20/02/2021
Lupin
C'est le plus grand des voleurs
Oui mais c'est un gentleman
Assane Diop (Omar Sy) est orphelin depuis que son père, chauffeur pour une riche famille industrielle, a été accusé à tort d'un vol de bijou et s'est suicidé. 25 ans après, le collier dérobé refait surface, et Assane, devenu gentleman cambrioleur comme son héros Arsène Lupin, tient là sa revanche...
Je savais juste que la série évoquait le héros de Maurice Leblanc, sans en connaître les détails, à part les polémiques stériles : Omar Sy ne joue pas Arsène Lupin, il s'inspire du personnage et le modernise !
Les histoires de Maurice Leblanc se déroulaient à la belle époque, 1900, où la police commençait à s'associer aux nouvelles technologies scientifiques pour résoudre les crimes, grâce notamment à Alphonse Bertillon et au préfet Lépine : découverte des empreintes digitales, réalisation des fiches anthropométriques des délinquants, puis utilisation du téléphone pour joindre les commissariats, des bicyclettes pour les déplacements des policiers... Tout ceci est démontré dans la nouvelle série canal+ Paris police 1900, puis dans le génial musée de la préfecture de police et l'excellente série documentaire qu'il a inspiré, Des crimes presque parfaits.
La série Lupin développe deux bonnes idées : la première, le mythe du gentleman cambrioleur qui utilisait les moyens de son époque pour flouer la police est transposé à notre époque moderne. Cela permet un déluge de gadgets dernier cri fort plaisant que ne renierait pas James Bond. Deuxième bonne idée, Arsène Lupin est insaisissable car il est doué pour se cacher de la police. Pour son disciple, cette invisibilité est renforcée par le fait qu'il est issu des minorités, déjà peu regardées par la société.
La série fait un parallèle avec les minorités qui sont souvent exploitées pour des travaux ingrats, chauffeur comme le père du héros, ou agent de ménage comme les employés du Louvre dans le premier épisode, livreur en vélo... Ces personnes sont si peu considérées qu'on ne fait pas attention à elles, et l'apprenti Lupin en profite pour accomplir ses forfaits sous les yeux des passants : "vous m'avez vu, mais vous ne m'avez pas regardé".
Très bonne idée, mais le choix d'Omar Sy pour incarner un personnage censé passer inaperçu me semble étrange : sa carrure est immense, il est aussi large que grand, une armoire à glace !
Quand les policiers regardent les 4 portraits robots du voleur, ils s'étonnent : "ce sont 4 personnes différentes !" J'ai éclaté de rire : Euh, non justement, pas du tout, on reconnaît clairement Omar Sy ! On dirait une parodie de De Funès devant le portrait robot de Fantômas ! L'acteur a beau se maquiller, se rajouter des moustaches, il ne peut masquer qu'il fait 1m90 et 100 kilos ! Les flics sont de gros baltringues, ils ne soupçonnent pas l'évidence, qu'Assane est le voleur.
La série comporte ainsi de nombreuses incohérences et facilités.
Par exemple, comment la journaliste a-t-elle découvert l'adresse d'Assane alors qu'elle est top secrète et qu'il fait tout pour se cacher, que toute sa technique repose sur son invisibilité ? L'adepte d'Arsène Lupin devrait s'alarmer d'être suivi et repéré si facilement, mais quand il demande à la journaliste comment elle a eu son adresse, elle se contente de répondre "une bonne journaliste ne dévoile jamais ses sources" et il ne pousse pas l'investigation plus loin. Comme c'est pratique.
Il est aussi invraisemblable que tout se déroule comme il l'avait prévu, qu'il prévoit la réaction des gens et les événements au millimètre et à la minute près (pour le vol du bijou et quand il est en prison par ex) mais on se laisse aller aux facilités scénaristiques, elles participent au merveilleux, au magique, au côté jouissif : "haha, vous le prenez pour un con, mais il vous a bien eu !" Un peu comme les braquages des films des Ocean 's 11.
La seule faiblesse d'Oussane reste sa famille, avec le personnage de son ex compagne Ludivine Sagnier, pas assez développé selon moi. Les personnages secondaires le sont un peu trop justement, et trop caricaturaux (le méchant est très méchant, les flics sont très cons, la femme fatale très belle et raffinée).
Malgré tout, la série se regarde vraiment avec plaisir. J'apprécie qu'elle ait relancé le goût de la lecture des Arsène lupin, fait enfin reconnaître le talent de Cascadeur avec sa chanson Meaning de Cascadeur utilisée dans le film (déjà dans Le sens de la fête). Lupin rencontre du succès chez les ricains, pour une fois qu'une série française s'exporte bien, cocorico. J'espère juste que ça ne va pas leur donner l'idée d'appeler leur gamin Raoul comme dans la série !
14:40 Publié dans On connaît la série | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : séries | | Facebook
19/02/2021
Ovni(s)
1978. Didier Mathure (Melvil Poupaud♥) brillant ingénieur spatial, voit son rêve partir en fumée lorsque sa fusée explose au décollage. Sa femme et collègue (Géraldine Pailhas) le quitte, il ne comprend pas ses enfants... Alors qu'il pensait avoir touché le fond, il est muté à la tête d'un bureau d'enquête spécialisé sur les ovnis, le GEPAN, géré par une équipe qui donne effectivement l'impression de vivre sur une autre planète : Véra Clouzeau, "comme l'actrice mais ça s'écrit pas pareil" lunaire, un geek persuadé de l'existence des extra terrestres, et un ancien des RG un peu parano (Michel Vuillermoz).
La mission du nouveau directeur : trouver des explications scientifiques aux apparitions de soucoupes volantes qui défraient la chronique, notamment dans les émissions de Jean-Claude Bourret. Un véritable enfer pour ce cartésien invétéré qui n'a plus qu'une idée en tête : se tirer de là au plus vite. Mais un événement extraordinaire va bouleverser ses certitudes, et lui ouvrir les portes d'un monde où plus rien n'est impossible...
J'ai adoré cette série, car elle a tout pour me plaire : humour absurde et poétique, nombreuses références cinéphiles, nostalgie des années 70. Surtout, elle joue sur l'émerveillement, et ceux qui ont gardé leur âme d'enfant comme moi qui ai toujours 10 ans, ("je sais que c'est pas vrai mais j'ai 10 ans"), ne peuvent qu'apprécier ! Comme le dit Véra, mon personnage préféré : "ça s'appelle la poésie, et c'est un besoin qui relie toute l'humanité".
La série est en apparence légère en maniant l'humour absurde, mais elle se base sur des faits réels : le GEIPAN existe vraiment et Ovnis s'inspire de faits réellement observés. Elle mêle poésie, science et enquête avec brio. Moi qui m'ennuie vite et devine souvent la fin, j'ai été happée et j'ai hâte de connaître la suite ! Le rythme reste haletant, dès le générique.
Ovnis utilise de nombreuses références à Spielberg, Tati, et même à Gaston Lagaffe, avec les dossiers qui s'entassent dans le bureau et tombent des placards.
Le soin apporté à la reconstitution des années 70, aux décors, aux vêtements, aux tapisseries, m'a rappelé le plaisir que j'ai eu à retrouver des objets de mon enfance dans Stranger things.
L’excellente bo est aussi soignée que les décors et reprend des musiques de films de l'époque : Une série qui utilise dès les premières minutes le sifflement de Coup de tête (la musique à la fois joyeuse et mélancolique que j'ai en tête constamment) puis la mélodie hongroise de Schubert qu'on entend à la fin de Préparez vos mouchoirs, deux comédies avec Dewaere, ne peut être qu'excellente ! Le thème du carillon d'Ennio Morricone dans Et Pour quelques dollars de plus revient souvent. La musique électro planante de Thylacine correspond bien à l'univers rétro et cool de la série, comme ici en lien. Le compositeur modernise des morceaux de Jean-Michel Jarre que j'écoute régulièrement depuis.
Les personnages sont tous excellents et bien interprétés. Certains esprits chagrins ont critiqué des caricatures, mais le propre des comédies est d'exagérer des défauts pour en rire ! La majorité des ressorts comiques reposent sur ce principe : un héros en apparence "normal", entouré de bras cassés, comme Jim dans The office par exemple.
Je trouve les personnages d'ovnis pas si fous que ça. (voir les teasers en lien) Je ne pense pas qu'ils soient présentés pour qu'on se moque d'eux, au contraire, ils sont très sympathiques grâce à leur poésie et sincérité. Rémy le geek qui croit aux ovnis est un génie de l'informatique. Véra a l'air perchée, mais c'est elle qui résout la plupart des enquêtes. Elle rayonne, sa fraicheur, sa spontanéité, sa vivacité me la rendent très attachante. Une bouffée d'air frais que je voudrais avoir pour amie ! J'aime sa façon de voir les choses : "moi je trouve ça bien, un peu de mystère. " "Souvent quand il y a un événement qu'on ne comprend pas, on se dit que le mieux ce serait de faire comme si rien ne s'était passé. alors que moi je pense qu'il faut faire tout le contraire !" Le monde se porterait mieux avec plus de gens comme elle.
Au final, le plus fou est peut-être celui qui se croit le plus normal, le directeur, car il accumule les erreurs de jugement. Il est incarné par Melvil Poupaud♥ mon grand amour d'adolescente dans Conte d'été. La relation qu'il entretient avec sa famille est jouissive : quand il est convoqué à l'école parce que le petit a voulu faire décoller une fusée avec des pétards, au lieu de le gronder comme l'espère la directrice, il lui explique quel explosif il aurait dû utiliser pour pouvoir réussir son expérience scientifique. Il n'hésite pas à dire à ses enfants qu'ils ne sont pas des priorités, quand il s'absente du spectacle de fin d'année du petit dernier pour une enquête par exemple : " il y a plus important que toi dans la vie, là je dois régler tel problème" ou quand il apprend l'âge de sa fille qui veut rejoindre les hippies du Larzac : "t'as 18 ans ?" La plus équilibrée au final (et la moins drôle du coup) c'est sa femme, incarnée par la trop rare Géraldine Pailhas, toujours aussi belle.
Ovni(s) à voir sur Mycanal pour une bouffée d'air frais nostalgique !
16:00 Publié dans On connaît la série | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : série, série mycanal | | Facebook
18/02/2021
Seules les bêtes
La version glauque de Je suis là, de l'incommunicabilité et de la solitude renforcées par les réseaux sociaux. Dans l'immensité des Causses où subsistent de rares fermes isolées, une femme disparaît lors d'une tempête de neige. L'enquête piétine, mais 5 personnes se doutent qu'elles sont liées à sa disparition, sans savoir comment...
Après le déluge qui m'a donné envie de regarder Underwater, encore un film inspiré par la météo, puisqu'il se déroule sous la neige. Les montagnes blanches et silencieuses forment un décor idéal pour ce film étrange, à l'image de la filmographie du réalisateur de Harry un ami qui vous veut du bien, Lemming et Le moine. Seules les bêtes me semble le plus abouti, le mieux construit, le plus profond et dramatique. Il ne présente pas une simple enquête policière, mais une étude des relations humaines, de la solitude et ce qu'elle engendre. On suit la trajectoire des protagonistes de l'affaire, on se laisse embarquer sans savoir où, j'ai eu beau cogiter, cette fois-ci, je n'ai pas réussi à deviner la fin.
Un bémol, le cinéaste retombe dans son travers : des éléments restent mystérieux, certains personnages se rencontrent par un hasard incroyable, c'est décevant. Il aurait été facile de lier leurs destins comme dans les films d'Inarritu par exemple (Babel, 21 grammes...)
Avec dans les rôles principaux : Denis Ménochet (aussi inquiétant que dans Jusqu'à la garde) Valeria Bruni-Tedeschi (toujours sur le fil) Laure Calamy, qu'on voit partout en ce moment (10 %, La flamme, Antoinette dans les Cévennes) la troublante Nadia Tereszkiewicz (la série Possessions sur Mycanal) le sympathique Bastien Bouillon (2 automnes, 3 hivers).
- Seules les bêtes de Dominik Moll , 2020, MyCanal
07:37 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (0) | | Facebook
17/02/2021
En eaux profondes
En ces temps de déluge et de couvre-feu où on regrette les congés en bord de mer, un bon film pour relativiser. Il est inspiré d'une histoire vraie : un couple en vacances dans un endroit paradisiaque fait de la plongée en groupe et est oublié en plein milieu de la mer et des requins. Voir la bande annonce en lien.
Très efficace, avec peu de moyens, une unité de lieu et d'action et sans effets spéciaux : les acteurs ont réellement tourné parmi les squales ! Tout est dans l'attente et l'imagination : "vont-ils s'en sortir ou se faire bouffer ?"
On ne voit donc plus que le couple, leur tête qui dépasse de l'eau, face à l'immensité déserte. Parfois, le spectateur aperçoit des requins les frôler, sans qu'eux s'en rendent compte. Peu d'action et pourtant, le procédé fonctionne parfaitement sur les caractères imaginatifs et anxieux qui anticipent le pire comme moi.
Les ressorts psychologiques et les problématiques du couple sont bien dessinés : au début, ils pensent juste s'être trompé de lieu, ils sont persuadés que le bateau va venir les chercher. Ils restent complices et rigolent. Ils commencent à comprendre, essaient de rester calmes et solidaires, puis avec la fatigue, la perte d'espoir, s'en prennent l'un à l'autre "si tu ne t'étais pas attardé à regarder cette anguille ! " "si tu avais bien voulu rejoindre les autres bateaux qu'on voyait au loin au début !" Ils remontent loin, comme les disputes de couples qui s'enveniment : "et si tu ne travaillais pas autant, on aurait pas pris ces vacances au dernier moment sans préparation !" Avec des si, on met Paris en bouteille, mais pas la mer pleine de requins.
Sur le même sujet d'attaque de requins, une autre histoire vraie est aussi racontée dans The reef, très efficace également.
Par son procédé minimaliste qui fonctionne principalement sur l'imagination du spectateur, Open water m'a rappelé Duel de spielberg, où l'on voit simplement un camion sur une route se faire poursuivre par un autre pendant toute la durée du film : "pourquoi ? qu'est ce qu'il lui veut ? va t-il en réchapper ?"
J'avais beaucoup apprécié Open water à l'époque de sa sortie et mon avis n'a pas changé en le revoyant. Il ne dure qu'1h15, car le procédé ne pourrait tenir sur la longueur.
Open water, en eaux profondes, de Chris Kentis, 2004, Mycanal
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