28/09/2015
Tatie Danielle
Quand elle était bébé, je ne vous cache pas que garder ma nièce relevait plutôt de la corvée :
« Quel est ce délicat parfum qui envahit mes narines ? oh justement j’adore changer les couches, surtout après le repas, quel plaisir ! »
L’interaction et les échanges avec un bébé ne sont pas très stimulants intellectuellement :
Tu me tends ta peluche. Je te la rends. Tu me la redonnes. Je te la rends. 25 fois. Tu t'acharnes à vouloir mettre en tapant dessus le cube dans le trou pour le triangle. Tu appuies comme une malade sur ton téléphone Minnie, le ventre de ton poupon qui pleure, le jeu d’éveil avec environ 12 millions de sonneries et bruits insupportables (mais quel sadique a inventé ça ?!!!) Tu me montres ton livre d’animaux : « là, c’est le chat. Le chat fait maow. Oui je sais, je « fais super bien le chat ».
Un enfant ne comprend même pas les références cinéphiliques.
Les conversations avec un bébé sont toujours pleines d’échanges fructueux :
« Pourquoi tu pleures ? t’as faim ? t’as sommeil ? tu t’ennuies ? M’enfin pourquoi tu t’échines à me vriller les tympans ? réponds quoi ! » « Le dosage pour ton biberon, c’est combien déjà ? tu sais pas ? si je fais au pif, ça donne quoi, je t’empoisonne ? Pire, tu me vomis dessus ? »
Je m’échine à lui apprendre à parler :
« Je suis qui moi ?
Silence.
- Rien c’est ça ?! Je ne suis rien pour toi ! Vas-y, dis-le !
Répète après moi : pa-pi-llo-te.
- Papa.
- ok laisse tomber. »
Avant mon nom, ma nièce a d’abord prononcé un mot bien plus important et pourtant difficile à dire : « chat ». Elle le hurlait en courant avec enthousiasme après les pauvres bestioles pour leur tirer la queue. Elle a retenu sans problème le nom des 3 matous. Mais pour le mien, je pouvais me gratter.
Maintenant qu’elle a deux ans et demi, elle épelle enfin mon prénom sans trop de problème et parle enfin. Ce qui est beaucoup plus intéressant. Et elle parle beaucoup. Parfois même un peu trop... ( je me demande de qui elle tient…)
Suite demain


19:44 Publié dans Oh ? y a des gens autour ! | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : les enfants, ce bonheur de tous les instants | |
Facebook
25/09/2015
First light, pilou pilou
Je range tranquillement des bouquins lorsque mon collègue surgit en trombe :
- Je vais t’étrangler !
- Qu’est-ce que j’ai fait encore ?
- Toute la journée, tu n’arrêtes jamais, jamais…
- Mais quoi ?!!!
- Je disais rien, c’était discret, on est habitué depuis le temps…
Un autre collègue se joint à la conversation en s’esclaffant : - Ah oui je vois très bien de quoi tu veux parler, haha !
- M'enfin ?!
- Mais tu t’en rends pas compte ? C’est pas possible là : tu chantes tout le temps !!!!
L’autre fayot en rajoute une couche : - ça c’est sûr, on l’entend arriver avant de la voir, on sait tout de suite qu’elle est là.
- Je chante, je chante soir et matin… C’est même pas vrai ! Je chante pas !!
- Non, c’est pire : tu fredonnes ! « mmumhhhummhmmuh » ou tu sifflotes entre tes dents « tchitchiii chuchouchuchou» toute la sainte journée !
- Car j’étais sur la route toute la sainte journée, je n’ai pas vu le doute en toi s’immiscer…
- Ça ne dérange pas mais…
Fayot-perroquet : - Ah non, ça ne dérange pas, ça met de l’ambiance.
- Mais là c’est plus possible, t’es sur le même air depuis des jours, tu le fredonnes tu le siffles tu le chantes, mais sans connaître les paroles ! Par pitié apprends-les au moins ! Hier soir à cause de toi j’ai chanté : « first light, pilou, pilou, palou, pala, papaïou papala ! » Tu me rends timbré !
- C’est pas de ma faute on comprend rien à que cqui dit le chanteur et il chante même pas la France ! Puis t'as qu'à venir au concert avec moi ! Bien fait !
- Apprends les paroles ou tais-toi !! Ou repasse à Polnareff je préfère encore, au moins tu les connais par cœur !
- C’est vrai j’ai l’autorisation ?! (J’associe le geste à la parole en tapant des mains et du pied sur les syllabes) : « Femme que j’aime c’est Ta-ta-ta-Ta, femme que j’aime, mais
- Ce n’est pas toi, ça c’est sûr !!!! »
Et il s'en va, avant de voir la fin de ma superbe chorégraphie, la même depuis mes 8 ans lorsque je chantais Polnareff devant le miroir, avec ma corde à sauter en guise de micro.
Une heure plus tard, je vais voir le collègue des chansons :
- Bon j’ai essayé, mais c’est bien pour te faire plaisir !
- Pour me faire plaisir, qu’est-ce qu’il faut pas attendre…
Je sors une feuille de derrière mon dos.
- Qu’est-ce que c’est que ça ?!
- Ben j’ai imprimé les paroles ! Attends ya au moins 200 mots, la dernière fois que mémé Alzheimer a appris un truc par cœur j’étais en 6ème, vive les pompes !
Je prends mon inspiration et je chante consciencieusement comme une élève disciplinée :
- « Sending out a signal from the city we went, Towards a future that is greener than the money we spend… Tu vois, ya trop de mots ! Puis je les prononce mal ! Alors que Pilou Pilou, c’est plus rythmé ! C'est bon, j'ai fait un effort pour toi, maintenant à ton tour : tu viens au concert de Django Django avec moi ce soir alors ?
Collègue s’écroule sur son bureau, abattu.
J'ai attendu, attendu, il n'est jamais venu, zaï zaï zaï zaï.
Le collègue des chansons quitte définitivement le travail dans une semaine, je vais lui manquer, c’est sûr. Ironie du sort, lui qui ose se moquer de mes supers chansons, vient de découvrir son nouveau boulot : vérifier l'état de conservation, donc écouter... des vieux 78 tours de la chanson française. Ça ne s'invente pas. Demis Roussos et Guy Béart sont vengés. J'en rigole encore.
Je chante soir et matin
Je chante sur mon chemin


16:55 Publié dans On connaît la chanson | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : musique, chanson française | |
Facebook
20/09/2015
Guy Béart, il n'y a plus d'après
Guy Béart est décédé mercredi 16 septembre, à 85 ans, d’une crise cardiaque en pleine rue, alors qu’il se rendait chez le coiffeur.
Je l’ai toujours dit : ces individus sont dangereusement stressants. Ma question existentielle du jour était justement « vais-je chez le coiffeur ou pas ? Il va encore me mettre le moral à zéro : « han ! Mais que vos cheveux sont fins ! j’ai jamais vu ça, de vrais cheveux de bébés ! (donc très doux pourtant !)
Je suis sûre que le coiffeur de Guy Béart était aussi peu diplomate et que le chanteur angoissait avant de le voir. Oui, le coiffeur l’a tué.
Ma chanson a dit la vérité, vous allez m’exécuter.
J’aimais bien la tendresse des chansons de Guy Béart et sa bonne bouille de père tranquille. Ma mère chante souvent en cuisinant, et ça m’a rappelé quand elle préparait son fameux gâteau au chocolat en chantant « Je voudrais changer les couleurs du temps, changer les couleurs du monde… » Attirée par le bruit du fouet (à gâteaux hein, je suis pas maso) je me tenais tapie dans l’ombre, attendant qu'elle aille chercher son plat pour plonger une grosse cuillère dans la pâte, avant que ma mère se retourne en rouspétant (pourtant le mélange œufs-sucre cru est bien meilleur que le gâteau en lui-même, non ?)
De Guy Béart, ma chanson préférée reste l’eau vive. Elle m’évoque le Manon des sources de Claude Berri, gros choc de ma jeunesse, avec Emmanuelle Béart, la fille du chanteur. Comme un présage, le musicien a composé L’eau vive en 1958, cinq ans avant la naissance de son enfant, et 18 ans avant le film emblématique qui a popularisé Emmanuelle Béart. Comme dans Manon des sources, la chanson parle d’une fille très belle et sauvage, qui mène son troupeau de chèvres et les hommes à la baguette : ils en tombent amoureux mais elle garde sa liberté.
Quand j’ai vu Emmanuelle Béart pour la première fois, j'ai pensé comme Ugolin (Daniel Auteuil) : voici la plus belle femme du monde ! (Avant qu’elle ne décide de se massacrer en transformant ses lèvres délicates en bec de canard w.c.) Et si libre, si gaie ! Pauvre Ugolin, gentil, simple, éperdument amoureux de la femme inaccessible ! Comme je compatissais ! Il ne faisait pas le poids face au jeune et bel instituteur Hyppolyte Girardot, sûr de lui et de son intelligence. Mais je me consolais en apprenant que dans la vie réelle, le vilain canard avait triomphé : Daniel Auteuil a épousé Emmanuelle Béart.
Ma petite est comme l’eau, elle est comme l’eau vive
Elle court comme un ruisseau, que les enfants poursuivent
Courez, courez, vite si vous le pouvez
Jamais, jamais, vous ne la rattraperez.
Guy Béart a repris de vieilles chansons françaises, qui plaisent aux vieux comme ma mère :
« Mon amant me délaisse, o gué vive la rose ! Je ne sais pas pourquoi, vive la rose et le lilas, il va en voir une autre, o gué, vive la rose ! Ne sais s’il reviendra, vive la rose et le lilas. »
« Sur le pont de Nantes, un bal y est donné, la belle Hélène voudrait bien y aller, ma mère, m’y laisserez-vous y aller ? Non non ma fille, vous n’irez point danser »
Les enfants apprécient aussi les chansons de Guy Béart pour leur aspect conte d’apprentissage. On leur apprend souvent à l’école, ou en colo, au coin du feu. Comme par exemple : les souliers que j’aimais bien chanter :
« Dans la neige, il y avait deux souliers, deux souliers, dans la neige, qui étaient oubliés. Passe un homme, qui marche à grands pas, à grands pas, passe un homme qui ne les voit pas. Une femme qui regarde mieux, une femme n’en croit pas ses yeux. Combien d’hommes qui passent sans voir ? Combien d’hommes qui n’ont pas d’espoir ? Quelle chance, je suis arrivé ! Quelle chance, je les ai trouvés ! J’ai couru nu-pieds tant de chemins, j’ai couru, je les prends dans ma main. Je les chauffe, ils sont encore froids, je les chauffe, je les garde sur moi. Ô miracle, les petits souliers, ô miracle, sont juste à mon pied ! Dans la neige, ils m’étaient promis, dans la neige, je cherche une amie. »
En apprenant le décès de Guy Béart, j’ai envoyé le traditionnel sms à mon frère :
« T’as vu qui est mort ?
- Oui, je ne passerai pas voir la mère aujourd’hui, elle va me chanter tout le répertoire… »
Ce que je me suis empressée de faire jeudi à mon collègue des chansons :
« Viens ! C’est la fête en semaine, viens ! Je t’attends tu ne sais plus rien ! Plus rien ne nous sépare, viens !
- Justement je suis bien content de quitter ce boulot ! Plus de chansons à subir ! Oh oui « c’est l’espérance folle ! »
- Maintenant que tu vis, à l’autre bout de Paris, quand tu veux changer d’âge, tu t’offres un long voyage, tu viens me dire bonjour au coin de la rue du four, tu viens me visiter, à saint Germain des prés
- Ah mais Il n'y a plus d'après !! Je suis pas maso !!!
- Petit à petit tout s’effiloche, tout finit, je ne reçois plus que des taloches de la vie…
- oui, c’est ça !
- Mais demain je recommence ! mais demain je vais retrouver ma chance, c’est certain, j’ai gardé comme une flamme, qui éclaire un peu mon âme, j’ai craqué une allumette dans ma tête !
- C’est sûr t’es bien cramée !! »
Il rouspète mais je sais très bien que mes chansons vont lui manquer. Comme manquera Guy Béart à la chanson française :
La mort c’est une blague
La même vague nous baigne toujours
Et cet oiseau qui passe porte la trace d’étranges amours.
Quiz On connaît la chanson, retrouvez 9 titres dans le texte.


23:57 Publié dans La rubrique nécrologique, On connaît la chanson | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : guy béart, manon des sources, musique, chanson française | |
Facebook
17/09/2015
Highasakite, complètement perché
Les vendeurs ne connaissaient pas quand j’ai bredouillé :
« Je cherche l’album Silent treatment de « i gaz a quitte »
- Hein ?
- I gaz a qui thé ?
- Meuh ?
- Aïe azeu cat ? »
En fait on prononce à l’anglaise (donc je ne sais toujours pas comment) « high as a kite », qui signifie planer comme un cerf-volant. Mais moi je ne sais pas conduire, pas même un cerveau lent.
J’ai découvert ce groupe norvégien à travers l’émission Tracks d’Arte qui diffusait un concert. Les tambours, le cithare et les hululements de la chanteuse me donnent envie de danser autour d’un feu en tunique d’indienne, des plumes dans les cheveux, en chantant à pleins poumons. Ce que je ne peux pas faire dans mon appart de Paris, mais à la cambrousse, en tournant autour de la table du salon (j’ai 8 ans). Pendant que j'effectuais ma danse de la pluie en martelant le rythme des percussions sur mes cuisses, ma mère qui parle tout le temps m’a évoqué le énième mort du village que je ne connais même pas, comme si c’était tout à fait normal, comme si elle n’interrompait pas un spectacle magique. En revanche le chat me regardait tourner du haut de son perchoir avec curiosité ("ces humains sont décidément timbrés").
Contrairement au nom du groupe, les paroles ne volent pas très haut. Certainement conscients de leur pauvreté, les musiciens n’ont inscrit qu’une seule phrase de chaque chanson dans le livret du CD Silent treatment, une phrase qui revient en général en boucle.
Par exemple cette mélodie, qui m’inspire une danse joyeuse, innocente et enfantine, mais où la chanteuse évoque son désir de partir en… Iran. Mais oui quelle bonne idée, dans ce pays de la liberté comme dirait Marjane Satrapi ! « it’s common sense, a moral stand, but if I can choose, i go to Iran, I bring some booze and go on a bender, and I’ll be friend a married man » En gros : « j’amènerai du ricard et j’irai me pochtronner avec un homme marié » Finalement, le groupe mérite bien son nom de « complètement perché ».
Ou encore cette chanson, Leaving no traces, qui me laisse imaginer un indien sillonnant la crête des montagnes sur son cheval, l’horizon à perte de vue, un sentiment de liberté indomptable... Mais qui parle en fait de fille tirée par les cheveux et traînée dans les escaliers, puis de guerre nucléaire ou je ne sais quoi… comme dans la chanson Hiroshima.
Au lieu de fumer la moquette, vaudrait mieux fumer le calumet de la paix. (mais pas trop non plus, vu les yeux défoncés de la chanteuse sur la pochette de l'album)
Pour le concert au Trianon, Highasakite a commencé par la première chanson de Silent treatment, un air planant mais calme, aux paroles toujours très recherchées : « lover, where do you live ? In the sky, in the clouds, in the ocean ? » dans ton c ! La chanteuse ne portait pas des mocassins à franges mais des espèces d’énormes baskets-bottes de neige. Elle avait l’air d’avoir 17 ans, pourtant dans les clips elle en paraît le double. Elle ne parcourait pas la scène à cheval et ne lançait pas de flèches sur le public, mais restait assez statique et timide.
Une qui était complètement déchaînée par contre, c’est la chanteuse du groupe islandais qui suivait, Of monsters and men. Elle est carrément descendue dans la fosse pour danser avec le public. Le guitariste mettait également beaucoup d’ambiance en nous encourageant à taper dans nos mains, à chanter les refrains… Comme sur Little talks, leur chanson la plus connue : « Don’t listen to a word I say, Hey ! »
La petite salle du Trianon et les jeux de lumière renforçaient ce sentiment de communauté. L’un des meilleurs concerts que j’ai jamais faits. Bonne nouvelle, Of monsters and men repasse en concert à Paris en novembre !


12:00 Publié dans On connaît la chanson | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : musique, concert | |
Facebook