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25/04/2020

Les oiseaux, partie 2

 
Réveille-toi !
Debout !
Tiens-toi droit !
On va leur montrer
Qu'on peut tout changer
 
Je sors donc de chez moi. Je me rends d'abord à la pharmacie chercher mes vaccins (pas contre le coronavirus malheureusement) Pour cela, je dois me faufiler entre les clients de la boucherie qui tiennent une file d'attente de 30 mètres pour aller bouffer du pangolin. Cette fois-ci, ils ont fait un effort : ils portent des masques, des vrais, ces précieux trésors introuvables. Mais ils les laissent autour du cou. Oui, ils les baissent pour pouvoir discuter entre eux...
Quant aux distances de sécurité, déjà, un mètre, je trouvais que c'était trop peu : lors de ma dernière sortie, le gamin qui m'a doublé en trottinette a échappé (jeté ?) son mouchoir, lequel avec le vent s'est immédiatement retrouvé 10 mètres plus loin. Alors avec les crachats de joggeurs, les gens qui toussent... La distance à maintenir à été remontée à 2 mètres minimum, et des médecins admettent que les postillons et éternuements peuvent se répandre à 5 mètres à la ronde.
 
J'ai bricolé un masque à ma façon. Certains prétendaient au début que c'était inutile, mais tous les hivers, je porte mon écharpe autour du nez dans le métro, et je suis rarement malade (enfin à part des maladies chroniques non contagieuses), pas même un rhume. J'ai donc imaginé une protection avec une superposition de filtre à café, de sopalin, de foulard puis de tour du cou. Au top de la mode pour la collection printemps-été 2020. 26 degrés, j'étouffe sous mes 4 couches de protection (et même 8 car les foulards sont pliés en deux). La prochaine fois, j'en rajoute une 9ème avec une serviette hygiénique. Je pars en mission commando suicide.
Il faudrait retrouver les oiseaux blessés
Ils sont bien quelque part, on peut les sauver
Vaut mieux tout recommencer, on peut pas se suicider
 
Parvenant tant bien que mal à me glisser entre deux pestiférés, je rentre dans la pharmacie. C'est la première fois en 5 semaines que je parle à quelqu'un de visu (si l'on excepte le simple "bonjour" avec les voisins devant les poubelles). Je suis si contente de tenir enfin une conversation (ah les médicaments, ma passion) que je me montre volubile. Sauf qu'avec mes 8 couches de protection sur la gueule, la pharmacienne ne comprend rien.
Moi : "fé  fou fé fan fi fote feu faq faufou fu cou
Pharmacienne : - Pardon?
 Plus fort : FE FOU FE FAN FI FOTE... 
La pharmacienne grimace et tend l'oreille. J'articule : - F'est fou ces gens qui fautent
Elle se rapproche encore. Rah et la distance de sécurité... Par réflexe d'agacement de ne pas me faire comprendre, j'écarte un peu ma super protection sans la baisser :
" C'est fou ces gens qui portent leurs masques autour du cou !"
- Oui ! C'est ce qu'on se dit tous ici en les voyant. C'est désolant. ça ne sert à rien... Puis en touchant leur protection, ils la contaminent."
 
Un ange passe. Me croyant jouer à 1,2,3 soleil, je m'immobilise comme lorsque le maître du jeu se retourne pour voir si on a bougé : car j'ai la main sur mon foulard. J'essaie de le redresser tant bien que mal car les 28 couches de protections se disloquent. Hum.
Respire! On va leur montrer
Respire! Qu'on peut tout changer
Respire ! Debout, souffle
Réveille-toi
 
Après la pharmacienne, je dois à présent affronter le médecin...
à suivre
 

20/04/2020

Les oiseaux, partie 1

coronavirus, confinement, chanson française, musiquePleure pas, crie pas
N'oublie pas que tu n'as plus vingt ans
Ne te laisse pas sortir
Ou tu vas mourir
Notre vie n'est pas foutue
Faut pas qu'on s'habitue
 
Deux pigeons roucoulent devant ma fenêtre ouverte à 1 mètre de moi. Ils ne respectent pas la "distance de sécurité" ni les "gestes barrières" ni la limite "d'une heure autorisée". Ils me narguent en marchant sur la margelle, faisant crisser leurs serres sur le zinc : "alors comme ça, on ne peut pas sortir ? Frustrant hein ?" 
Confinement J+ je sais plus combien. Et on n'a même pas subi la moitié. Parce que le 11 mai, j'y crois autant qu'à la marmotte qui met le chocolat dans le papier d'alu. En plus je fais partie des "personnes à risque" (contre toutes les apparences : pas parce que je suis une mémé) qui "vont devoir rester confinées plus longtemps". Pas près de revoir mes oiseaux ni les marmottes (et vérifier si c'est vrai pour le papier d'alu). (J'ai un doute, elles sont capables de tout ces petites bestioles).
 
J'ai eu une bonne excuse pour sortir : me faire soigner, car les médecins s'alarmaient que "la situation est aussi dramatique pour les malades chroniques que l'on a perdus, ils n'osent plus venir nous voir."
coronavirus, confinement, chanson française, musiqueRéveille-toi
Debout, tiens-toi droit!
On va leur montrer
Qu'on peut tout changer
Je sais bien que les oiseaux perdus
Ne reviendront jamais
 
Alors je me suis résolue à me rendre chez le docteur, qui m'a sorti son sempiternel "mais pourquoi vous avez attendu !" Déjà parce qu'à chaque fois je pense "nan c'est rien, ça va passer, oublie que t'as aucune chance, on sait jamais sur un malentendu ça peut marcher". Puis en ce moment, la "petite grippette" ne m'encourage pas à sortir. Et pour des piqûres, encore moins. La dernière fois ya deux mois, après 5 jours d'empalements par des perfusions grosses comme le pipeau du déconfinement prochain, mes veines ne pouvaient tellement plus supporter que les infirmières ont dû s'y prendre à 3 pour me piquer 7 fois : "désolées pour le massacre" à la tronçonneuse. Mes bras ont ressemblé pendant 3 semaines à ceux d'une toxico du canal saint martin. J'aurais bien tenté les piqûres par téléconsultation sinon, je suis sûre que mon médecin a un petit côté marabout. Il pourrait sinon me lancer la seringue de loin comme l'infirmière le fait à De funès dans L'aile ou la cuisse (voir en lien) mais mon docteur n'est pas aussi sadique.
Mais arrête de dire dans ton lit
Que tu vas faire tout sauter
Toussoter 
 
Je téléphone d'abord pour savoir comment on procède, car je n'ai pas spécialement envie de me retrouver dans une salle d'attente bondée alors que je slalome déjà entre les joggeurs et crachats dès que je sors de chez moi.
Secrétaire :
- Oui vous pouvez venir cet après-midi, il est réservé aux patients atteints du covid.
- Mais je l'ai pas moi ! Et je suis à risque en + ! 
- Ah non pardon, je voulais dire que le covid, c'est le matin, l'après midi, c'est les téléconsultations.
- Il va me vacciner par téléphone ? (un marabout, j'en étais sûre !)
- Non (ah flûte) mais vous pouvez venir, la salle d'attente sera vide."
Allons viens et calme-toi
Parle-nous, ouvre-toi
 
Je sors donc de chez moi...
à suivre...

13/04/2020

Le lundi au soleil, c'est une chose qu'on n'aura jamais

28 jours affiche.jpgChaque fois c'est pareil
C'est quand on est derrière les carreaux
Qu'on est confinés que le ciel est beau
Qu'il doit faire beau sur les routes
 
Ca y est, on y est. 28 jours plus tard, comme dans le film. Les gens se transforment en zombies agressifs. Les insultes fusent en bas de chez moi :
" Vous prenez toute la place madame !
- Va te faire tringler !"
Ou encore : "ça va 6 paquets de farine, ça vous suffit peut-être ?!"
J'imagine le carnage à la American nightmare après ce soir, quand Macron annoncera la prolongation du confinement. Vous pariez sur quoi ? Mi-mai, début juin, et plus si affinités ?
 
marmotte.jpgA part la réclusion forcée avec des voisins que je méprise, le confinement ne change pas grand chose à mon quotidien au final. Avant je me lavais déjà les mains 20 fois par jour (obligée, l'estomac sur pattes mange beaucoup). Je ne fais pas la bise (je trouve cette manie dégueulasse) ni ne serre la main, évite la foule, en sortant peu le week-end et en prenant le métro à peine une fois par mois (je préfère marcher). J'enlève mes chaussures en rentrant chez moi, enfile une tenue uniquement pour la maison, ôte les emballages des aliments avant de les mettre dans le frigo. Je fais mes courses une fois toutes les 6 semaines (je déteste faire les magasins) Je cuisine moi-même, n'achète pas de pain en boulangerie. Je fais déjà du sport, yoga et relaxation quotidiennement et je sors peu voir des gens (en tout cas presque jamais hors du quartier à + de 2 km de chez moi accessible à pied).
Donc quand je lis les conseils pour survivre au confinement, j'ai plutôt l'impression de lire mes habitudes de vie : "Ah y en a qui ne se lavaient pas les mains avant ? Qui supportent pas d'être seuls face à eux-mêmes ?"
 
Pour mon planning quotidien, j'ai juste remplacé le travail par l'écriture et ça me convient très bien. Je suis ravie de ne plus bosser ni de voir les têtes de cons du boulot. Mais c'est le défoulement physique que le taf me procurait (beaucoup de marche, de montées d'escaliers) qui me manque, et plus que tout, ma promenade quotidienne au parc. Je les remplace par une heure de sport en +, mais même 2 à 3h par jour n'équivaut pas à  l'effort physique de la marche rapide, car je ne transpire pas en faisant des abdos. Le sport face à une fenêtre avec vue sur un immeuble hideux et les gamins qui braillent ne remplace par une promenade au milieu des mésanges qui gazouillent et des rosiers qui commencent à fleurir.
 
Je suis tellement sevrée de verdure que je rêve régulièrement, tous les hivers, que je marche en montagne. Si je ne peux pas aller cet été dans les Alpes voir mes marmottes parce que l'épidémie perdure à cause du confinement non respecté, au lieu d'observer les joggeurs depuis ma fenêtre, je vous préviens, je vais faire du tir aux pigeons dessus. Je ne pars pas en vacances sur les plages crades et bondées de la Méditerranée (quelle horreur) mais dans les alpages où je ne croise personne en 4 heures de balade (je me promène entre 15 et 19 heures quand les rares randonneurs rentrent et donc que les animaux sortent). Je ne vais pas contaminer les marmottes et les bouquetins à 20 mètres de distance.
 
alpes.jpgDis, ça fait combien de temps
Que tu n'as pas vu un peuplier, une fleur des champs?
Si tu as quelques chagrins
Pour les oublier il y a toujours une gare, un train
Change de ciel, viens voir la terre
Voir le soleil et les rivières
Viens à la maison y a le printemps qui chante
 
 
 

11/04/2020

Viens à la maison y a le printemps qui chante

buffet froid.jpgEt vu qu'il fait 26 degrés on peut même directement passer à : 
Voilà l'été j'aperçois le soleil
Les nuages filent et le ciel s'éclaircit
Et dans ma tête qui bourdonnent ? Les abeilles
J'entends rugir... la perceuse du voisin 
 
Normalement quand les beaux jours arrivent, je vais me promener quotidiennement au parc voir les canetons et je leur donne à chacun un petit nom (Poupou, Poupinou, Poupinounet). Avec le confinement, on nous a promis le silence dans Paris, le retour des oiseaux, des renards, des dinosaures. J'ai entendu une timide mésange charbonnière  "tiens, les cons sont partis, et si je tentais une sortie ?" mais elle a été immédiatement interrompue par le doux chant d'une perceuse. J'ai tenté de l'amadouer en mettant sur youtube "chants d'oiseaux de nos jardins" en me disant que ça servirait comme appeau, qu'elle viendrait sur ma fenêtre, que je lui donnerai des graines, qu'on deviendrait copines etc, mais peine perdue. Je n'ai plus qu'à apprivoiser le clodo qui gueule en bas de chez moi en lui lançant des canettes de bière.
 
La voisine qui refusait jusque-là de marcher et de faire du sport, habitant à côté d'un parc depuis 10 ans sans y avoir jamais mis les pieds (!!), se découvre soudainement une passion pour la corde à sauter. Le sol et les murs tremblent. Entre l'éléphant et la perceuse, l'immeuble va bientôt s'écrouler.
Le voisin s'est mis à la guitare aussi. Heureusement il a bon goût, en jouant Beatles et Rolling Stones, mais comme il apprend, il répète inlassablement les mêmes (fausses) notes. J'adore les Gymnopédies d'Erik Satie, mais version orchestre de professionnels, pas musique de chambre de débutant confiné. 
 
buffet blier.jpgAprès Jack Nicholson défonçant la porte de la voisine à coups de hache, j'envisage le remake de Buffet froid :
" Qu'est-ce que tu fous dans cette tour ?
- Mais je suis locataire !
- Eh ben tu vas déménager. Cette tour est malsaine. Des meurtres ont été commis, ça suffit comme ça je ne veux pas d'un nouveau criminel comme voisin.
- Mais j'ai jamais tué personne moi ! Je suis un artiste, je suis musicien ! Je suis 3ème violon à l'opéra.
- Qu'est-ce que t'as dit ? Mettez-lui les menottes. Y aura pas de violoniste dans cette tour. C'est une tour interdite aux musiciens, sans gamme et sans arpège ! On ne veut pas devenir dingues avec ton archet qui va grincer 4 heures par jour ! Ca me scie les nerfs moi, je suis allergique ! T'as connu une dénommée Jacqueline Pradel ?
- Oui, une grande artiste !
- Très grande. C'était ma femme. Elle passait son temps à faire des gammes. Le soir je rentrais du boulot vanné et elle m'accueillait avec des gammes, toujours des gammes ! Pas moyen de se reposer 5 minutes ! Alors un jour j'ai branché son violon sur le 220.
- Elle est pas morte dans son bain ?
- Bien sûr que non. Son bain je l'ai fait couler après..."
Spéciale dédicace pour les voisins.
 
Pire que la guitare, la corde à sauter et la foldingo qui développe des tocs en passant l'aspirateur 3 fois par jour et vérifiant si sa porte est bien fermée alors qu'elle est pas sortie depuis un mois, une voisine écoute de la musique pourrie avec des gonzesses qui hurlent à la mort comme si on les égorgeait. Je ne supporte pas ce genre de "chanteuses à voix" qui chouinent et hululent. Ca m'horripile, mais vraiment. Tous mes muscles se tendent, j'ai envie de frapper quelqu'un et si la gonzesse beugle trop longtemps, le désespoir m'envahit. A Guantanamo on faisait craquer les prisonniers en leur mettant du Britney Spears en boucle, mettez moi du Céline Fion et j'avoue tout au bout de deux chansons pour arrêter la torture. Alors à défaut de pouvoir comme Blier brancher la voisine sur le 220, je mets de la musique à l'extrême opposé, très joyeuse, très dynamique et brute de décoffrage : du punk rock celtique (Flogging Molly et Dropkick Murphys je les ai vus plusieurs fois en concert, ça déménage) en boxant contre un vieux coussin. Si j'avais une imprimante, j'aurais scotché la photo des voisins dessus pour plus de réalisme.
à suivre...