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30/04/2020

Les oiseaux, partie 3

masque 100 briques.jpgAprès la pharmacie, je me rends chez le docteur. Sur le trottoir d'en face, j'aperçois une des médecins très sympa qui rigole en pause avec les secrétaires. Contente de la voir (je vous rappelle que je n'ai vu personne en 5 semaines, donc mon docteure devient ma meilleure pote) je m'arrête et lui fais coucou de loin. Les 3 interrompent leurs rires pour plisser des yeux et me regarder d'un air qui signifie "mais qui c'est celle-là? " M'enfin, comment peut-elle ne pas reconnaître, moi qui suis pourtant inoubliable ?
J'ai oublié que je portais 32 couches de protections sur le visage et un bandana noir qui me recouvre jusqu'aux yeux comme une braqueuse de banque.
 
A l'accueil, la secrétaire discute avec une autre médecin. Décidément, c'est vrai, les cabinets médicaux sont désertés par crainte de choper le covid, je n'avais encore jamais vu les soignants prendre le temps de faire des pauses. En me voyant, la secrétaire me fait le geste de reculer. Je suis dans le couloir, je ne suis même pas rentrée dans le bureau. Si je recule encore, je tombe dans le pot de fleurs contre le mur. Je suppose qu'elle me demande de m'éloigner car sa conversation est privée, secret médical des hémorroïdes de M. Truc. Mais non, l'assistante me tance "périmètre de sécurité !"
Et le médecin, qui reçoit tous les matins les patients atteints du coronavirus comme me l'a dit la secrétaire au téléphone ? Elle ne porte pourtant pas de masque? Elle se tient penchée sur la secrétaire pour regarder l'ordinateur, à 30 centimètres ? La docteure est certainement plus à risque que moi qui ne côtoie personne depuis plus d'un mois...
La secrétaire me crie (vu qu'elle me maintient dans le couloir) "allez vous lavez les mains !". Sir yes sir, je m'exécute (pan) puis je me remets dans l'allée, face à une porte ouverte sur la cour intérieure. Et là, j'entends le chant d'une sirène. Emerveillée, je ne réfléchis pas, je me précipite dehors pour voir d'où provient cette douce mélodie. Je vois alors un arbre et un parterre de fleurs. Un arbre, des fleurs, je ne savais plus ce que c'était ! Avec ma fenêtre qui donne sur le trottoir gris, l'immeuble gris et le clodo gris.
Depuis son bureau j'entends la secrétaire beugler : "MAIS VOUS ETES OU ? VENEZ !"
Je reviens à contre-coeur, un sourire béat (qu'elle ne voit pas sous le masque) et j'explique :
"Nan mais j'ai entendu un...
Cerbère m'interrompt  : - Vous venez pour quoi ? Vous avez rendez-vous ?
- Oui, pour des vaccins
Elle se radoucit : - Ah oui c'est vous."
 
Le cabinet ne fait plus que des téléconsultations l'après-midi, elle me prenait peut-être pour une pestiférée du covid qui débarque sans prévenir pour lui tousser dessus.
Elle poursuit : " Installez-vous dans la salle d'attente, rez-de-chaussée juste à côté."
Mais le chant de la sirène est trop fort et je retourne dans la cour, le nez levé au ciel pour voir où se tient cet être divin qui enchante mes oreilles.
Moins de 5 minutes plus tard, je vois passer à grands pas mon médecin dans le couloir. Il regarde de droite à gauche, les bras levés dans un geste d'impuissance, le regard ébahi qui signifie : "Mais ? Où elle est ?!" En général il est en retard et lorsqu'il ouvre sa porte, le prochain patient bondit de sa chaise comme devant le messie "enfin ! il est revenu! c'est à moi !! guéris-moi seigneur, laisse moi entrer en premier dans ton royaume !" Alors en constatant que les fidèles avaient déserté son temple et qu'il était obligé d'aller à leur rencontre, le prophète a dû en perdre son vidal.
 
Sans même lui dire bonjour, je lui désigne ma découverte, illuminée par la grâce  : 
"Vous avez un merle dans votre cour !!
Au lieu de sauter de joie comme je l'escomptais (un oiseau qui chante ! Je ne connaissais plus que le chant des voitures, des perceuses et du clodo aviné!), le docteur penche la tête, un voile attristé devant les yeux. Je devine un sourire chagriné sous son masque, car il répond d'un air las :
blackbird.jpg- Oui. C'est dur le confinement..."
Démasquée. malgré mes 43 couches sur le nez.
 
Blackbird singing in the dead of night
Take these broken wings and learn to fly
All your life
You were only waiting for this moment to arise
 
à suivre
 

25/04/2020

Les oiseaux, partie 2

 
Réveille-toi !
Debout !
Tiens-toi droit !
On va leur montrer
Qu'on peut tout changer
 
Je sors donc de chez moi. Je me rends d'abord à la pharmacie chercher mes vaccins (pas contre le coronavirus malheureusement) Pour cela, je dois me faufiler entre les clients de la boucherie qui tiennent une file d'attente de 30 mètres pour aller bouffer du pangolin. Cette fois-ci, ils ont fait un effort : ils portent des masques, des vrais, ces précieux trésors introuvables. Mais ils les laissent autour du cou. Oui, ils les baissent pour pouvoir discuter entre eux...
Quant aux distances de sécurité, déjà, un mètre, je trouvais que c'était trop peu : lors de ma dernière sortie, le gamin qui m'a doublé en trottinette a échappé (jeté ?) son mouchoir, lequel avec le vent s'est immédiatement retrouvé 10 mètres plus loin. Alors avec les crachats de joggeurs, les gens qui toussent... La distance à maintenir à été remontée à 2 mètres minimum, et des médecins admettent que les postillons et éternuements peuvent se répandre à 5 mètres à la ronde.
 
J'ai bricolé un masque à ma façon. Certains prétendaient au début que c'était inutile, mais tous les hivers, je porte mon écharpe autour du nez dans le métro, et je suis rarement malade (enfin à part des maladies chroniques non contagieuses), pas même un rhume. J'ai donc imaginé une protection avec une superposition de filtre à café, de sopalin, de foulard puis de tour du cou. Au top de la mode pour la collection printemps-été 2020. 26 degrés, j'étouffe sous mes 4 couches de protection (et même 8 car les foulards sont pliés en deux). La prochaine fois, j'en rajoute une 9ème avec une serviette hygiénique. Je pars en mission commando suicide.
Il faudrait retrouver les oiseaux blessés
Ils sont bien quelque part, on peut les sauver
Vaut mieux tout recommencer, on peut pas se suicider
 
Parvenant tant bien que mal à me glisser entre deux pestiférés, je rentre dans la pharmacie. C'est la première fois en 5 semaines que je parle à quelqu'un de visu (si l'on excepte le simple "bonjour" avec les voisins devant les poubelles). Je suis si contente de tenir enfin une conversation (ah les médicaments, ma passion) que je me montre volubile. Sauf qu'avec mes 8 couches de protection sur la gueule, la pharmacienne ne comprend rien.
Moi : "fé  fou fé fan fi fote feu faq faufou fu cou
Pharmacienne : - Pardon?
 Plus fort : FE FOU FE FAN FI FOTE... 
La pharmacienne grimace et tend l'oreille. J'articule : - F'est fou ces gens qui fautent
Elle se rapproche encore. Rah et la distance de sécurité... Par réflexe d'agacement de ne pas me faire comprendre, j'écarte un peu ma super protection sans la baisser :
" C'est fou ces gens qui portent leurs masques autour du cou !"
- Oui ! C'est ce qu'on se dit tous ici en les voyant. C'est désolant. ça ne sert à rien... Puis en touchant leur protection, ils la contaminent."
 
Un ange passe. Me croyant jouer à 1,2,3 soleil, je m'immobilise comme lorsque le maître du jeu se retourne pour voir si on a bougé : car j'ai la main sur mon foulard. J'essaie de le redresser tant bien que mal car les 28 couches de protections se disloquent. Hum.
Respire! On va leur montrer
Respire! Qu'on peut tout changer
Respire ! Debout, souffle
Réveille-toi
 
Après la pharmacienne, je dois à présent affronter le médecin...
à suivre
 

20/04/2020

Les oiseaux, partie 1

coronavirus, confinement, chanson française, musiquePleure pas, crie pas
N'oublie pas que tu n'as plus vingt ans
Ne te laisse pas sortir
Ou tu vas mourir
Notre vie n'est pas foutue
Faut pas qu'on s'habitue
 
Deux pigeons roucoulent devant ma fenêtre ouverte à 1 mètre de moi. Ils ne respectent pas la "distance de sécurité" ni les "gestes barrières" ni la limite "d'une heure autorisée". Ils me narguent en marchant sur la margelle, faisant crisser leurs serres sur le zinc : "alors comme ça, on ne peut pas sortir ? Frustrant hein ?" 
Confinement J+ je sais plus combien. Et on n'a même pas subi la moitié. Parce que le 11 mai, j'y crois autant qu'à la marmotte qui met le chocolat dans le papier d'alu. En plus je fais partie des "personnes à risque" (contre toutes les apparences : pas parce que je suis une mémé) qui "vont devoir rester confinées plus longtemps". Pas près de revoir mes oiseaux ni les marmottes (et vérifier si c'est vrai pour le papier d'alu). (J'ai un doute, elles sont capables de tout ces petites bestioles).
 
J'ai eu une bonne excuse pour sortir : me faire soigner, car les médecins s'alarmaient que "la situation est aussi dramatique pour les malades chroniques que l'on a perdus, ils n'osent plus venir nous voir."
coronavirus, confinement, chanson française, musiqueRéveille-toi
Debout, tiens-toi droit!
On va leur montrer
Qu'on peut tout changer
Je sais bien que les oiseaux perdus
Ne reviendront jamais
 
Alors je me suis résolue à me rendre chez le docteur, qui m'a sorti son sempiternel "mais pourquoi vous avez attendu !" Déjà parce qu'à chaque fois je pense "nan c'est rien, ça va passer, oublie que t'as aucune chance, on sait jamais sur un malentendu ça peut marcher". Puis en ce moment, la "petite grippette" ne m'encourage pas à sortir. Et pour des piqûres, encore moins. La dernière fois ya deux mois, après 5 jours d'empalements par des perfusions grosses comme le pipeau du déconfinement prochain, mes veines ne pouvaient tellement plus supporter que les infirmières ont dû s'y prendre à 3 pour me piquer 7 fois : "désolées pour le massacre" à la tronçonneuse. Mes bras ont ressemblé pendant 3 semaines à ceux d'une toxico du canal saint martin. J'aurais bien tenté les piqûres par téléconsultation sinon, je suis sûre que mon médecin a un petit côté marabout. Il pourrait sinon me lancer la seringue de loin comme l'infirmière le fait à De funès dans L'aile ou la cuisse (voir en lien) mais mon docteur n'est pas aussi sadique.
Mais arrête de dire dans ton lit
Que tu vas faire tout sauter
Toussoter 
 
Je téléphone d'abord pour savoir comment on procède, car je n'ai pas spécialement envie de me retrouver dans une salle d'attente bondée alors que je slalome déjà entre les joggeurs et crachats dès que je sors de chez moi.
Secrétaire :
- Oui vous pouvez venir cet après-midi, il est réservé aux patients atteints du covid.
- Mais je l'ai pas moi ! Et je suis à risque en + ! 
- Ah non pardon, je voulais dire que le covid, c'est le matin, l'après midi, c'est les téléconsultations.
- Il va me vacciner par téléphone ? (un marabout, j'en étais sûre !)
- Non (ah flûte) mais vous pouvez venir, la salle d'attente sera vide."
Allons viens et calme-toi
Parle-nous, ouvre-toi
 
Je sors donc de chez moi...
à suivre...

18/04/2020

Christophe a retrouvé les paradis perdus

christophe 2.jpgDans ma veste de soie rose
Je déambule morose

Parce que Christophe est mort. En réalité j'erre dans l'appart en peignoir jaune. Le vent d'hiver souffle en avril, Christophe n'est plus. Le courant t'emporte, j'ai beau te serrer fort, notre amour fou se meurt.

Peut-être un beau jour voudras-tu
Retrouver avec moi
Les paradis perdus

Oui je voudrais bien. Pour que demain ta vie soit moins moche sans Christophe, j'écoute ses albums en boucle. Mal comme, oh oui mal comme, de disparaître des hommes.

Dans ce luxe qui s'effondre
Te souviens-tu quand je chantais
Dans les caves de Londres
Un peu noyé dans la fumée
Ce rock sophistiqué

Oui je me souviens bien. Un concert à l'ambiance envoûtante, feutrée, intimiste, aux lumières rouges. Comme dans un bar clandestin en sous-sol. A l'image du beau bizarre. Dans ce dancing sans danseur, sous la boule ronde, parfums, lumières et couleurs qui se répondent.

Bandit un peu maudit, un peu vieilli,
Les musiciens sont ridés

Non tu n'étais pas démodé. Tu t'adaptais à ton époque, à tous les styles. Costume yéyé dans les années 60, rebelle épris de liberté précurseur de mai 68 avec Excusez-moi le professeur, ambiance psychédélique dans les années 70 avec Les paradis perdus, electro en 2016 avec Tangerine, jusqu'au remix trop moderne pour mémé de Succès fou en 2019, avec des rappeurs en auto tune qui rappellent PNL. "Fallait oser le faire".

Ce clavier que c'est joli
J'essaie de me rappeler

Mes chansons préférées. Evidemment, ces tubes qui ont bercé ma jeunesse, véritable patrimoine national que l'on connait tous :  la romantique Aline :
Et j'ai pleuré, pleuré
Oh! J'avais trop de peine
Mais dans cet orage, il a disparu

Je lui dirai les mots bleus
Les mots qu'on dit avec les yeux
Parler me semble ridicule
Je m'élance et puis je recule
Devant une phrase inutile
Qui briserait l'instant fragile
D'un hommage
Et tous les longs discours futiles
Terniraient quelque peu le style
De ses funérailles.

Une chanson que j'affectionne particulièrement, mélancolique et onirique comme toujours, sonne comme une oraison funèbre :

Je regarde le ciel
Les mains tendues vers toi
Mon Dieu, si elle T'appelle
Parle-lui de moi
 
Voilà, c'est fait.

 

 

15/04/2020

Fun home

fun home.jpgNon ce n'est pas un article sur mon confinement dans un trou de 20 mètres carrés, mais presque : une histoire vraie se déroulant dans un funérarium.
J'ai évoqué Alison Bechdel dans mon article sur Tout peut changer, le documentaire sur la place des femmes dans le cinéma. L'autrice a élaboré un test pour mesurer le sexisme dans les films
- Il doit y avoir au moins deux femmes nommées (nom/prénom) dans l’œuvre
- qui discutent ensemble
- et qui parlent de quelque chose qui est sans rapport avec un homme.
Le verdict est sans appel : environ 60 % des films échouent au test.

Mais ce n'est pas à travers son attachement à la cause féministe que j'ai connu Alison Bechdel, mais tout simplement parce qu'elle écrit des bd biographiques, et comme je suis férue du genre, j'en ai lu deux pour le moment.
J'ai beaucoup apprécié sa plus connue, Fun home. Titre ironique, car l'auteure a passé son enfance dans un funérarium, où son père, un être peu aimant et psychorigide, exerçait. Forcément le lieu et le thème, mêlant humour macabre et mélancolie, m'évoquent Six feet under, la géniale série d'Alan Ball (American beauty).
Alison suppose que son père s'est suicidé car il n'assumait pas sa bisexualité. Très fun donc. 

alison bechdel.jpgAprès son père, l'autrice décortique cette fois-ci ses relations avec sa mère, dans le roman graphique C'est toi ma maman ?
Non ce n'est pas pour les enfants de 3 ans. Élu à l'unanimité de moi-même grand vainqueur dans la catégorie "titre le plus niais". J'ai moins apprécié ce livre. L'auteure emploie un jargon psy intello parfois plombant. Elle relate sans tendresse ses rapports avec sa mère, mais aussi avec ses différentes petites amies, son homosexualité, et sa psy. Elle prend bien soin de répéter trois fois que son analyste lui confie qu'elle la trouve "adorable" : "je vous aime beaucoup". Un contre-transfert fréquent mais qui pourrait flinguer la carrière de la psy et que la patiente aurait pu taire, par respect pour cette personne qu'elle admire tellement, et dont elle tombe amoureuse. Comme tous les 4 matins à priori : elle change de partenaires comme de chemises, en ayant plusieurs à la fois, ne sachant pas ce qu'elle veut, ni ce qu'elle ressent.
Une fille très compliquée que j'ai du mal à apprécier pleinement. Ses confidences très poussées me mettent parfois mal à l'aise. Elle se plaint beaucoup de ses parents, mais je trouve sa mère plutôt cool de ne pas s'offusquer de voir le linge sale familial étalé en place publique. Faites des gosses, ils vous le rendront au centuple.
Moralité : mieux vaut adopter un chat, il n'ira pas raconter dans une bd que vous ne lui avez pas donné assez de croquettes. Et il héritera de votre fortune, comme Poupette avec Lagerfeld.

13/04/2020

Le lundi au soleil, c'est une chose qu'on n'aura jamais

28 jours affiche.jpgChaque fois c'est pareil
C'est quand on est derrière les carreaux
Qu'on est confinés que le ciel est beau
Qu'il doit faire beau sur les routes
 
Ca y est, on y est. 28 jours plus tard, comme dans le film. Les gens se transforment en zombies agressifs. Les insultes fusent en bas de chez moi :
" Vous prenez toute la place madame !
- Va te faire tringler !"
Ou encore : "ça va 6 paquets de farine, ça vous suffit peut-être ?!"
J'imagine le carnage à la American nightmare après ce soir, quand Macron annoncera la prolongation du confinement. Vous pariez sur quoi ? Mi-mai, début juin, et plus si affinités ?
 
marmotte.jpgA part la réclusion forcée avec des voisins que je méprise, le confinement ne change pas grand chose à mon quotidien au final. Avant je me lavais déjà les mains 20 fois par jour (obligée, l'estomac sur pattes mange beaucoup). Je ne fais pas la bise (je trouve cette manie dégueulasse) ni ne serre la main, évite la foule, en sortant peu le week-end et en prenant le métro à peine une fois par mois (je préfère marcher). J'enlève mes chaussures en rentrant chez moi, enfile une tenue uniquement pour la maison, ôte les emballages des aliments avant de les mettre dans le frigo. Je fais mes courses une fois toutes les 6 semaines (je déteste faire les magasins) Je cuisine moi-même, n'achète pas de pain en boulangerie. Je fais déjà du sport, yoga et relaxation quotidiennement et je sors peu voir des gens (en tout cas presque jamais hors du quartier à + de 2 km de chez moi accessible à pied).
Donc quand je lis les conseils pour survivre au confinement, j'ai plutôt l'impression de lire mes habitudes de vie : "Ah y en a qui ne se lavaient pas les mains avant ? Qui supportent pas d'être seuls face à eux-mêmes ?"
 
Pour mon planning quotidien, j'ai juste remplacé le travail par l'écriture et ça me convient très bien. Je suis ravie de ne plus bosser ni de voir les têtes de cons du boulot. Mais c'est le défoulement physique que le taf me procurait (beaucoup de marche, de montées d'escaliers) qui me manque, et plus que tout, ma promenade quotidienne au parc. Je les remplace par une heure de sport en +, mais même 2 à 3h par jour n'équivaut pas à  l'effort physique de la marche rapide, car je ne transpire pas en faisant des abdos. Le sport face à une fenêtre avec vue sur un immeuble hideux et les gamins qui braillent ne remplace par une promenade au milieu des mésanges qui gazouillent et des rosiers qui commencent à fleurir.
 
Je suis tellement sevrée de verdure que je rêve régulièrement, tous les hivers, que je marche en montagne. Si je ne peux pas aller cet été dans les Alpes voir mes marmottes parce que l'épidémie perdure à cause du confinement non respecté, au lieu d'observer les joggeurs depuis ma fenêtre, je vous préviens, je vais faire du tir aux pigeons dessus. Je ne pars pas en vacances sur les plages crades et bondées de la Méditerranée (quelle horreur) mais dans les alpages où je ne croise personne en 4 heures de balade (je me promène entre 15 et 19 heures quand les rares randonneurs rentrent et donc que les animaux sortent). Je ne vais pas contaminer les marmottes et les bouquetins à 20 mètres de distance.
 
alpes.jpgDis, ça fait combien de temps
Que tu n'as pas vu un peuplier, une fleur des champs?
Si tu as quelques chagrins
Pour les oublier il y a toujours une gare, un train
Change de ciel, viens voir la terre
Voir le soleil et les rivières
Viens à la maison y a le printemps qui chante
 
 
 

11/04/2020

Viens à la maison y a le printemps qui chante

buffet froid.jpgEt vu qu'il fait 26 degrés on peut même directement passer à : 
Voilà l'été j'aperçois le soleil
Les nuages filent et le ciel s'éclaircit
Et dans ma tête qui bourdonnent ? Les abeilles
J'entends rugir... la perceuse du voisin 
 
Normalement quand les beaux jours arrivent, je vais me promener quotidiennement au parc voir les canetons et je leur donne à chacun un petit nom (Poupou, Poupinou, Poupinounet). Avec le confinement, on nous a promis le silence dans Paris, le retour des oiseaux, des renards, des dinosaures. J'ai entendu une timide mésange charbonnière  "tiens, les cons sont partis, et si je tentais une sortie ?" mais elle a été immédiatement interrompue par le doux chant d'une perceuse. J'ai tenté de l'amadouer en mettant sur youtube "chants d'oiseaux de nos jardins" en me disant que ça servirait comme appeau, qu'elle viendrait sur ma fenêtre, que je lui donnerai des graines, qu'on deviendrait copines etc, mais peine perdue. Je n'ai plus qu'à apprivoiser le clodo qui gueule en bas de chez moi en lui lançant des canettes de bière.
 
La voisine qui refusait jusque-là de marcher et de faire du sport, habitant à côté d'un parc depuis 10 ans sans y avoir jamais mis les pieds (!!), se découvre soudainement une passion pour la corde à sauter. Le sol et les murs tremblent. Entre l'éléphant et la perceuse, l'immeuble va bientôt s'écrouler.
Le voisin s'est mis à la guitare aussi. Heureusement il a bon goût, en jouant Beatles et Rolling Stones, mais comme il apprend, il répète inlassablement les mêmes (fausses) notes. J'adore les Gymnopédies d'Erik Satie, mais version orchestre de professionnels, pas musique de chambre de débutant confiné. 
 
buffet blier.jpgAprès Jack Nicholson défonçant la porte de la voisine à coups de hache, j'envisage le remake de Buffet froid :
" Qu'est-ce que tu fous dans cette tour ?
- Mais je suis locataire !
- Eh ben tu vas déménager. Cette tour est malsaine. Des meurtres ont été commis, ça suffit comme ça je ne veux pas d'un nouveau criminel comme voisin.
- Mais j'ai jamais tué personne moi ! Je suis un artiste, je suis musicien ! Je suis 3ème violon à l'opéra.
- Qu'est-ce que t'as dit ? Mettez-lui les menottes. Y aura pas de violoniste dans cette tour. C'est une tour interdite aux musiciens, sans gamme et sans arpège ! On ne veut pas devenir dingues avec ton archet qui va grincer 4 heures par jour ! Ca me scie les nerfs moi, je suis allergique ! T'as connu une dénommée Jacqueline Pradel ?
- Oui, une grande artiste !
- Très grande. C'était ma femme. Elle passait son temps à faire des gammes. Le soir je rentrais du boulot vanné et elle m'accueillait avec des gammes, toujours des gammes ! Pas moyen de se reposer 5 minutes ! Alors un jour j'ai branché son violon sur le 220.
- Elle est pas morte dans son bain ?
- Bien sûr que non. Son bain je l'ai fait couler après..."
Spéciale dédicace pour les voisins.
 
Pire que la guitare, la corde à sauter et la foldingo qui développe des tocs en passant l'aspirateur 3 fois par jour et vérifiant si sa porte est bien fermée alors qu'elle est pas sortie depuis un mois, une voisine écoute de la musique pourrie avec des gonzesses qui hurlent à la mort comme si on les égorgeait. Je ne supporte pas ce genre de "chanteuses à voix" qui chouinent et hululent. Ca m'horripile, mais vraiment. Tous mes muscles se tendent, j'ai envie de frapper quelqu'un et si la gonzesse beugle trop longtemps, le désespoir m'envahit. A Guantanamo on faisait craquer les prisonniers en leur mettant du Britney Spears en boucle, mettez moi du Céline Fion et j'avoue tout au bout de deux chansons pour arrêter la torture. Alors à défaut de pouvoir comme Blier brancher la voisine sur le 220, je mets de la musique à l'extrême opposé, très joyeuse, très dynamique et brute de décoffrage : du punk rock celtique (Flogging Molly et Dropkick Murphys je les ai vus plusieurs fois en concert, ça déménage) en boxant contre un vieux coussin. Si j'avais une imprimante, j'aurais scotché la photo des voisins dessus pour plus de réalisme.
à suivre...
 
 

08/04/2020

Le quiz du confinement, les résultats

gaffophone 4.jpg1) Associer ces chansons à leurs interprètes :
b) Quand j'étais chanteur
c) Le pauv' guitariste
d) Joueurs de blues

A) Michel Delpech
B) Michel Polnareff
C) Michel Berger
D) Michel Jonasz
E) Michel Sardou
F) Michel fils de Jacques
G) Brigitte Fossey qui cherche Michel dans Jeux interdits
H) Oui ya des pièges
Réponse en musique sur les liens.
 
2) Associez ces films et les chanteurs qui y ont participé :
quiz, quiz culture généralea) L'emmerdeur
b) Dancer in the dark
c) Furyo
d) A star is born
 
A) David Bowie
B) Lady gaga
C) Jacques Brel
D) Bjork
E) Papillote, à la fois emmerdeuse, danseuse, prisonnière de guerre dans son travail et star des blogs.
Réponse en vidéo sur les liens.
 
3) De quelle fable de La Fontaine est tirée cette morale ?
Patience et longueur de temps
Font plus que force ni que rage.
a) La cigale et la fourmi
b) Le lion et le rat
c) Le loup et l'agneau
d) Papillote le chat et ses collègues bouledogues
Réponse : b) 
 
4) D'où vient le terme "impressionniste" ?
a) D'une typographie utilisant des caractères d'imprimerie légèrement flous
b) D'un critique d'art qui s'est moqué d'une toile de Claude Monet 
c) De Papillote, qui impressionne par ses multiples talents
Réponse : b)
 
5) Quels sont ces courants artistiques, en particulier dans le domaine de l'architecture : 
- L'un est l'art de "la belle époque", entre la fin du 19è siècle et le début de la première guerre mondiale. Il s'inspire de la nature, des courbes des fleurs. Emile Gallé, Klimt, ou la Sagrada familia de Gaudi représentent cet art.
- L'autre est au contraire un retour à l'ordre après 1915, à l'épure, la géométrie et la symétrie. L'empire stade building à New-York ou le grand Rex à Paris sont des exemples de cet art.
Il s'agit :
a) du futurisme et de l'expressionnisme
b) de l'art nouveau et l'art déco
c) du romantisme et du futurisme
d) Papillote quand elle dessine des mandalas en grève devant Columbo, et Papillote qui remplit un tableau excel au travail.
Réponse : b)
 
Nouveau quiz à suivre dans la semaine !
 

06/04/2020

Est-ce que tu viens pour les vacances ?

fugitifs famille.jpg"Est-ce que tu viens pour les vacances ?
Moi je n'ai pas changé d'adresse
je serai je pense
toujours en confinement".

Vu que les gens ne peuvent pas s'empêcher de sortir dès qu'il fait beau temps.
En lien, Les fugitifs, les Parisiens en exode qui doivent inventer un motif de départ aux contrôles de police.
Il paraît que les vacances scolaires ont débuté (je ne sais même plus quel jour on est, comment pourrais-je connaître ce genre de détails ?) Je l'ai surtout compris en observant depuis ma fenêtre les familles remplir leurs voitures de valises et de PQ, ce nouveau trésor. Exactement comme au début du confinement donc, alors qu'ensuite on a blâmé le million (oui million !) de Franciliens ayant fui Paris pour aller contaminer des régions indemnes et déserts médicaux (ma mère qui a 80 balais habite à 40 km du premier hôpital). 

Pensant "recadrer" les récalcitrants, le gouvernement a annoncé que les sorties étaient limitées à "1 km autour du domicile, une heure par jour, pour un jogging par exemple". Ce qui a provoqué l'effet inverse : comme beaucoup j'étais persuadée qu'on avait le droit de s'évader que deux fois par semaine, 20/30 minutes maximum, à 500 mètres de chez soi. Les gens incapables de s'autolimiter se sont donc cru autorisés à sortir encore plus qu'avant, et obligés de se mettre à la course. J'ai donc vu un couple de vieux de 70 ans bien tassés qui tenaient à peine debout sur leurs frêles jambes, en train de courir. C'est malin, comme ça en plus de choper le covid, ils vont faire une crise cardiaque, le combo gagnant. Pourquoi Edouard Philippe n'a-t'il pas suivi mon idée judicieuse de "danse des canards qui secouent le bas des reins ?" c'est une activité physique moins périlleuse, plus originale et plus drôle !
 
serpillière 2.jpgMoi aussi, ce beau temps m'a inspiré une sortie. Oui, moi aussi, je suis une rebelle. Je brave l'interdit, l'autorité. Fuck les autres, fuck le danger, j'ai peur de rien. Oui je suis sortie. J'ai ouvert ma porte, descendu 10 marches d'escalier et j'ai sorti ma poubelle. 48 pas en tout. Après cette marche commando, j'ai mangé du chocolat pour me remettre et reprendre des forces.
Pendant cette randonnée d'environ 1 minute 20, j'ai réussi à croiser deux voisins, vu qu'ils sortent tous dès le moindre rayon de soleil. Evidemment je n'avais pas prévu le coup et je portais un haut de pyjama avec un nounours qui demande "confiture ou lait ?" -les magnifiques cadeaux de ma mère qui croit que j'ai toujours 4 ans-. Pourtant la même mésaventure m'était déjà arrivée il y a dix ans, ça ne m'a pas servi de leçon, relire ici : "il me manquait quelque chose pour descendre les poubelles" (billet qui avait remporté un franc succès, je ne suis donc pas la seule fashion victim). Eh bien figurez-vous que de simplement dire "bonjour!" à des gens, j'ai réalisé que c'était la première fois en 3 semaines qu'on me regardait ! Le vendeur de la supérette en bas de chez moi où je vais renouveler tous les 10 jours mon stock "d'achats de première nécessité" (chocolat, fromage, choux de bruxelles) reste le nez sur sa caisse, insensible au charme pourtant irrésistible de mes trois foulards pliés comme je peux sur le visage, vu qu'on habite un pays du tiers monde incapable de produire des masques. 

Here's_Johnny.jpgSi je ne vois pas les voisins, je les entends. Avec le confinement, certains ont développé des tocs : ils passent l'aspirateur trois fois par jour, ou vérifient compulsivement tous les soirs si leur porte d'entrée est bien fermée à clé alors qu'ils ne sont pas sortis depuis 3 semaines. Pour leur donner une bonne raison de flipper, on pourra faire un petit remake de "Here's Johnny !" Jack Nicholson qui défonce la porte à coups de hache. Malheureusement si tous les Parisiens sont de sortie aujourd'hui ou fuient Paris, mes voisins ont décidé de rester.

04/04/2020

Maus, une biographie fascinante

Maus 2.jpgL’auteur, Art Spiegelman, raconte la vie de son père, rescapé des camps de concentration. C'est absolument fascinant. Il en ressort que ceux qui s'en sont sortis parmi l'entourage du père sont souvent les plus débrouillards, mais aussi les plus riches, qui pouvaient monnayer des vivres et passe-droit; ainsi que les moins scrupuleux, qui n'ont pas hésité à dénoncer ou voler les autres pour survivre (les kapos). Le manque de solidarité parmi les persécutés qu'il a croisés est frappant et illustre la phrase "la fin justifie les moyens". J'ai été particulièrement choquée par le cousin qui accepte les diamants des grands-parents en échange de leur liberté, mais les trahit et les envoie quand même, des membres de sa famille en plus, vers une mort certaine. 

Le roman graphique est surtout connu pour son témoignage sidérant sur les camps de concentration, mais autant que la vie de juifs traqués pendant la guerre, dont j'ai vu énormément de témoignages dans les innombrables documentaires consacrés au sujet, j'ai aussi retenu de cette biographie la personnalité ambiguë et manipulatrice du père. Ce dernier a épuisé toutes les femmes de sa vie (qui ne sont pas en moi réunies) (ma culture est phénoménale). Sa première petite amie était folle de lui, prête à tout pour lui, mais il s'en fichait royalement. Il l'a jetée du jour au lendemain, après 4 ans de bons et loyaux services, pour la remplacer par une femme qu'il venait de rencontrer, encore plus utile pour lui : issue d'une famille de commerçants très riches, elle a pu lancer sa carrière. Cette deuxième femme, la mère de l'écrivain, a fini par se suicider. Elle avait également écrit ses souvenirs de guerre, mais le père a osé jeter ce témoignage inestimable ! Sa dernière épouse, qu'il considére comme une bonne à tout faire et son souffre-douleur, finit par se barrer avant de finir elle aussi suicidaire, complètement timbrée et essorée par ce vampire.

Avec ses troubles psychiques, le père témoigne des ravages des traumatismes de guerre, de la faim et de la persécution. Toute sa vie, il reste dur, obsessionnel, paranoïaque, atrocement radin (si jamais une autre famine devait survenir). Il domine, contrôle et manipule son entourage (dans l'illusion de contrôler sa propre vie). Il a souffert, les autres doivent souffrir aussi. Comme Marthe Villalonga qui tyrannise Guy Bedos dans Nous irons tous au paradis, le père fait croire qu'il est au seuil de la mort pour que son fils, terriblement inquiet, lui rende visite ! Le père aime rabaisser sa famille, en jetant par exemple le manteau de son rejeton sans le prévenir, pour le remplacer par une blouse d'ado ridicule, alors que le fils est déjà adulte, etc. Le livre fourmille d'exemples de la personnalité perverse du père.
Un livre essentiel sur la guerre et les traumas qu'elle engendre. A lire absolument.