héros incarné par John Hamm-Jean Jambon est exécrable. Le milieu consumériste et cynique de la pub ne me fait pas rêver. Les filles sont bien habillées et les décors sont transposés à merveille, mais vous savez bien que mémé se fiche de la mode comme de l’an 40. Le seul intérêt de la série est la représentation des femmes de l’époque. C’est amusant de voir le décalage avec la mentalité actuelle, quand on les voit fumer comme des pompiers et boire comme des trous alors qu’elles sont enceintes jusqu’au cou…
Vendredi, et bien la soirée télé réalité sur TF1 bien entendu. Je plaisante, je regarderai plutôt Mission impossible sur Canal +. Et m’endormirai devant.
Et vous, aimez-vous ces films et Mad Men ? Dormez-vous aussi devant la télé ?
18:13 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : télé, cinéma, mad men, libre seul et assoupi, canal +, jane austen | | Facebook
02/09/2012
Un mois sans films, à la télé cette semaine : Juno, Fourmiz, Jane Eyre...
Un mois d’absence, un mois sans ordinateur, mais surtout un mois sans canal +, et carrément quinze jours sans télévision, donc sans films ! (Dans les locations de vacances, il fallait payer 40 euros la semaine pour regarder la télé, faut pas pousser). Les soirées semblaient parfois longues, mais je suis devenue imbattable au scrabble. Même si ma mère ne connaissait pas le si judicieux terme « geek », et ne voulait donc pas que je le place en mot compte triple, avec lettre double pour le k (ce qui faisait un total de 72 points tout de même) (en fait elle ne voulait tout simplement pas que je gagne encore.)
Je suis revenue mardi, et j’ai vite retrouvé les vieilles habitudes de mémé. Avant même de ranger dans le frigo les fromages qui puent de la ferme bio (mes voisins dans le TGV se réjouissaient) la viande et la charcuterie achetées en douce par ma mère (si je lui avoue que je n’ai pas fréquenté de boucherie une seule fois en 5 ans, je pense qu’elle frôle la crise cardiaque) les fruits et légumes du jardin (une tomate et une pêche se sont battues, puisque j’ai retrouvé leur sang étalé dans la glacière) mon premier réflexe a été d’allumer la télé, l’enregistreur dvd et l’ordinateur, pour voir si mes précieux se maintenaient en vie. (Ils ont 8 ans tout de même).
Et là le drame. Plus de canal + : « votre abonnement est arrivé à échéance ». C’est vrai, mais ils ne m’ont pas reconduit automatiquement ? Je prenais déjà le combiné du téléphone pour supplier : « vous ne pouvez pas me lâcher comme ça après 16 ans d’une fidélité sans faille, qu’est ce que je vais devenir, d’ailleurs pour me remercier d’être abonnée depuis si longtemps vous pourriez me faire une ristourne, sinon je me désabonne, comment ça vous ne m’en croyez pas capable ? » Ce coup de bluff n’a pas fonctionné l’année dernière, j’avais pourtant tenté la tactique dite "de la chouineuse" : « je suis au chômage, 33 euros par mois c’est trop cher ». Mais vu qu’il y aura bientôt plus de chômeurs que d’actifs, je devais être la 72ème de la journée à le dire. Puis j’ai réflexionné (parfois ça m’arrive) qu’avant de téléphoner sur un numéro 0800 à 49 euros la minute et 3 heures d’attente (environ) je pourrais peut-être lire d’abord leur site internet et la rubrique « les pannes les plus fréquentes ».
Résultat en 24 secondes chrono : si on se branche sur canal+ moins d’1h30 dans le mois, le décodeur ne fonctionne plus. Il suffit de replacer la carte mémoire et de laisser allumer une heure et ensuite zou, c’est parti pour le show, et c’est parti le stade est chaud. J’ai rattrapé mon retard canalplussien en regardant 9 films en 5 jours, et en enregistrant 4 autres...
J’ai vu par exemple Never let me go, triste et beau, avec Keira Knightley et Andrew Garfield. Super 8, décevant, m’enfin JJ Abrams, tu as pourtant écrit la géniale série Lost ? Cowboys et envahisseurs avec Harrison Ford et Daniel Craig, divertissant. Impardonnables de Téchiné, peu d’intérêt je trouve. Faut dire que j’en ai profité pour faire du sport devant la télé, comme souvent pendant les films français. Scream4, je ne me souvenais même plus l’avoir vu au ciné… je vois tellement de films, ce qui est aussi pratique car je ne me rappelais plus du tueur, c’est grave docteur ?
Je note les noms et réalisateurs des films que je vois, puisque sans ça j’en oublie. Comme on a passé le 1er septembre, donc une nouvelle année scolaire, j’ai fait le compte des films vus cette année, télé et cinéma compris. Devinez combien…
Rassurez-vous, je ne regarde pas seulement des films. Je lis aussi (seulement une trentaine de romans et d’essais cette année ; loin du compte « un livre par semaine ») je vois des expos, je sors, je me promène et fais du sport chaque jour, et même, parfois, je travaille !
A la base de ce billet, je voulais enfin reprendre la rubrique « à la télé cette semaine ».... Je vous conseille donc, en vrac :
Ce soir sur France 2 : Juno de Jason Reitman (réalisateur de Thank you for smoking et In the air) avec la ravissante Ellen Page (To Rome with love) et le tordant Michael Cera (Scott Pilgrim). A la première vision, j’avais trouvé ce film trop mode, trop branché, en prenant pour exemple les conversations sur les musiques, signifiant « on est cool et dans le coup ». Pas comme une mémé Beatles comme moi donc.
Ensuite vous pouvez regarder Rocky Balboa, sur la même chaîne. Contrairement à ce que je redoutais, Rocky (le premier étant le meilleur) n’est pas un film d’action pure avec un boxeur brute épaisse, mais propose au contraire un scénario intelligent, ancré dans la réalité sociale, avec un Stallone sensible et fleur bleue ! Dans ce dernier film, devenu vieux, il pleure sa bien-aimée et sa carrière passée.
Lundi, W9 programme Incassable de M.Night Shyamalan, quand le réalisateur de Sixième sens faisait encore de bons films (pas comme ses derniers Phénomènes » et Le dernier maître de l’air).
Pour les abonnés canal+, ne ratez pas la reprise des indispensables documentaires de spécial investigation, lundi et mercredi soir.
Mardi Gulli diffuse le sympathique film d’animation Fourmiz, où Z de Costa Gavras se pose beaucoup de questions (sa voix est très justement confiée à Woody Allen) et décide de sortir du rang.
Jeudi et vendredi, Arte prolonge l’été non pas indien mais anglais. Après les adaptations des romans de Jane Austen, voici celle de Charlotte Bronte avec Jane Eyre. Il faut d’ailleurs que je vous parle du film vu depuis plus d’un mois au cinéma, avec Michael Fassbender♥♥♥.
A la même heure, genre radicalement différent, avec Matrix sur NT1 ou encore New York 1997 de John Carpenter sur direct star.
Et vous, qu’avez-vous vu cette semaine ? A votre avis, combien ai-je vu de films cette année ?
21:27 Publié dans Je suis culturée, On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : télé, cinéma, canal+ | | Facebook
20/07/2012
The dictator
Lors des interviews, Aladeen précise : « si vous écrivez de bonnes critiques, vos familles seront relâchées ». Je vais donc vous expliquer pourquoi The dictator est un film à voir, car comme le dit Kim Jong-Il : « c’est de la bombe ! »
L’acteur Sacha Baron Cohen et son complice le réalisateur Larry Charles explorent toujours le choc des cultures et provoquent leurs contemporains, à travers des personnages grotesques et des situations hilarantes. Dans Borat, grimé en reporter Kazakh naïf transporté dans l’Amérique pudibonde, l’acteur interviewait des passants outrés. Dans Bruno, il jouait une icône de mode gay.
Dans ce film, l’acteur interprète Aladeen, dictateur de la république (imaginaire ?) du Wadya, « nommé Leader suprême à l’âge de 6 ans, après la mort prématurée de son père, tué dans un accident de chasse par 97 balles perdues et une grenade ». Sa mère est censée être morte en couches, mais on la voit se faire étouffer par un coussin immédiatement après l’accouchement, lors de l’incroyable scène d’introduction présentant le dictateur. On observe ensuite Aladeen gagner une course… après avoir tiré sur les autres concurrents, et d’autres illustrations délirantes dans ce genre. (voir bande annonce en lien)
Le dictateur se rend à New York pour répondre aux questions de l’ONU. Il échappe de peu à un attentat et devient anonyme dans la ville, recueilli par Zoey, une pasionaria qui ne soupçonne pas sa réelle identité …
L’humour culotté, provoc et outrancier de Sacha Baron Cohen se retrouve dans ce nouveau film, mais avec une différence de taille : cette fois, l’aspect réel et pseudo documentaire disparaît, Cohen prend pour victimes de vrais acteurs. Ceci enlève forcément un peu de piquant, mais les gags restent toujours aussi hilarants. Le côté spontané est préservé, comme le précise l’actrice Anna Faris qui joue le rôle de Zoey : « on a fait énormément d’improvisations. Il y avait un script, et je dirais qu’on le suivait dans 10 % des cas. »
Je déplore toujours les passages avec humour en dessous de la ceinture, mais les sketches sont si outranciers qu’ils en sont drôles, on rit nerveusement, malgré soi, en détournant la tête (« Han ! Nan il n’a pas osé ! »). Lors de la projection, toute la salle s’esclaffait, par exemple pendant la scène de l’accouchement, ou du vol en hélicoptère, avec le quiproquo et dénouement d’autant plus drôles qu’on le voit venir gros comme une maison. J’ai apprécié les piques comme celle-ci, lorsque que le dictateur apprend la grossesse de sa femme : « c’est un garçon ou un avortement ? ».
Pendant son discours à l’ONU, Aladeen décrit certains éléments d’une dictature, qui correspond en fait à l’Amérique : « Imaginez une dictature en Amérique : on pourrait truquer les élections, on pourrait mentir pour faire la guerre ! ». Ce passage m’a fait penser à la réplique d’OSS 117, Rio ne répond plus : « Et comment appelez-vous un pays qui a comme président un militaire avec les pleins pouvoirs, une police secrète, une seule chaîne de télévision et dont toute l’information est contrôlée par l’Etat ? –J’appelle ça la France mademoiselle. Et pas n’importe laquelle : la France du général de Gaulle. »
Le choix des acteurs est judicieux, avec le toujours stoïque et inquiétant Ben Kingsley (La liste de Schindler, Shutter Island…) La déjantée Anna Faris (Scary movie, Lost in translation) convient parfaitement au rôle de baba cool : « Zoey se fiche de son apparence. J’adore mon allure dans le film. Je me sentais indépendante et certainement pas vaniteuse, c’était très drôle ! Même mes poils aux aisselles sont authentiques. J’ai dû les faire pousser pendant trois mois et demi et je ne veux pas qu’on puisse penser qu’ils sont faux ! »
Pour assurer la promotion du film et faire parler de lui, Sacha Baron Cohen est resté dans la peau de son personnage lors des interviews. Celle donnée à canal + sortait des promos rasoirs habituelles, leurs questions convenues et réponses attendues ( « Vous aimez la France ? « Oh yes, I looove Paris… » etc.) Le pauvre Laurent Weil ne savait pas comment réagir et Cohen/Aladeen a eu la bonne idée de faire référence à la politique actuelle du pays (En faisant croire qu’il a financé la campagne de François Hollande par ex.) Après la menace d'en être exclu (voir lien) l'’acteur a également osé débarquer sur le prestigieux et solennel tapis rouge des Oscar déguisé en dictateur, avec toute son armada. Bref, Sacha Baron Cohen n’a pas fini de nous secouer et nous faire rire avec ses provocations.
C’est bon, j’ai écrit une bonne critique ? Aladeen, rendez-moi mon chat maintenant !
Et vous, avez-vous vu ce film, qu'en pensez-vous ?
18:26 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : cinéma, the dictator, sacha baron cohen | | Facebook
24/06/2012
Le grand soir
Benoît Poelvoorde♥♥ incarne « un punk à chien », «Not», du nom gravé sur son front. Il vient traîner dans la zone commerciale où ses parents (la mère Brigitte Fontaine, toujours aussi chtarbée) tiennent une « pataterie » et son frère (Albert Dupontel ♥♥) est vendeur dans un magasin de literie. Ce dernier, qui veut mener une existence classique (il est marié et a un bébé) ne jure que par le confort matériel. Il ne voit pas d’un bon œil la venue du marginal. Pourtant, suite à son licenciement, Dupontel quitte le rang pour suivre la punk-attitude de son frère : rejeter la société de consommation et vivre sa vie comme il l’entend… (voir bande annonce en lien ci-dessous)
Le grand soir est signé par le duo de Groland, Gustave Kerven et Benoît Délépine. Ils ont réalisé ensemble quatre films, et je trouve que ce dernier est le meilleur. Pour Aaltra et Avida, je n’étais pas habituée à cet univers particulier, cet humour noir et absurde, ces personnages pitoyables. J’ai plus apprécié Louise Michel, avec Yolande Moreau (ex Deschiens) : son patron délocalisant l’usine, elle paie un tueur à gages ridicule (Bouli lanners) pour le faire assassiner. J’ai aussi aimé Mammuth, où Depardieu part à la recherche de ses points de retraite manquants.
Le grand soir, qui fait référence à la notion révolutionnaire prônant une société nouvelle, commence par la longue errance de Poelvoorde/Not dans les rues de sa ville jusqu’au centre commercial, à la recherche de bières et de quelqu’un avec qui les partager. Comme souvent chez les réalisateurs, le début est lent et contemplatif, pour signifier le vide et la dure vie du punk, et j’ai craint de m’ennuyer, à tort. On voit ensuite toute la famille réunie autour d’un repas surréaliste. Les deux fils parlent en même temps de choses totalement différentes : le punk de son mode d’existence et de l’accueil que lui font les habitants, le fils rangé du dernier appareil high tech à la mode et de l’achat à crédit. Toute la salle de cinéma explosait de rire, ce qui était le but, mais je ressentais d’abord le malaise que crée ce décalage. J’ai eu la même sensation lorsque Dupontel, licencié, le compte en banque vidé par sa femme qui l’a foutu dehors, tente de s’immoler en plein supermarché, devant tous les clients poussant leur chariot, sans que personne ne réagisse. Le film illustre l’individualisme de la société et le repli sur soi en temps de crise. S’il crée un goût de révolte à travers les actes des personnages pour s’en sortir et réveiller les consciences, il ne donne pas vraiment d’espoir.
Les réalisateurs utilisent souvent des plans larges afin de montrer l’absence de communication entre les personnages, comme pour la scène dans le supermarché. J’ai éclaté de rire lorsque Poelvoorde tente lamentablement de vanter les mérites de son frère licencié en tendant un C.V trempé à une hôtesse, tandis qu’à l’arrière plan on voit Dupontel crever des ballons un par un (voir l'extrait en lien). Plus tard, avec un magnifique plan séquence dans un vaste champ, Dupontel/Don Quichotte se battra contre un pauvre arbuste.
J’ai vraiment estimé que le film démarrait et devenait drôle lorsque Dupontel se met à péter les plombs. Comme les autres spectateurs, j’ai pu rire de bon cœur à de maintes reprises face aux situations absurdes. Certaines idées scénaristiques sont même poétiques : les personnages décident d’aller littéralement « droit devant eux » sans dévier de leur chemin pour prendre la route balisée. Ainsi ils traversent un lotissement en escaladant les barrières, rentrant chez les habitants, ressortant par la porte du jardin, tout simplement parce qu’ils vont « tout droit ». L’utilisation des lettres des enseignes publicitaires est également une belle idée poétique.
L’humour noir est toujours de mise, par exemple lorsque les deux frères surprennent un homme la corde au cou et tentent de le dissuader de se suicider : « mais ce n’est pas original comme façon de faire ! » « Tu vois, je suis psychologue, j’ai senti qu’il n’allait pas bien ». L’homme suivra le conseil : il mettra finalement fin à ses jours de manière beaucoup plus spectaculaire.
Comme pour Aaltra, la B.O est signée par Les wampas, qui ont d’ailleurs enflammé la croisette au dernier festival. On voit un concert du groupe lors du film. Poelvoorde slame au-dessus du public, pensant communier avec lui, mais les spectateurs le portent jusqu’à une poubelle… Comme beaucoup je pense, j’ai découvert les Wampas avec leur fameuse chanson polémique, qui comme toute œuvre censurée provoque inéluctablement l’effet inverse escompté : le public curieux se presse de découvrir l’objet de la discorde. Je parle de la chanson Chirac en prison (« j’attends 2007, c’est mon seul espoir de sortir du brouillard, c’est ma dernière chance, faut que j’aie confiance en la justice française ».) Lors du passage de la pub, le nom du président était barré par un rectangle noir et un « bip » pour ne pas le reconnaître ! La télé refusant d’en faire un clip, les Guignols s’en chargeront. Les Wampas ont ensuite connu le succès avec leur hit Manu Chao. Dans Le grand soir, on entend leur chanson Comme un punk en hiver.
On peut écouter aussi des refrains de Noir Désir ou Brigitte Fontaine : je suis in- inadaptée. La chanteuse a d’abord refusé d'apparaître dans le film, expliquant qu’elle ne voulait jouer qu’une « sorcière dans la forêt ». Les réalisateurs ont alors réécrit le scénario en remplaçant le terme « la mère » par « la sorcière dans la forêt » et Brigitte Fontaine a accepté le rôle…
Autre star du film, le chien bien évidemment ! La même race que celui de The artist, mais pas du tout le même caractère : il a mordu toute l’équipe durant le tournage, envoyant même le premier assistant à l’hôpital. Un vrai rebelle, un punk quoi.
20:35 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : cinéma, le grand soir, benoît poelvoorde, les wampas | | Facebook