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11/09/2013

Quand le cinéma nous embobine avec ses coups de fil

ciné embobine téléphone.jpgTélérama a publié récemment (dans l’espace-temps de mémé, ça fait un mois) un article traitant des facilités au cinéma (ici en lien). Je le complète avec d’autres incohérences qui me turlupinent depuis longtemps (je me pose toujours des questions essentielles) :

Télérama : « Quand le héros téléphone à une administration (d’accord, lui c’est le FBI, vous la Sécu), on lui répond à la 3ème sonnerie, il ne doit pas taper « étoile » et ne patiente pas avec les 4 saisons de Vivaldi. »

inspecteur la bavure téléphone.jpgJ’ai aussi remarqué qu’au téléphone, le héros ne dit aucune banalité d’usage, et raccroche sans dire au revoir.
Par exemple, le super flic reçoit un appel de son collègue, qui au lieu de dire d’un ton guilleret : « Salut c’est Franssou, ça va ? C’était pour te signaler où est Charlie le dealer, chez Paulette la reine des paupiettes … On le cueille quand ?
- Ça va bien et toi ? Comment s’est passé ton rendez-vous avec inspecteur La bavure ? Merci beaucoup pour l’info ! On partira de bon matin sur les chemins, à bicyclette, avec Francis et Sébastien et puis Paulette. On se tient au courant, je te rappelle, bisous, nan c’est toi qui raccroche ! »

Dans les films, le héros décroche sans sourire, entend une voix sombre lui dire : « Charlie est chez Paulette » et le héros raccroche sans un merci ni merde. Pareil, quand il donne rendez-vous, il ne précise jamais l’heure, mais assène juste sur un ton grave : « demain, chez Paulette ».
Moi, il me faut l’heure exacte, l’itinéraire RATP, le calcul du temps de trajet, et une dizaine de précisions : « Quand tu dis 19h, c’est en temps normal ou en temps papillotien toujours en retard ? On se rejoint plutôt à la sortie du métro ? Car Mappy conseille 6 minutes à pied, avec 3 rues et 2 tournants, je vais me perdre à tous les coups ! » Et quand je suis sur place, je rappelle encore, affolée : « T’es à quelle sortie ? J’suis à la 3 ! Quoi la 5 ? Mais elle n’est pas indiquée ! »

ciné embobine max-menace-chaussure-telephone.jpgJ’ai essayé la technique cinéma une fois, avec un collègue qui me demandait un service par téléphone : « Papillote, ça va ? Je te dérange pas ?  Tu pourrais voir si c’est pas toi qui as le dossier Trucmuche s’il te plaît ? Je le trouve pas… »
J’ai voulu répondre à la James Bond un simple et efficace « Ok, ça marche. » et j’ai raccroché directement. Quand j’ai apporté le dossier, le collègue a bronché : « Et la feuille rose ?
- Bah, tu ne me l’as pas demandé ?!
- J’ai pas eu le temps, t’avais déjà  raccroché !! »

Conclusion : dans les films, répondre sèchement donne un style efficace, actif, viril. Dans la vraie vie, c’est malpoli.

Suite demain…

06/09/2013

Le Rock en saigne : le dernier métro pour une claustro

le-dernier-metro.jpgMémé Papillote, qui était fière d’avoir eu la présence d’esprit d’échapper aux mouvements de foule à Rock en Seine, se retrouve donc très intelligemment à prendre le métro à la fin du dernier concert, comme… tout le monde, environ 30 000 personnes. Je suis contrainte de faire le mouton et de suivre le troupeau qui nous mène à l’abattoir : le métro…

Emportés par la foule, qui nous traîne, nous entraîne, nous éloigne l´un de l´autre, je perds mes parents-potes en route, ce qui était ma crainte de la journée. Je me retrouve seule avec une vague connaissance. Pour peaufiner le tout, une pluie battante s’abat sur nous. Mais la pluie au moins, c’est l’eau, l’air, la vie… car nous nous engageons dans le long tunnel du métro, sans savoir où il nous mène, croisant de temps en temps des regards atterrés rebroussant chemin : ce n’est pas bon signe. Où allons nous ? Quelle est notre destination finale ? On va tous mouriiiiiir !!!
Une dizaine de minutes plus loin, avançant de plus en plus péniblement, nous tournons enfin dans le couloir qui nous mène aux portes du paradis, le métro. Et nous restons bloqués à 3 mètres de la délivrance, car, de manière incroyable, les portiques sont…fermés. 4 mastodontes de la sécurité se tiennent derrière, seuls, peinards, et nous regardent, affluer de plus en plus, nous serrer de plus en plus, étouffer de plus en plus. Impossible de bouger. Impossible de faire demi-tour, nous sommes pris au piège. La RATP, partenaire officiel du festival, vous assure un confort maximal. J’aurais dû m’en souvenir pourtant : RATP signifie en fait « rentre avec tes pieds ».
Commençant à avoir du mal à respirer, je me rappelle à ce moment opportun que je suis en effet légèrement claustrophobe. Petit détail. Quand il se voit enfermé dans un espace clos, le cheval sauvage se rend soudain compte qu’il a envie de courir le monde après son destin.

classe de neige.jpgJe crois que cette claustrophobie date de mes 8 ans. J’étais en classe de neige (l’un des pires souvenirs de ma vie, mais heureusement pas pour les mêmes raisons que le personnage d’Emmanuel Carrère –ou le film de Claude Miller-). J’avais atterri dans le dortoir des 3 pestes de la classe, mon alcoolique de prof (véridique, elle planquait sa bouteille sous son bureau et sentait l’alcool à plein nez) pensant sans doute qu’une élève sage comme moi allait tempérer les grandes gueules. Une nuit, j’ai entendu dans mon sommeil comateux des cris, puis senti un bras énergique me tirer du lit. Je n’ai même pas eu le temps de dire ouf. Percevant des petits rires sortant du dortoir, un surveillant était rentré en trombe, avait crié pour obtenir le silence, puis pris la première victime innocente lui tombant sous la main (moi). Il m’a entraîné dans une salle de bains, a fermé la porte en criant « ça t’apprendra, tu resteras ici ! ». Le temps m’a paru interminable, j’étais terrorisée, enfermée dans cette petite pièce, dans le noir complet.

Je me suis plaint à ma famille dans une lettre. Ma mère a téléphoné paniquée en demandant ce qui se passait, et bien évidemment est tombée sur le surveillant. Je me rappelle encore de son regard noir quand il m’a passé le combiné, en restant à côté de moi pour vérifier ce que je disais. Je n’ai pas osé réitérer mes propos devant l’oeil menaçant de mon bourreau, et les 10 derniers jours de la classe de neige ont été un long supplice. Je pense que ceci peut expliquer en partie ma peur des espaces clos, petits et obscurs, et ma difficulté à m’endormir sereinement… (Je crois que le pire dans cette histoire, c’est qu’à mon retour tant espéré, ma mère a oublié de venir me chercher à l’heure, et mon frère s’est foutu de ma gueule pendant des années en me récitant par cœur des passages de ma longue lettre mélodramatique (j’avais déjà le goût du drame et de l’écriture à l’époque).

Mais passons et revenons à nos moutons coincés dans le métro :
Les portiques ouvrent en fait toutes les dix minutes, seulement lorsqu’un métro arrive. Car évidemment, la RATP-partenaire-officiel-du-festival n’a pas jugé utile de multiplier les rames face à la significative augmentation de voyageurs.
Pour accentuer ce moment de bonheur et de convivialité, je me retrouve du côté gauche des portiques, c’est-à-dire ceux qui s’ouvrent… uniquement pour la sortie. Je suis donc bousculée et insultée copieusement par les quelques rares malheureux qui ont pensé que c’était une bonne idée de sortir à cet arrêt à l’heure du final de rock en Seine.
45 minutes de cauchemar plus tard, sans même toucher le sol, la foule me pousse en avant et je parviens à passer un portique. Toujours honnête, j’ai le réflexe de valider un ticket, avant que les gens derrière me hurlent d’avancer plus vite.

Creep.jpgJe respire enfin, je suis passée en zone libre. Je me retourne, et mon accompagnatrice a disparu. Il est 1h40, je vais atteindre le métro, mais j’ai encore une correspondance, que je ne pourrai jamais obtenir. Je suis à plus d’une heure de chez moi, seule, sans argent, et mon portable n’a presque plus de batterie. Le parfait scénario de film d’horreur, qui se déroule très précisément dans ma tête grâce à mon imagination débordante. Et comme je suis aussi cinéphile, je me rappelle les scènes d'angoisse du film Creep... J’ai trouvé très malin de partir avec le strict minimum, craignant la promiscuité et les vols. Je n’ai pas pris mon portefeuille mais uniquement 25 euros en liquide, que je trouvais largement suffisants. C’était sans compter les prix exorbitants associés à un estomac sur pattes…
Je me remets à paniquer (ça faisait longtemps) seule du bon côté des portiques, tandis que le reste du troupeau bloqué derrière me regarde avec envie. 10 minutes plus tard, mon accompagnatrice me rejoint enfin, et me voyant désemparée, à l’immense bonté de m’héberger. Mémé ne s’endort qu’au premier chant du merle à 7h30, car elle ne retrouve pas ses petites habitudes, et surtout, des jeunes éméchés jouent au « uno » sur leur balcon jusqu’à 5h30, en hurlant dès que l’un d’eux pose une carte « +3 » ou « retour en arrière ».

A part cette fin apocalyptique, j’ai tout de même beaucoup apprécié l’ambiance du festival. Si j’y retourne, je prendrais le temps de faire tous les jeux et de regarder plusieurs concerts, et surtout, je rentrerai avant la fin du spectacle pour obtenir une place dans le métro…

19/08/2013

Lone Ranger, naissance d'un héros

lone ranger.jpgAu 19ème siècle, à l’époque du Far West et du début du chemin de fer, John Reid, avocat idéaliste, veut rejoindre son frère shérif et sa belle sœur, dont il est secrètement amoureux. Le terrible Buth Cavendish, qui devait être jugé pour ses crimes, s’évade. Le shérif et ses Texas rangers partent à ses trousses, sont pris en embuscade et massacrés. John Reid décide de se faire passer pour mort pour mieux venger anonymement son frère. Avec l’aide de l’indien loufoque Tonto (Johnny Depp) et son fidèle destrier Silver, il devient le Lone ranger

On retrouve l’équipe de Pirates des Caraïbes, avec les mêmes scénaristes, le même réalisateur (Gore Verbinski) et le même acteur grimé de manière similaire, Johnny Depp. Celui-ci incarne encore un personnage très décalé, et les deux films associent de la même manière aventure et humour. D’ailleurs, j’ai offert le poster de Lone Ranger à mon petit neveu, en train de lire le roman Pirates des Caraïbes, et il a confondu les deux...

cinéma, sorties cinéma, lone ranger, johnny deppCe film a fait un bide monumental aux Etats-Unis. Je trouve ce sort injuste.
Pourquoi un tel flop ? Peut-être que les Américains n’ont pas saisi la parodie, ni les références. Comme pour Mars Attacks de Tim Burton, un film que j’adore, auquel ils ces lourdauds ont préféré le très premier degré Independence day de ce tâcheron Roland Emmerich (2012, Godzilla) sorti à la même période.
Lone ranger lance des clins d’œil à plusieurs westerns, La prisonnière du désert, Little big man (Tonto devenu vieux)… La scène d’arrivée en gare avec les bandits qui attendent fait évidemment référence à Il était une fois dans l’ouest, comme la musique de Hans Zimmer qui en reprend même certaines notes.

Peut-être que le public américain n’a pas apprécié cette nouvelle version d’un feuilleton très célèbre aux Etats-Unis et inconnu chez nous. Il a peut-être été déconcerté par le mélange des genres, humour décalé ou enfantin (production Disney) associé à des passages violents, très sombres. Dans Lone Ranger, l’attaque contre les Indiens est un prétexte pour la spoliation de leurs terres, sur lesquelles se trouvent des mines d’argent, et où le tout nouveau chemin de fer va enrichir les entrepreneurs cyniques. Les Américains n’ont peut-être pas accepté cette réflexion critique (même si on est plus dans les années 50, où les Indiens jouaient les méchants, à part dans des films comme La flèche brisée par exemple.) J'ai apprécié que Lone Ranger ne soit pas un pur divertissement décérébré.


J’appréhendais la longueur du film (2h30) surtout que lors de l’avant première, à cause de l’orage qui retardait l’interview, le film a débuté une heure après (« en 20 ans de carrière, on a jamais commencé une minute en retard » : fallait que ça tombe sur moi) (pour passer le temps, l’estomac sur pattes a bouffé tous les paquets de chips gratuits posés sur les sièges alentour). Pourtant Lone Ranger ne m’a pas semblé interminable.

Dans les films d’action, le déluge d’effets spéciaux est parfois très mal filmé. Avec la caméra qui virevolte dans tous les sens, on ne voit plus rien, on perd le fil et mémé attend que ça se termine pour ne plus avoir mal à la tête. Ici, la réalisation est parfaitement maîtrisée, la scène de l’attaque du train qui ouvre le film est vraiment spectaculaire.

cinéma, sorties cinéma, lone ranger, johnny deppJohnny Depp cabotine comme dans Pirates des Caraïbes et ne se renouvelle pas, mais le Lone Ranger, Armie Hammer (qui interprète les jumeaux dans l’excellent The social Network) est impeccable. Il veut sauver sa « belle » comme elle est nommée. Sauf que cette dernière est incarnée par Ruth Wilson, qui a un sérieux problème de bouche de canard (et de gros sourcils inquisiteurs avec des petits yeux méchants), donc je comprends pas trop ce que le chouquet Armie peut bien lui trouver. Elle jouait Jane Eyre, et je vous rappelle que ce personnage est censé être disgracieux (et lui convenait donc très bien). Mais bon, ce léger détail ne ternit pas le film, qui se regarde avec plaisir.

11/07/2013

Marius et Fanny

cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannySur le Vieux Port de Marseille, dans les années 30, Marius et Fanny s’aiment depuis leur plus tendre enfance, sans oser se le dire. Panisse, leur aîné de 30 ans, riche marchand de voiles, souhaite épouser Fanny, la pauvre marchande de coquillages. Cet évènement révèle enfin les sentiments de Marius, jaloux, et pousse les jeunes amoureux dans les bras l’un de l’autre. Tout irait pour le mieux si Fanny n’avait pas elle aussi une rivale, indomptable celle-ci : la mer…  Le romanesque Marius rêve de découvrir des terres lointaines et exotiques, voir ailleurs si l’herbe n’est pas plus verte, ou plutôt l’eau plus bleue. Ceci signifierait quitter son destin tout tracé : quitter son père, César, ne pas reprendre le bar familial, où se réunit tout ce petit monde, et bien sûr quitter Fanny…

cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannyJe ne résume pas le deuxième film, Fanny, car je révélerais le choix des personnages à la fin du premier opus. Même si ceci n’est pas le plus important : le plus intéressant, ce sont les réparties irrésistibles et la manière inéluctable avec laquelle les évènements s’enchaînent. Comme beaucoup, je connaissais déjà l’histoire, car j’ai vu et revu les premières adaptations de Pagnol quand j’étais petite. Je craignais donc un peu de m’ennuyer, car les deux films vus à la suite accumulent 3 heures. Pourtant, comme nous l’annonçait Daniel Auteuil en début de séance : « Vous verrez, ça coule tout seul ». Les situations s’enchaînent bien, les dialogues sont drôles, intelligents, émouvants, on ne voit pas le temps passer.
Même archi connue, l’histoire de ces amants tragiques est toujours aussi fascinante. Même si le contexte nous paraît vieilli, à l’heure où la plupart des couples avec enfants ne sont pas mariés (25 à 30 % en moyenne en France), ces amoureux semblent intemporels : Fanny, la femme sage et responsable, qui se sacrifie et qui prend en fait les décisions (c’est elle qui déclare sa flamme à Marius, etc). Marius, le doux rêveur qui ne sait pas ce qu’il veut vraiment…
Daniel Auteuil donne le thème principal des films : "Ce que je raconte, c’est la trajectoire d’individus qui n’accomplissent pas leur propre vie. Et c’est une tragédie de ne pas pouvoir accomplir son propre destin. C'est ça qui me bouleverse et que je raconte, la vie des autres."


cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannyJ’avais peur que dans cette nouvelle adaptation signée Daniel Auteuil, l’acteur réalisateur touche à un mythe. Il reprend le rôle inoubliable de Raimu, comment osait-il se comparer à ce géant ? Comment allait-il refaire les scènes cultes, comme celle de la partie de cartes ? Allait-il  « me fendre le cœur » ? Pas du tout. Comme il nous l’a expliqué lui-même : de ce point de vue, on ne jouerait qu’une seule fois les pièces de théâtre, on ne proposerait plus les classiques : « j’ai joué Molière, et j’aurais aimé qu’il soit à côté de moi pour me donner des indications ».

cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannycinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannyQu’apportent les nouvelles versions de Daniel Auteuil alors ? J’avoue que je ne me souviens plus en détail des films originaux, que je n’ai pas revus depuis 20 ans (coup de vieux), mais Auteuil leur amène sans doute de la modernité. Les premiers films datent des années 30, à l’époque, le jeu des acteurs était très théâtral, d’ailleurs les films étaient à l’origine des pièces de théâtre. Orane Demazis, qui incarnait Fanny, en rajoutait dans la grande tragédie et m’agaçait un peu.

cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannyRien de tout cela chez la jeune Victoire Bélizy, son jeu reste beaucoup plus intériorisé. En plus, comme le disait un spectateur à Daniel Auteuil : « merci, elle au moins, elle est jolie » (Orane Demazis se retourne dans sa tombe) et Auteuil de répondre : « oui mais Pagnol était fou d’Orane Domazis (ils étaient mariés), il ne voyait pas ça ! ». De même, je trouve que le jeune Raphaël Personnaz, qui interprète Marius, est bien plus charmant que l’austère Pierre Fresnay (même si j’appréciais cet acteur charismatique à la diction si singulière, dans Le corbeau, l’assassin habite au 21...)

J’avoue aussi qu’en voyant la bande annonce, le jeu des acteurs et le faux accent marseillais me rebutaient. J’avais l’impression de regarder un extrait de Plus belle la vie… Les comédiens ont tous un accent différent, par exemple un personnage parle comme un Parisien pour se donner plus d’importance. Leur manière de jouer aussi, théâtrale, avec de grands emportements, me faisait aussi reculer. Mais c’est le film, les tempéraments des personnages qui veulent ça, et tout coule de source dès la deuxième scène. Et en revoyant des extraits des originaux de Pagnol, les accents et le jeu des acteurs paraissent beaucoup plus marqués !

cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannyQuant à Daniel Auteuil, il reprend facilement l’accent qu’il possédait jeune avec le rôle d’Ugolin, dans Jean de Florette et Manon des sources, qui avaient également marqué ma jeunesse. Il ne tente pas ici d’imiter la prestation de Raimu, il est plus en retenue, plus simple, plus doux : à son image.
Marie-Anne Chazel est parfaite dans le rôle d’Honorine, la mère de Fanny. Avec ses emportements faciles, j’ai cru voir un instant l’ombre de « Zézette épouse X ».
Jean-Pierre Darroussin incarne un Panisse plus amène que celui des premiers films, l’acteur Charpin. Petite, je trouvais à ce dernier des regards torves et un air hautain qui me dégoûtaient. Ici, Darroussin me semble plus sensible, et j’adhère mieux au personnage. Dans la première trilogie, Panisse me faisait plus l’effet d’un vieux dégoûtant qui s’achète une pauvre jeune fille. Ici, Darroussin lui apporte plus d’humanité, celle d’un homme de 50 ans, inconsolable d’être veuf et sans enfant, qui caresse enfin l’espoir de faire le bonheur d’une famille.
La suite de la trilogie, César, n’est pas encore tournée et sortira l’année prochaine. Mais ce dernier film peut se voir facilement indépendamment des premiers : il se déroule 20 ans après.

cinéma,cinéma français,pagnol,daniel auteuil,marius et fannyEn résumé, je partais avec des appréhensions, et j’ai été agréablement surprise, j’ai beaucoup aimé. Je me surprenais à m’emporter avec eux, à lever les yeux au ciel et à invectiver l’écran, comme lorsque j’étais enfant (enfin de ce point de vue, je n’ai pas vraiment évolué…) : « M’enfin, pourquoi il dit ça ? »  « Mais pourquoi tu lui dis pas que tu l’ai-meuuuuuh !!!! » « Mais il comprend rien ce couillon ! » « Bah vas-y, casse-toi pauvre con ! » (Daniel Auteuil nous a révélé ensuite qu’il observait nos réactions depuis la cabine du projectionniste, hum). Je riais en voyant la tête jalouse et ahurie de Marius, filmé en gros plan, qui fulmine quand Panisse courtise Fanny. J’étais émue lors des demi aveux du fils à son père, pudiques tous les deux : « je t’aime bien, tu sais ». De vrais films romanesques.