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29/04/2021

The undoing

kidman sorciere.jpgThérapeute à succès sur le point de publier son premier livre, Grace Sachs (Nicole Kidman) a un mari aimant (Hugh Grant) et un fils qui fréquente une école privée de prestige. Mais soudain, avec une mort violente, un époux qui disparaît et de terribles révélations concernant celui qu'elle pensait connaître, sa vie bascule... Voir la bande annonce en lien.
Je vous cite tel quel le pitch pour montrer les clichés. Le héros est souvent psy ou écrivain et là, bingo, il est les 2 ! On retrouve ainsi les archétypes : l’épouse et mère parfaite bafouée, contre la femme fatale sexy à problèmes. La seule personne normale dans cette histoire, c'est le pauvre gosse. Lui seul parle ouvertement (car la psy, comme son métier ne l'indique pas, en est incapable). J'avais imaginé plein de rebondissements possibles, mais non, que des évidences, et la fin est franchement nulle. J'ai été énervée de perdre mon temps : tout ça pour ça ?! 

Autre défaut totalement subjectif : je ne supporte pas la glaciale Nicole Kidman, sa tête de serpent, ses petits yeux cruels, son sourire de joker en lames de rasoir... Cette sorcière femme me donne la chair de poule. Si je fais abstraction du physique dans la vie réelle, c'est différent à travers l'écran, car l'actrice est souvent choisie pour sa beauté (l'acteur, il peut être laid, on est habitué à voir un vieux bedonnant se taper une jeunette sublime.) Ici le mari est joué par un beau gosse, même si Hugh Grant, à désormais 60 ans, a bien morflé depuis 4 mariages et un enterrement. Il délaisse son éternel rôle de gentil pataud pour prendre celui d'un sociopathe.

undoing filles.jpgOn est censé vivre le drame à travers les yeux de l'héroïne, et compatir pour elle. Je n'ai pas pu puisqu'elle m'est antipathique au possible. Elle se permet de foutre dehors et de gueuler sur les flics qui font simplement leur travail. A leur place je l'aurai coffrée pour outrage à agent. Je plains ses pauvres patients qui ont affaire à une psy si peu chaleureuse... Elle est si froide que je ne crois pas à ses sanglots, si botoxée que son visage reste figé. Pourtant, Kidman a été nommée meilleure actrice aux golden globes pour ce rôle !

Son personnage est censé être psy, mais est incapable de communiquer avec ses proches, ne connaît pas la personnalité de son mari et ne voit pas l'évidence. T'as épousé un médecin réputé, adulé, évidemment qu'il y a de fortes chances qu’il soit mégalo ! Et qu'il manque d'empathie, sinon il ne pourrait pas supporter de voir crever des gosses à longueur de journées ! Puis il se tape d'autres nanas, car il en a l'occasion (celles qui voient en lui un sauveur, celles qui sont attirées par le pouvoir et l'argent) et la fameuse excuse du "j'ai un boulot stressant, je vois des morts tout le temps, alors en baisant, je décompresse, c'est une pulsion de vie !")

Les époux paient très cher l'école du fils, ils le répètent souvent. Je me disais "ça doit être 10 000 dollars" Pire : 50 000 l'année. Pour une école primaire.  Un smic annuel représente 14 500 euros. Le père de la femme accorde un prêt à son beau-fils. 500 000 dollars. Mais qui sont ces gens, ils font quoi avec tout cet argent ?

The undoing rapporte donc un meurtre chez les ultra richous, comme une autre série avec la même actrice, Big little lies. (J'en ai parlé en lien). Leur maison, leurs fringues, leur opulence, leurs loisirs de luxe font rêver. Et leurs facilités : "je me sens stressée : je me baigne dans ma piscine privée/ vais voir mon masseur/ mon psy/ mon coach sportif à 200 euros la séance, me rend dans ma résidence secondaire en bord de mer" . Moi quand j'ai un coup de mou, je fais avec mes moyens : je me promène dans le parc bondé ou je me jette sur une tablette de chocolat à 1 euro.
The undoing comme big little lies sous-entendent ces réflexions :"même ces gens qui ont tout pour eux souffrent, finalement notre vie de pauvre n'est pas si mal, contentons-nous du peu qu'on a."

Les deux séries dénoncent aussi l'hypocrisie qui règne dans ce milieu, où l'apparence et la compétition priment : être le meilleur partout, au travail, à l'école, dans son couple, gagner le + d'argent, avoir la + grande maison, le métier le + prestigieux, dépenser le +. ...

Mais regardez plutôt Big little lies, épargnez-vous la soporifique et glaciale Undoing.

 

28/04/2021

Calls, une série à voir

calls.jpgUne fois encore, je me suis lancée sans rien savoir de la série. J'ai donc été très surprise par le dispositif : pas d'images, juste des enregistrements sonores de conversations. Avec ce que racontent les personnages, on doit comprendre ce qu'il se passe. Pour moi qui ai beaucoup d’imagination, le dispositif a marché du feu de Dieu : je voyais les scènes comme si j'y étais, alors que sur l'écran, seuls les dialogues s'affichaient, au fur et à mesure.

De plus, je suis très sensible aux voix, aux bruits, et ce dispositif m'a fait le même effet que l'ASMR : les poils hérissés, des frissons dans le cerveau. J'étais littéralement scotchée. Aucun film d'horreur ne pourra surpasser mon imagination, et plus le film est démonstratif, avec un déluge d'effets spéciaux, moins je suis effrayée. Et avec Calls, j'ai eu tellement peur que j'ai dû rallumer la lumière. J'ai dévoré la première saison d'un coup (10X10 minutes) et me suis couchée à 3 heures sans pouvoir fermer l’œil. J'ai adoré.
J'avais hâte de découvrir la deuxième saison le lendemain, mais je lui ai trouvé moins de cohérence et de pertinence, avec trop de personnages. La troisième saison, et surtout son dénouement, m'a déçue. J'aurais préféré rester dans le flou. A côté la fin de lost semble un chef-d’œuvre.
Puis j'ai reconnu les voix particulières d'acteurs (Marina Foïs, Matthieu Kassowitz, Ramzy) et entendre l'ex robin des bois dans un registre dramatique a parasité mon appréciation.

série,mycanalTout semblait calculer pour un remake américain : un personnage est installé aux Etats-Unis, et les couples se disent "je t'aime" à tout bout de champ comme les amerloques. Ce détail n'a pas manqué d'être souligné par la parodie des Creustel.
Bingo, Hollywood a fait un remake, mais je n'ai tenu que 2 épisodes. Ces gros lourdauds n'ont pas pu s'empêcher d’être trop démonstratifs : mettre plein de couleurs, des spirales, des motifs psychédéliques, qui empêchent de se focaliser sur les paroles et d'imaginer les scènes : on se contente de regarder les dessins qui bougent.
Par exemple dans le premier épisode quasi identique, la version originale se contente de citer les noms des villes de Paris et New-York et compte sur l'intelligence des spectateurs pour comprendre. Les bourrins eux, expliquent tout : "Mais comment se fait-il que tu vois la même chose que moi dans le ciel, alors que je suis à New-York, et que toi tu es à San Francisco, donc à 5000 km ?"
Dans la version française, le spectateur doit faire l’effort de relier les histoires entre elles pour comprendre, la version américaine nous mâche tout sur un plateau, toute la magie s'envole.
Bref, je vous encourage vivement à regarder la première saison française, mais inutile de poursuivre les autres.

26/04/2021

Strike, une série envoûtante

strike.jpgSuivant le conseil judicieux de Moviefreak, j'ai lancé la série sans rien en connaître. Inutile  : l'esprit de Strike est habilement délivré dès le générique. On comprend qu'on est tombé sur une série policière, un peu dans le style des polars des années 50 : les couleurs surannées, le héros tourmenté et mystérieux déambulant dans la ville, la nuit, le col relevé, le regard par en-dessous semblant épier, la cigarette négligemment fumée, ou bien sirotant sa bière, pensif. On le voit marcher au côté d'une femme magnifique. La musique colle parfaitement aux images "I walk beside you" et résume aussi bien la série : mélancolique, aux paroles simples, mais terriblement envoûtante, comme la voix de son interprète Beth Rowley. (à écouter en lien)

En général les histoires trop classiques me désolent, mais je considère Strike comme un retour aux racines du polar.
En vérifiant le nom de son auteur Robert Galbraith, je découvre que c'est en fait le pseudonyme de Jk Rowling. J'ai adoré Harry potter, mais aussi la série adaptée de son roman Une place à prendre.
Encore un point fort, c'est une série anglaise. Elle ne se déroule pas dans les villes imposantes, impersonnelles aux hideux gratte-ciel américaines, mais dans la magnifique Londres et la charmante campagne anglaise.
Pour moi, une série anglaise a plus de chance d'être subtile qu'une série américaine, comme Orgueil et préjugés est beaucoup plus fine que la chronique des Bridgerton. Ici, pas de personnages hystériques et hypocrites qui hurlent "hiiii ! oh my gooood love youuu" dès qu'ils se croisent en se prenant dans les bras, mais des gens normaux qui se disent bonjour d'un signe de tête et petite boutade pour exprimer leur sympathie. Bref de l'humour anglais, pudique et subtil. (retrouvez la suite dans mon livre "les clichés anglais vs américains").

La relation des deux personnages principaux, le détective et la collègue qu'il vient d'embaucher, œuvre beaucoup au charme de la série. Ils sont tous deux pudiques, et vont apprendre à se faire confiance et s'épauler. Au début, j'étais ravie que la série ne cède pas aux ficelles de l'intrigue amoureuse ("roh non pitié c'est trop cliché"), et se concentre sur les enquêtes ("on est là pour se creuser les méninges !")
Pourtant très vite, j'ai fini par les supplier "mais allez-y ! Faites-vous un bisou ! " et les enquêtes sont passées pour moi au second plan. Mais on n'est pas dans un scénario américain, où l'amoureux déclare sa flamme devant tout le monde en prenant un micro (exception anglaise : love actually). Le summum de la tension sexuelle, c'est quand Strike pose sa main sur l'épaule de sa partenaire.
Il faut dire que non seulement sa collègue est intelligente et forte, à traverser avec courage des épreuves difficiles, mais elle est aussi magnifique, j'ai été subjuguée par la beauté de l'actrice, Holliday Grainger. Son partenaire, bourru, ours et estropié (un peu la belle et la bête donc) est joué par Tom Burke, qui a incarné Orson Welles dans Mank de David Fincher.

La relation entre les deux héros est le fil conducteur de la série. En 2 saisons et 11 épisodes, on voit 5 enquêtes policières. J'ai été surprise de voir la première histoire se terminer en 3 épisodes, m'attendant à ce qu'elle remplisse la saison entière. J'ai eu du mal à rebondir directement dans une nouvelle intrigue, mais la concision permet aussi d'aller droit au but (pas comme Undoing par ex).

j'étais tellement envoûtée que je rêvais la nuit de Strike, me voyant déambuler moi aussi dans les rues de Londres. J'ai laissé passer une semaine avant de lancer une nouvelle série. J'attends donc avec impatience la suite ! (et le bisou !)

Strike saison 1 et 2 adapté de J.K Rowling sur OCS et Mycanal

22/04/2021

La llorona

llorona.jpgAu Guatemala, un général est jugé pour le génocide de la population maya, 30 ans auparavant. Lui et ses proches sont retranchés dans la maison familiale, assiégée par les médias et les victimes qui réclament justice. La nuit, le général désormais âgé, entend une femme pleurer. Pour ses proches, il est atteint de démence, mais pour ses domestiques indigènes, il entend la llorona... voir la bande annonce en lien.

Comme souvent, je ne savais pas de quoi parlait le film avant de le lancer, je ne connaissais ni l'histoire douloureuse du Guatemala, ni la légende de la llorona. J'ai donc dû décrypter au fur et à mesure, et ce côté énigmatique a renforcé le suspense.

Le général jugé dans le film s'inspire ainsi de Efraín Ríos Montt. Après un coup d'état en 1982, il a été condamné en 2013 pour génocide et crimes contre l’humanité. Les villages mayas étaient brûlés, les hommes et enfants tués, les femmes violées. Le conflit a provoqué plus de 100 000 morts, les militaires auraient participé à 626 massacres, l'armée reconnaissant la destruction de 440 villages mayas entre 1981 et 1983, durant l'apogée des événements. Le général n'a pourtant dormi qu'une seule nuit en prison, le procès se voyant annulé par le classique "vice de procédure". Le bourreau s'est éteint chez lui, à 91 ans, paisiblement. 

Paisiblement... ce n'est pas ce qu'espère le cinéaste. Si les hommes n'ont pas rendu justice, ce sont les morts qui s'en chargent dans son film, en évoquant la légende de la llorona (pleureuse en espagnol). L'âme en peine d'une femme ayant perdu ses enfants, les cherchant dans la nuit près d'un cours d'eau, effrayant ceux qui entendent ses pleurs de douleur. 

Une fois que l'on a compris l'histoire du Guatemala et de la llorona, on devine les rebondissements et le film peut sembler longuet. D'autant plus que le côté fantastique joue sur des ressorts éculés (la femme aux longs cheveux noirs qui sort lentement de l'eau, déjà vue dans Dark water, The ring etc...).
Plus que le traitement fantastique, trop classique, c'est le récit historique et politique, mêlé au drame familial en huis-clos, qui rend le film original et intense : que se passe t-il dans la tête d'un tortionnaire, et dans celle de ses proches ? Il est intéressant que le général se retrouve entouré de femmes : son épouse, sa fille, sa petite-fille, sa domestique. Ses femmes l'admirent, voient en lui le sauveur de la nation. Il leur offrait tout ce qu'elles désiraient pour éviter qu'elles se posent des questions et se rebellent. Elles vivent retranchées dans un cocon doré sans connaître la réalité du sort des indigènes (ou plutôt refusant de la voir). Le procès leur fait ouvrir les yeux et se rebeller contre ce patriarche tout puissant.

Toute l'injustice du génocide, la douleur d'un pays, de ces femmes, se retrouve dans la chanson La llorona. C'est une chanson traditionnelle mexicaine dont il existe plusieurs versions, on peut l'entendre dans le (très bon) film d'animation Coco par exemple. Le film de Jayro Bustamante en propose une version dans son générique final qui réussit son coup : la pleureuse m'a émue. Au point que j'ai eu envie de connaître les paroles. Je ne les ai pas trouvées sur internet, j'ai alors eu l'idée saugrenue de les traduire... ça m'a pris 2 heures. Une traduction devrait être une punition comme au temps de l'école, mais les contresens possibles m'ont amusée ! J'ai traduit à l'oreille, j'ai sûrement fait des fautes, je n'ai pas pratiqué l'espagnol depuis le lycée... (une éternité donc).

llorona manif.jpgTodos lloraban tu tierra, llorona
Ils pleuraient tous ta terre, pleureuse
Tu tierra ensangrentada
Ta terre ensanglantée
Sollozos de un pueblo herido, llorona
sanglots d'un peuple blessé, pleureuse
Y de su voz silenciada
et de sa voix bâillonnée
No sé que tienen las flores
j'ignore ce qu'ont les fleurs
Las flores del camposanto
les fleurs du cimetière
Que cuando las mueven viento
car quand le vent souffle sur elles
Parece que estan llorando
elles semblent pleurer
Te escondias entre las milpas
tu te cachais dans les champs de maïs
Para no ser perseguida
pour ne pas être pourchassée
llorona general.jpgLas almas perdidas vagan
les âmes perdues errent
Y sus lamentos no se olvidan
et leurs lamentations ne s'oublient pas
Los ninos se vistieron de hojas
les enfants se sont vêtus de feuillage
Las ropas quedaron en trapos
une fois leurs vêtements devenus haillons
Un grito agonico sueltas (?)
tu pousses un cri d'agonie
Te quedan (??) en mil pedazos
ils te brisent en mille morceaux
La luz que alumbraba
la lumière qui brillait
Enteniebras te lejo
t'a laissée soudain dans les ténèbres
Arrebataron tus suenos
on t'a arraché tes rêves
Pero tu fuerza quedo
mais ta force est demeurée
Teniste por los cafetales
tu as surgi dans les champs de café
llorona famille.jpgDoliente clamando justicia
affligée et clamant justice
Las balas callaron sus llantos
les balles ont tu leurs sanglots
Desde sabes no eres la misma
depuis tu n'es plus la même
Lava tus penas
lave tes peines
Con agua bendita del rio
avec l'eau bénite de la rivière
Convierte tu angustia en calma 
transforme ton angoisse en sérénité
Y la madrugada en rocio
et l'aube en rosée

17/04/2021

Les damnés de la commune

damnes commune.jpgLes damnés de la commune , arte.tv, jusqu'au 20 août
Pour fêter les 150 ans de la commune, voici un documentaire passionnant, résultant d'une enquête de 8 années. Il est illustré de gravures de l'époque et constitué principalement à partir des mémoires de Victorine Boucher, Souvenir d'une morte vivante.
A la fin des années 1860, l'empereur Napoléon III décide de moderniser Paris et la rendre plus salubre, en faisant appel au baron Haussmann. Celui-ci fait raser les maisons vétustes et les rues étroites du centre-ville, pour construire des parcs, des canalisations, de grands immeubles et de larges boulevards où le soleil peut pénétrer, afin d'améliorer la santé des Parisiens. Pour payer les travaux, les loyers augmentent, la misère aussi, et les anciens habitants pauvres du centre sont refoulés à la périphérie.

Le gouvernement tente de détourner la colère des Parisiens en la focalisant sur un autre sujet (astuce toujours d'actualité, en ces temps de Covid où la population se plaint de la mauvaise gestion de l'épidémie). Napoléon III déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870. 
Le conflit vire très vite au fiasco : 2 mois après, Napoléon III est fait prisonnier. L’empire s’effondre, la république est proclamée. Le gouvernement provisoire, dirigé par Adolphe Thiers, décide de négocier la paix avec les Prussiens. Mais "vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine" ! Dans la capitale assiégée, les habitants, eux, refusent de se rendre. Le siège de Paris est terrible : les plus riches mangent les animaux des zoos (comme Castor et Pollux, les éléphants du jardin des plantes), les plus pauvres mangent des rats ou meurent de faim.
Après une élection, la Commune de Paris est proclamée le 28 mars 1871. En deux mois, elle instaure de nombreuses réformes : école gratuite obligatoire et laïque, salaires augmentés dans l'enseignement, égalité des sexes et des salaires entre hommes et femmes, aides pour les veuves et les orphelins, limitation de la journée de travail à 10 heures pour les ouvriers, encadrement des loyers et réquisition des logements vacants...

Mais Adolphe Thiers mobilise une armée de Versaillais pour attaquer les Parisiens. S'ensuit de violents combats, qui s'achèvent par la semaine sanglante et la fin de la commune : environ 20 000 morts et exécutions sommaires dans les rues, puis 7000 déportations en nouvelle Calédonie.

Grâce au témoignage de la survivante Victorine Boucher, lu ici par Yolande Moreau, on revit la commune de Paris comme si on y était. Un documentaire passionnant et très émouvant, à voir.

15/04/2021

Allen vs Farrow, l'enquête

allen famille 2.jpg

L'enquête est étrangement menée. La petite Dylan se voit interrogée à 9 reprises, alors qu'elle n'a que 7 ans et que le protocole exige au contraire que l'enfant soit ménagée. Les archives sont supprimées. Les psys conclut que la petite ment : or un autre travailleur social reconnu analyse à son tour la victime et comme d'autres avec lui, estime au contraire qu'elle est crédible. Il révèle qu'il a reçu des pressions pour bâcler son enquête, que son rapport a été tronqué. Il est alors licencié pour insubordination, intente un procès, qu'il gagne
Selon lui et d'autres spécialistes interrogés, la petite ne se contredit pas, décrit précisément des détails (elle fixe un petit train lors de l'agression, etc.) Elle emploie des mots d'enfants pour parler d'actes sexuels qu'elle ne comprend pas, elle ne s'exprime pas comme si elle rapportait les dires d'un adulte. Elle ne semble pas instrumentalisée, car elle sait répondre non. Dans la vidéo témoignage après les faits par exemple, lorsque sa mère lui demande "c'est Woody qui t'a enlevé ta culotte ?" Dylan répond non sans hésiter.  A part cette question précise qui pourrait orienter les paroles de la petite, Mia pose des questions ouvertes, où elle lui demande de raconter ce qui s'est passé sans lui souffler les réponses. 

Certains suggèrent que les enquêteurs favorables au cinéaste étaient contraints :
Woody Allen possède de nombreux soutiens hauts placés, glorifie dans ses films la ville de New-York où s'est tenue l'enquête et lui rapporte beaucoup d'argent en retombées touristiques. Son oeuvre célébrée dans le monde entier engrange des millions pour l'industrie du cinéma. La majorité des médias l'encensent et le défendent. Avant même le verdict, Allen annonce à Mia qu'elle ne peut rien contre lui, qu'il a des soutiens, qu'on le croira lui, pas elle. Que si un procès a lieu, il fera en sorte de ruiner sa carrière, qu'elle soit embauchée nulle part.

Le juge chargé de l'affaire ajoute que le cinéaste n'a pas été acquitté : le procès n'a tout simplement pas eu lieu, car le juge a pensé que la fillette serait trop traumatisée par une longue procédure. Allen a demandé la garde de Dylan et de Ronan (fils naturel qu'il a eu avec Mia), garde qui lui a été refusée.

Le documentaire explique ensuite qu'il est difficile pour beaucoup de fans de croire en la culpabilité de quelqu'un qu'on adore (Cosby, Jackson, Polanski...) "Les gens ont un rapport existentiel à mon père", observe Ronan Farrow. Son œuvre fait partie de leur identité. Cela est d'autant plus difficile pour eux à croire."
Les médias soutenaient le cinéaste, avec ce dilemme "faut-il séparer l'homme de l'artiste ?" Aujourd'hui encore, beaucoup déplorent que le documentaire reste à charge. Seul un minimise. Ce n'est que récemment, après les scandales Weinstein, Me too, Polanski, Bill Cosby que les mentalités changent. Certains acteurs regrettent aujourd'hui d'avoir tourné pour Woody Allen et refusent d'être à nouveau associés à lui.

14/04/2021

Allen vs Farrow, suite

allen mia.jpgAllen et Mia

Mia Farrow se défend mal à l'époque : elle ne veut pas parler aux journaux, pour ne pas traumatiser sa fille. Woody Allen au contraire, est très offensif, il attaque son ex compagne dans les médias, la fait suivre par des détectives privés afin qu'ils prouvent qu'elle est une mauvaise mère. On pourrait dire : comme tout innocent, Farrow se défend mal : elle pense que la vérité suffit et que la justice triomphera, et que comme tout coupable, Allen crie au scandale, joue les victimes (d'une femme hystérique et jalouse), minimise en faisant de l'humour comme il sait si bien faire.

Le comportement de Woody allen n'aurait pas non plus été normal avec Mia. Il aurait instauré une relation malsaine d'emprise et de dépendance. Selon l'actrice, il ne voulait pas qu'elle tourne avec d'autres réalisateurs, était très en colère lorsqu'elle a accepté Rosemary's baby (son meilleur rôle pour moi).  Il l'isolait de ses proches, la rabaissait. Lui répétait sans cesse que sans lui, elle ne serait rien, ne tournerait aucun film, déjà trop vieille. En public, dans les médias, il l'encensait, en privé, il l'humiliait. "Au bout d’un moment, ce que j’étais ou pensais n’avait plus d’importance. J’avais l’impression de n’être là que pour le servir. Je suis rentrée dans ce rôle". 
Le documentaire démontre que Woody est aussi ambigu avec les femmes dans ses films. Ses personnages sont également obsédés par les jeunes filles de préférence.

Allen et les femmes dans ses films

allen manhattan.jpgUn journaliste étudie les ébauches de scénarios du cinéaste, et il constate que beaucoup de ses idées impliquent des étudiantes ou des serveuses de 17 ou 18 ans, éprises d'un homme adulte (joué par Woody). Par exemple,  Manhattan, qui s'inspirerait de sa véritable histoire avec une lycéenne de 16 ans. Dans le film, l'héroïne a 17 ans, lui 42. C'est elle qui lui court après, veut du sexe tout le temps. Ce n'est pas lui le prédateur de chair fraîche, il retourne la situation. Ce film culte m'avait pourtant dérangée : comment une belle jeune femme pourrait vouloir coucher avec un homme aussi laid et décrépi que Woody Allen ? Franchement qui peut y croire ? Etre attirée par son humour, son intellect oui, mais son physique ? En regardant ses films, j'ai souvent pensé qu'il jouait le pauvre gars perdu qui fait craquer les belles femmes à l'usure, ou en manipulant leur corde sensible. Je ne suis pas la seule à le supposer : "opportunément, elle est folle de lui, tandis que lui feint de la repousser. "Il se sert d'elle pour justifier son comportement de prédateur", analyse la critique ciné Claire Dederer. "On a l'impression, en regardant ses films, qu'il essaie de nous habituer à une certaine conception de l'amour, à ce rapport de force. Il nous conditionne", remarque de son côté la critique Alissa Wilkinson (Vox). "Ça revient de nombreuses fois dans ses films, d'année en année." 
à suivre...

13/04/2021

Allen vs Farrow

allen farrow.jpgEn 1992, Woody Allen est accusé de viol sur la fillette de 7 ans qu'il a adoptée avec Mia Farrow
Un documentaire de presque 4 heures, très fouillé, avec de nombreuses images d'archives et témoignages : psys qui ont suivi et interrogé la petite, juge en charge de l'affaire, proches, mais surtout, le témoignage de la victime Dylan, filmée à l'époque, puis adulte, et de celui de sa mère, Mia. Je craignais un documentaire racoleur, difficile, mais j'ai trouvé que les témoignages restaient fins et pudiques. Je tente un résumé ici.

Allen et les femmes

allen famille.jpgMia Farrow et Woody Allen ont vécu 12 ans ensemble. Mia avait déjà adopté de nombreux enfants, et Woody, d'abord réticent, accepte une nouvelle adoption à condition qu'il choisisse lui-même la petite selon des critères physiques : blonde aux yeux bleus. Le cinéaste devient très proche de cette enfant, Dylan, et Mia se réjouit de ce soudain instinct paternel. Mais il est justement trop proche, la fillette se plaint de gestes déplacés. Confiée à des psys, ces derniers confirment que le cinéaste se comporte bizarrement et qu'il ne faut jamais le laisser seul avec la petite. Dylan échappe pourtant à la vigilance de ses baby-sitters, et Allen en aurait profité pour l'agresser. Les jours suivants, la petite ressasse ce qu'elle a subi et sa mère la filme. Les vidéos apparaissent dans le documentaire, ainsi que de nombreux enregistrements des conversations téléphoniques entre Mia et Allen.
On y découvre un Woody Allen à l'antipode de l'image de brave gars pataud comique qu'il se donne dans les films : il se montre glacial, détaché, sans émotion. Mia pleure, bouleversée, lui demande pourquoi il a fait ça, et il se contente de répondre "tu sauras quand le moment sera venu".

On pourrait reprocher au documentaire d'être à charge : il ne donne la parole qu'à Mia Farrow et à ses défenseurs (les proches, les témoins, les psys, le juge...) Mais le cinéaste a refusé d'être interviewé. Woody Allen est néanmoins souvent entendu dans le documentaire : à travers les enregistrements de ses conversations téléphoniques avec Mia Farrow, d'anciennes interviews, et surtout son autobiographie qu'il récite en livre audio, où il décrit sa relation avec la fillette, puis sa future femme, Soon yi, l'autre fille de Mia. 

Allen et la petite Dylan

Il explique ainsi qu'il adorait Dylan et accédait à ses moindres désirs : elle oublie son doudou, il réserve une place en première dans un avion pour aller le chercher. Elle regarde Le magicien d'Oz et aime les chaussures de l'héroïne, il lui fait fabriquer la réplique le jour même pour qu'elle trouve la paire sur son lit le soir. Il raconte ces détails pour se discréditer, mais à l'inverse, cela démontre son obsession pour la fillette, ce ne sont pas des agissements normaux.
Dylan devenue adulte, mais aussi l'entourage, témoignent longuement de son comportement ambigu (lui faire sucer son pouce et d'autres détails scabreux que je vous épargne). Les parents d'élèves et professeurs révèlent que Woody passait des heures devant l'école à observer la petite derrière la fenêtre de sa classe par exemple. 

Allen et Soon yi

allen soon.jpgUn autre comportement de Woody dérange, avec une autre fille adoptée par Mia, Soon yi. Peu avant l'agression de Dylan, Mia découvre des photos pornographiques de Soon yi prises par Woody Allen. La jeune fille est âgée de 21 ans à l'époque, lui 56. Il la connaît depuis son adoption, une dizaine d'années auparavant.
Ce dernier ne peut qu'avouer devant les preuves, en se justifiant : "ce n'est qu'une passade"
. Les portiers de son immeuble, ses femmes de ménage qui trouvaient les préservatifs usagés après le passage de l’adolescente chez le cinéaste, estiment que la relation dure en réalité depuis des années, la fille était encore mineure, au lycée.
C'est une enfant renfermée, qui n'a jamais eu de petit ami avant Woody. Pour la sortir de sa coquille, Mia demande à Allen de l'emmener à des matchs de basket et des séances de ciné. Le réalisateur confirme dans son autobiographie que leur relation a débuté ainsi, parce que Mia lui demandait de s'occuper de sa fille : comme si c'est Mia qui l'avait voulu et provoqué. Pourtant elle lui demandait juste de la sortir, pas de coucher avec...

Lorsque Mia porte plainte après le viol de la petite Dylan, Allen change de stratégie : finalement, il ne vit plus une passade avec Soon-yi, mais une vraie histoire d'amour. Il convoque les médias et se justifie ainsi : il n'a pas pu violer sa fille adoptive Dylan, puisqu'il est amoureux d'une autre de ses filles, Soon yi. Mia est jalouse, elle invente le viol pour se venger.
à suivre demain

09/04/2021

Les films du mois : les histoires vraies

cinéma, histoire vraie, thrillerSuite des films de mars, après les lanceurs d'alerte (Dark waters, Official secrets, L'ombre de Staline), voici d'autres histoires vraies  :

- BlacKkKlansman : j'ai infiltré le Ku Klux Klan de Spike Lee, Mycanal, 2018

Au début des années 70, un policier noir infiltre le KKK... par téléphone. Il se lie avec ses dirigeants, et un collègue blanc complice (et juif, aussi haï par le KKK) se fait passer pour lui lors des réunions du groupe... voir la bande-annonce en lien.

Traiter des faits tragiques en dévoilant l'absurdité des rites et des membres du KKK à travers une comédie, c'est le parti pris réussi du cinéaste engagé (Malcom X) . Une satire au vitriol de l'Amérique profonde de Trump, qui rappelle les reportages du regretté Effet papillon.  "Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer" comme disait Beaumarchais. La fin du film, avec des images d'archives récentes, nous ramène brutalement à la réalité : tout cela est réel.  A ce propos, je ne peux que vous encourager à regarder l'excellent documentaire d'arte sur le KKK
Spike Lee choisit l'humour et l'inventivité de la mise en scène, avec des enchaînements parfois trop rapides, sans transition. Voici un nouveau film d'espionnage qui lui souffre au contraire d'une narration trop classique :

- The spy de Jens Jonsson, Mycanal, 2019

cinéma, histoire vraie, thrillerLors de la seconde guerre mondiale, une célèbre actrice suédoise devient une espionne chargée de séduire un haut dignitaire nazi. Contrainte ainsi de passer pour une collabo et taire son implication, notamment à sa famille et à son amoureux, elle ne sera crue et réhabilitée que 20 ans après sa mort. Voir la bande annonce en lien.
Un bon film d'espionnage, mais trop classique, il s'oublie vite. Dans le genre, je préfère largement Black book de Verhoeven.

- Le coupable idéal de Mikael Hafstrom, Mycanal, 2020

cinéma, histoire vraie, thrillerAutre histoire vraie venant de Suède, celle du plus grand serial killer du pays. Il est emprisonné à vie dans un asile. Une quinzaine d'années après les faits, un journaliste ressort l'affaire : il découvre que l'homme très solitaire a tout inventé, s'est attribué des meurtres et disparitions non élucidés pour plaire à ses psychiatres et faire parler de lui...Voir la bande annonce en lien.

Cannibalisme, faux traumatismes d'enfance qui expliqueraient sa folie... L'homme a recyclé toutes les théories psys et livres policiers qu'il a pu lire.  + c'est gros, + ça passe, + ça réjouit les médias amateurs de sensationnalisme, + ça plaît aux psys qui inventent des théories ("il recrée son frère jumeau décédé en découpant d'autres corps") Incroyable mais vrai ! Une bonne histoire, mais là aussi traitée de façon trop classique et sommaire pour rester dans les annales, dommage.

08/04/2021

L'ombre de Staline

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Gareth Jones est un jeune journaliste intrépide. Il a interviewé Hitler en 1931 et prévenu le premier ministre britannique, pour lequel il travaille en tant que conseiller, du danger que représente le chancelier et de la guerre qu'il prépare. Mais personne ne veut le croire. Il part à Moscou en 1933, dans le but d'interviewer cette fois-ci Staline. Il y découvre une presse muselée et un secret maintenu autour de l'Ukraine. Il se rend alors clandestinement dans le pays et découvre l'horreur de l'holodomor : la famine généralisée qui fait entre 3 et 5 millions de victimes... Là aussi, personne ne veut l'entendre, à part George Orwell qui en tirera son livre allégorique La ferme des animaux... Voir la bande-annonce en lien.

Lanceur d'alerte contre les fake news des médias (entre un journaliste renommé qui a obtenu le prix Pulitzer et un jeune inexpérimenté : qui croire ?) Un scénario qui fait écho encore aujourd'hui... Une bonne histoire, parfois très sombre (les jeunes enfants affamés contraints de manger le cadavre de leur frère mort...) mais qui souffre d'une narration trop classique et de longueurs.

A l'inverse, voici un film basé sur des faits réels sordides mais qui lui ne manque pas de dynamisme, d'inventivité et même d'humour : BlacKkKlansman : j'ai infiltré le Ku Klux Klan de Spike Lee.
à suivre demain
L'ombre de Staline d'Agnieszka Holland, 2020, sur Mycanal.