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16/07/2020

Ennio Morricone, mes musiques préférées

morricone best of.jpgOn retient surtout qu'Ennio Morricone a collaboré avec Sergio Leone. Sur le net, on tombe toujours sur les mêmes chansons, comme s'il n'en n'avait composé qu'une douzaine, alors qu'il en a écrit presque 500.
On pense aussi qu'il s'est spécialisé en westerns et mélodies tristes, comme Chi mai ou Here's to you, (voir dans mes billets précédents), mais Morricone a aussi composé pour des comédies, comme... La cage aux folles ! (à écouter en lien).

Je n'ai pas lu les hommages, mais je suppose que les médias ont cité les musiques les plus connues, alors je vous faire découvrir mes préférées, qui restent moins populaires :
A commencer par la bande originale du Retour de Ringo, western spaghetti de 1965. J'apprécie particulièrement ce passage musical qui pour moi est un pur moment de grâce.

Morricone a composé la musique des Dario argento, le maître avec Mario Bava des gialli, ces films italiens qui mêlent horreur, érotisme et grand guignol. Ma préférée reste celle pour le chat à 9 queues, jolie musique à écouter ici, et comme souvent, mélancolique (avec une femme qui hulule à la mort).

Moissons_du_ciel.jpgAutre genre, autre mélodie que j'affectionne particulièrement, celle des Moissons du ciel, drame magnifique de Terrence Mallick.

La carrière du compositeur est donc assez éclectique. Il a collaboré avec des réalisateurs italiens (Pasolini, Fellini, français (Lautner, Molinaro, Boisset) , puis quand la gloire est venue, américains (De palma, Tarantino, Carpenter...) Il aimait mêler musique classique (violons) moderne (guitares électriques) et instruments inhabituels (la guimbarde, au son comique et distordant (le "doing" étrange) Il s'inspire même parfois de cris d'animaux. Dans Le bon, la brute et le truand, le thème musical de ce dernier personnage s'inspire du... cri du coyote !

Il maestro a principalement composé pour des thrillers et films policiers. Une chanson témoigne comme il savait manier à merveille la musique pour créer le suspense : enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon.
Autre exemple parfait, qui me terrifiait quand j'étais enfant, la musique de Peur sur la ville d'Henri Verneuil. Rien que de réécouter les premières notes angoissantes à souhait, j'ai envie de retourner me cacher derrière le canapé comme je le faisais à l'époque.

La musique du Clan des siciliens, plus connue, est aussi admirable. Dans le documentaire Morricone, il était une fois en France, on apprend qu'il maestro avait proposé à Verneuil 5 compositions, mais le réalisateur hésitait entre deux (l'air à la flûte, et celui au clavecin/guitare). Pas de problème : le musicien a tout simplement mélangé les deux mélodies, en y mêlant l'inévitable guimbarde, pour créer cette chanson inoubliable.
Autre collaboration fructueuse avec Henri Verneuil, la musique du casse.

Le compositeur voulait tellement que la musique colle aux images, que pour Le ruffian de José Giovanni, il a tenu à la composer avant le film, pour que les doigts de l'acteur posés sur la flûte correspondent à la mélodie. Le réalisateur a eu beau modérer "mais une seule personne va s'en rendre compte dans la salle !" celui qui voulait qu'on le nomme "le maître" est resté sur ses positions : "c'est une de trop !" Lors d'un déjeuner dans un restaurant pour lui parler du film, le cinéaste a simplement décrit son scénario, ce qu'il souhaitait comme musique et émotions engendrées, et  Morricone prenait des notes sur la nappe en papier. A la fin du repas, le compositeur a déchiré le bout de nappe, l'a tendu à son assistant et expliqué "voilà, c'est la musique du film". Rapide et prolifique, mais néanmoins ultra perfectionniste.

Perfectionnisme poussé à l'extrême lors de ses collaborations avec Sergio Leone. La musique était aussi composée avant le film, et carrément diffusée lors du tournage, sur des amplis géants qui résonnaient en plein désert. Ainsi, les personnages pouvaient se mouvoir en rythme sur la mélodie. Un accord parfait entre le réalisateur et le compositeur, qui avait pourtant bien mal commencé. Lorsqu'on lui a proposé d'embaucher Morricone, Leone l'estimait carrément "nul" ! Puis la confiance s'est installée, au point que la musique guide les images et les acteurs. Les deux comparses se connaissaient depuis l'école primaire, une photo de classe émouvante exposée à la cinémathèque l'attestait. (j'ai aussi adoré voir les maquettes et costumes des films, dont le fameux poncho d'Eastwood !)

Quelques compositions d'Ennio Morricone :

retour ringo.jpg- Le retour de Ringo de Duccio Tessari, 1965
- Here's to you, Sacco et Vanzetti de Giuliano Montaldo, 1971
- Les moissons du ciel de Terrence Malick, 1978

- Le chat a 9 queues de Dario Argento, 1971
- Le clan des siciliens d'Henri Verneuil, 1969
- Le casse d'Henri Verneuil, 1971

- Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon, Elio Petri, 1970
- Chi mai, le professionnel, de Georges Lautner, 1981

- Il était une fois dans l'ouest, Sergio Leone, 1968
l'adieu à Cheyenne
- L'homme à l'harmonica

ectasy of gold.jpg- Il était une fois en Amérique, thème de Déborah, Sergio Leone, 1984

Le bon, la brute et le truand, Sergio Leone, 1966
- ecstasy of gold
- Le duel à 3

- The thing de John Carpenter, 1982
- Les incorruptibles de Brian de Palma, 1987
- U turn d'Oliver Stone, 1997
- Mission de Roland Joffé, 1986
- Cinéma paradiso de Giuseppe Tornatore, 1989

- Mon nom est personne, Sergio Leone et Tonino Valerii, 1973
- Lolita d'Adrian Lyne, 1997
- Les 8 salopards  de Quentin Tarantino, 2015

 

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14/07/2020

Ennio Morricone, here's to you

sacco et vanzetti.jpgTout comme Chi mai (voir billet précédent) Here's to you m'a considérablement marquée enfant, car elle est l'un des premiers témoignages d'injustice que j'ai découvert (tuer le personnage de Bébel dans Le professionnel était aussi un traumatisme, mais ça, c'était une fiction, Here's to you parlait de la réalité).

La maîtresse de musique de l'école nous l'avait traduite et le contexte de la chanson m'avait révoltée. Elle fait référence à l'affaire Sacco et Vanzetti, injustement condamnés à mort en 1920 et réhabilités 50 ans plus tard, et qui sont devenus des martyrs et symboles de la lutte pour la liberté.
Trop timide pour chanter en groupe (et si jamais on m'entendait ? horreur !) Je la serinais en boucle seule sur la balançoire de mon jardin (ce qui est paradoxal car là, tout le quartier m'entendait, mais on va dire que c'est l'élan de la balançoire qui me donnait de l'entrain). Je la chantais corps et âme, pendant des heures, comme si je pouvais encore sauver les deux hommes, ou du moins leur rendre hommage.

La célèbre Here's to you doit ses paroles à Joan Baez, mais c'est Morricone qui a composé la musique pour le film. Aujourd'hui encore, la chanson me fait toujours vibrer et reste pour moi un synonyme de rébellion et passion.

Les paroles sont inspirées des propos de Bartolomeo Vanzetti à son procès :
« Si cette chose n'était pas arrivée, j'aurais passé toute ma vie à parler au coin des rues à des hommes méprisants. J'aurais pu mourir inconnu, ignoré : un raté. Ceci est notre carrière et notre triomphe. Jamais, dans toute notre vie, nous n'aurions pu espérer faire pour la tolérance, pour la justice, pour la compréhension mutuelle des hommes, ce que nous faisons aujourd’hui par hasard. Nos paroles, nos vies, nos souffrances ne sont rien. Mais qu’on nous prenne nos vies, vies d'un bon cordonnier et d'un pauvre vendeur de poissons, c'est cela qui est tout ! Ce dernier moment est le nôtre. Cette agonie est notre triomphe. »

Here's to you, Nicola and Bart,
Rest forever here in our hearts,
The last and final moment is yours,
That agony is your triumph.

Ennio, toi aussi, tu resteras à jamais dans nos cœurs !

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11/07/2020

Ennio Morricone, Chi mai

ennio morricone.jpgJ'ai passé le week-end dernier à écouter des musiques d'Ennio Morricone, puis j'ai pensé : "il a quel âge maintenant ? Faudrait pas que ce soit le prochain". Vlan, il meurt quelques heures après, à 91 ans. 
Du coup, je vais éviter de mettre du Vladimir Cosma. (80 ans) Déjà en apprenant l'hospitalisation de Christophe, passer ses chansons en boucle ne lui a pas réussi... A la place, je vais peut-être me forcer à écouter l'heure des pas praud ou les petits cerveaux

J'ai vu Il maestro en concert à Bercy en 2014. J'étais proche de la scène, mais sur le côté, ce qui fait que je ne voyais pas l'écran avec les titres de films et qu'on a dû faire un blind test sans réponse :
"c'est quoi ça ? Le bon la brute et le truand ?
-non, je penche plutôt pour Quelques dollars de plus !"
Il jouait ses chansons les + célèbres, mais sur 500 compositions, difficile de se retrouver.

chi mai.jpgMon premier souvenir d'Ennio Morricone est la musique du Professionnel de Georges Lautner (Les tontons flingueurs). Film populaire typique avec Bébel, qui passait les dimanches soirs sur TF1 et me permettait d'oublier que le lendemain, l'école reprenait. J'avais l'habitude de voir l'acteur en casse-cou qui gagne tout, puis là, cette fin inattendue. Notre héros national se fait buter lâchement par derrière, juste avant de prendre sa liberté, l'hélico qui l'emportera au loin vers sa belle. Il s'effondre au ralenti en grimacant, sur l'air tristissime à souhait de Chi Mai.  (voir la scène en lien). Ils ont osé tué bebel. J'ai eu du mal à m'endormir ce soir-là.

Eh bien figurez-vous que cette fin n'était pas prévue ! Comme l'explique le réalisateur dans le documentaire "Maestro morricone, il était une fois en France", il devait sortir une "pantalonnade habituelle de Belmondo", qui triomphe au dénouement, mais Lautner a tourné trois fins : une où Bébel monte dans l'hélico, une où il meurt, et une 3ème où il en rajoute une couche avec Chi mai pour traumatiser toute la nation pour 4 générations. La musique a fait un tel effet que le cinéaste a décidé de garder cette version, au grand désespoir de son producteur qui pensait que tuer l'acteur fétiche des Français serait un fiasco. Un choc oui, mais pas un fiasco.

royal canin.jpgTraumatisme de Chi mai qui s'est renouvelé quelques années après, quand elle a été utilisée pour la pub Royal canin. Je ne comprends pas le publicitaire qui s'est dit : "Tiens, je vais mettre une musique super triste, ça va être vendeur. Puis je vais effrayer les enfants, ça va être marrant." Dans cette pub ici en lien, on voit un homme appeler son chien, puis l'animal courir sur les notes désespérantes de Chi mai. On ne voit pas le chien rejoindre son maître. Enfant, à cause de la mélodie déprimante, j'étais persuadée que le pauvre toutou était perdu et dès que la pub passait, je quittais la pièce en me bouchant les oreilles. Je l'ai retrouvée sur le net et je constate dans les commentaires qu'on est nombreux à avoir ressenti la même chose.
"Royal canin, le vrai respect du chien" pas le respect du gamin en tout cas. La pub et sa chanson ont été parodiée par Chabat avec les Nuls puis dans Astérix mission Cléopâtre.

Ce n'est qu'en commençant les cours d'italien que j'ai compris qu'on ne prononçait pas "chie mais" mais il n'y a que maille "qui maille". 3 ans à dormir au fond de la classe me servent juste à déduire que "qui jamais" ne doit pas être la bonne traduction. A priori ce serait plutôt une expression signifiant "qui donc ?" A osé écrire une chanson aussi déchirante ? Ennio Morricone.

A suivre, un autre traumatisme d'enfant dû au compositeur, avec la bande originale d'Il était une fois dans l'ouest. ("ouh ouh ouh houhououh.... ouh HOOOOOOU OOUUU oUUU OUUUUUH !")

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04/07/2020

Embauchez-moi, vous ne le regretterez pas

gaston indispensable.jpgAvant de trouver ma planque mon job actuel qui me convient bien (faudrait juste supprimer les collègues. Et les clients. Juste me payer pour ma présence quoi) j'ai non seulement été affectée à des postes sans intérêt pour moi (aucune créativité), mais souvent aussi, parfaitement inutiles. La plupart du temps, je jouais le rôle d’intermédiaire entre deux personnes qui auraient pu communiquer directement. Ou je recopiais sur ordinateur des textes techniques incompréhensibles, écrits à la main par des types qui avaient la flemme d’allumer leur PC ou d’apprendre à s’en servir. Ou j’accueillais des gens dans un lieu où personne ne se présentait.

Plus précisément, pour un de ces jobs, je vérifiais des données, et ma vérification était ensuite revérifiée au grade supérieur. 
"j'ai vérifié ce qu'il a fait, c'est bon"
"j'ai vérifié ce qu'elle a vérifié, c'est bon."
Je ne parle pas d'informations d'importances capitales, d'erreur de calcul qui provoquerait une explosion nucléaire et imposerait une double vérification. Non, je vérifiais bien des calculs, mais de notes de frais. Pas les notes de frais du grand président de l'entreprise, celles-ci restaient hautement confidentielles, interdiction formelle de regarder pour les subalternes. (Evidemment, quand j'étais tombée dessus, j'avais bravé l'interdit, fait des clichés comme preuve et tout envoyé au Canard Enchaîné pour dénoncer le scandale. Non je rigole. Je n'avais pas encore d'appareil photo sur le téléphone à l'époque, j'avais "juste" recopié les sommes honteusement exorbitantes à la main et en avait parlé à tout mon entourage).

Je m'occupais simplement du gars en déplacement qui voulait se faire rembourser son pauvre sandwich sncf aussi épais que moi ou Renaud. Effectivement, il faut bien une note comme preuve pour justifier les 6 euros pour un bout de pain de mie industriel agrémenté d'une rondelle de tomate et d'un lardon. Mais deux personnes pour valider un sandwich, c'est inutile. J'ai mis les pieds dans le sandwich le plat d'entrée :
"à quoi on sert si quelqu'un vérifie encore au-dessus de nous ? Ils nous pensent assez cons pour ne pas savoir lire un chiffre ? Faut un référendum auprès de tous les Français pour valider une note à 6 euros ?"

gaston montagne papier.jpgMon collègue qui me présentait fièrement son travail s'est ratatiné. Il m'apprend alors qu'il fait ce job depuis...25 ans et il a l'air de découvrir son inutilité. 25 ans dans le déni à s'imaginer en indispensable maillon de la chaîne, puis une gamine qui n'était même pas née quand il a débuté lui enlève ses illusions, sa joie de vivre dès sa première heure de travail. Il a passé les 6 mois suivants (avant que je parte à la fin de mon contrat en ayant refusé le CDI qu'on me proposait) caché derrière un véritable mur de notes de frais, qu'il ne s'embêtait même plus à vérifier, démoralisé.

Si vous voulez motiver vos troupes, embauchez-moi !
à suivre...

 

 

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