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22/04/2021

La llorona

llorona.jpgAu Guatemala, un général est jugé pour le génocide de la population maya, 30 ans auparavant. Lui et ses proches sont retranchés dans la maison familiale, assiégée par les médias et les victimes qui réclament justice. La nuit, le général désormais âgé, entend une femme pleurer. Pour ses proches, il est atteint de démence, mais pour ses domestiques indigènes, il entend la llorona... voir la bande annonce en lien.

Comme souvent, je ne savais pas de quoi parlait le film avant de le lancer, je ne connaissais ni l'histoire douloureuse du Guatemala, ni la légende de la llorona. J'ai donc dû décrypter au fur et à mesure, et ce côté énigmatique a renforcé le suspense.

Le général jugé dans le film s'inspire ainsi de Efraín Ríos Montt. Après un coup d'état en 1982, il a été condamné en 2013 pour génocide et crimes contre l’humanité. Les villages mayas étaient brûlés, les hommes et enfants tués, les femmes violées. Le conflit a provoqué plus de 100 000 morts, les militaires auraient participé à 626 massacres, l'armée reconnaissant la destruction de 440 villages mayas entre 1981 et 1983, durant l'apogée des événements. Le général n'a pourtant dormi qu'une seule nuit en prison, le procès se voyant annulé par le classique "vice de procédure". Le bourreau s'est éteint chez lui, à 91 ans, paisiblement. 

Paisiblement... ce n'est pas ce qu'espère le cinéaste. Si les hommes n'ont pas rendu justice, ce sont les morts qui s'en chargent dans son film, en évoquant la légende de la llorona (pleureuse en espagnol). L'âme en peine d'une femme ayant perdu ses enfants, les cherchant dans la nuit près d'un cours d'eau, effrayant ceux qui entendent ses pleurs de douleur. 

Une fois que l'on a compris l'histoire du Guatemala et de la llorona, on devine les rebondissements et le film peut sembler longuet. D'autant plus que le côté fantastique joue sur des ressorts éculés (la femme aux longs cheveux noirs qui sort lentement de l'eau, déjà vue dans Dark water, The ring etc...).
Plus que le traitement fantastique, trop classique, c'est le récit historique et politique, mêlé au drame familial en huis-clos, qui rend le film original et intense : que se passe t-il dans la tête d'un tortionnaire, et dans celle de ses proches ? Il est intéressant que le général se retrouve entouré de femmes : son épouse, sa fille, sa petite-fille, sa domestique. Ses femmes l'admirent, voient en lui le sauveur de la nation. Il leur offrait tout ce qu'elles désiraient pour éviter qu'elles se posent des questions et se rebellent. Elles vivent retranchées dans un cocon doré sans connaître la réalité du sort des indigènes (ou plutôt refusant de la voir). Le procès leur fait ouvrir les yeux et se rebeller contre ce patriarche tout puissant.

Toute l'injustice du génocide, la douleur d'un pays, de ces femmes, se retrouve dans la chanson La llorona. C'est une chanson traditionnelle mexicaine dont il existe plusieurs versions, on peut l'entendre dans le (très bon) film d'animation Coco par exemple. Le film de Jayro Bustamante en propose une version dans son générique final qui réussit son coup : la pleureuse m'a émue. Au point que j'ai eu envie de connaître les paroles. Je ne les ai pas trouvées sur internet, j'ai alors eu l'idée saugrenue de les traduire... ça m'a pris 2 heures. Une traduction devrait être une punition comme au temps de l'école, mais les contresens possibles m'ont amusée ! J'ai traduit à l'oreille, j'ai sûrement fait des fautes, je n'ai pas pratiqué l'espagnol depuis le lycée... (une éternité donc).

llorona manif.jpgTodos lloraban tu tierra, llorona
Ils pleuraient tous ta terre, pleureuse
Tu tierra ensangrentada
Ta terre ensanglantée
Sollozos de un pueblo herido, llorona
sanglots d'un peuple blessé, pleureuse
Y de su voz silenciada
et de sa voix bâillonnée
No sé que tienen las flores
j'ignore ce qu'ont les fleurs
Las flores del camposanto
les fleurs du cimetière
Que cuando las mueven viento
car quand le vent souffle sur elles
Parece que estan llorando
elles semblent pleurer
Te escondias entre las milpas
tu te cachais dans les champs de maïs
Para no ser perseguida
pour ne pas être pourchassée
llorona general.jpgLas almas perdidas vagan
les âmes perdues errent
Y sus lamentos no se olvidan
et leurs lamentations ne s'oublient pas
Los ninos se vistieron de hojas
les enfants se sont vêtus de feuillage
Las ropas quedaron en trapos
une fois leurs vêtements devenus haillons
Un grito agonico sueltas (?)
tu pousses un cri d'agonie
Te quedan (??) en mil pedazos
ils te brisent en mille morceaux
La luz que alumbraba
la lumière qui brillait
Enteniebras te lejo
t'a laissée soudain dans les ténèbres
Arrebataron tus suenos
on t'a arraché tes rêves
Pero tu fuerza quedo
mais ta force est demeurée
Teniste por los cafetales
tu as surgi dans les champs de café
llorona famille.jpgDoliente clamando justicia
affligée et clamant justice
Las balas callaron sus llantos
les balles ont tu leurs sanglots
Desde sabes no eres la misma
depuis tu n'es plus la même
Lava tus penas
lave tes peines
Con agua bendita del rio
avec l'eau bénite de la rivière
Convierte tu angustia en calma 
transforme ton angoisse en sérénité
Y la madrugada en rocio
et l'aube en rosée

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