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01/03/2018

The deuce

deuce.jpgDans les années 70,  l'essor du cinéma porno à travers la vie animée du Deuce, un quartier de Manhattan peuplé de prostituées et de leurs macs.

J'ai eu du mal au début, car je trouvais le sujet trop glauque : dès le premier épisode, un maquereau repère les ados fugueuses à la gare de New York. Elles ont fui leur campagne natale et leur père violent, pour espérer une meilleure vie, mais se retrouvent mises sur le trottoir, brutalisées par leur proxénètes et leurs clients.
J'étais aussi mal à l’aise devant la mise en scène : l’esthétisme cool, les supers musiques, les tenues, l'humour, qui rendent la prostitution et les maquereaux sympas (ils sont si drôles ! avec leur col pelles à tartes et leur pattes d'eph !) Puis je me suis laissée prendre au jeu (la condition de ces femmes est tout de même vaguement dénoncée) et je me suis intéressée au destin de la prostituée "libre et rebelle" qui refuse d'avoir un maquereau, puis tente de s'extirper de la rue en... devenant réalisatrice de films porno.

Elle est jouée par Maggie Gyllenhaal, épatante, productrice de la série et qui donne de sa personne, cas de le dire. Le barman qui se veut honnête et son frère jumeau corrompu qui se lance dans le business sont joués par James Franco, et j'ai du mal à comprendre quel rôle l'acteur interprète, car au final il joue les deux frères de la même façon : choisir un seul acteur pour les deux protagonistes me paraît superflu, la performance artistique n'est pas au rendez-vous. A part la prostituée rebelle, j'ai eu du mal à apprécier les personnages, surtout les maquereaux évidemment. Mais the Deuce demeure une série intéressante, surtout pour la reconstitution de l'époque sex drugs rock n'roll. 

26/02/2018

Série coup de cœur : The knick

knick.jpgCette excellente série de Steven Soderbergh relate la vie d'un hôpital en 1900. A part la comique Scrubs, je n'ai pas regardé de séries en milieu hospitalier, comme Urgences ou Grey's anatomy, car j'ai de mauvais souvenirs de l’hôpital ( = mouroir pour vieux). Je craignais d'être mal à l'aise avec les maladies, le sang, la mort. Mais vu le casting (Clive Owen♥, acteur des Fils de l'homme, et Steven Soderbergh, réalisateur de Traffic et Ocean's eleven) je me suis laissée tenter.

Le premier quart d'heure met directement dans l'ambiance : un médecin joue sa réputation en testant une nouvelle technique, en opérant devant ses pairs une femme enceinte : l'opération échoue, la femme et son bébé meurent, le sang gicle de partout et j'ai failli rendre mon cacao. Mais la réalisation est si intense et le propos si passionnant que je suis restée devant l'écran. On voit l'incroyable évolution de la médecine en un siècle : "on va être révolutionnaire, on installe l'électricité dans l'hôpital ! Bon ok on sait pas encore trop comment ça fonctionne et on a fait cramer un patient..." "Cet homme est cocaïnomane ? Nous venons justement de découvrir une nouvelle substance qui va le désintoxiquer en moins de deux : l'héroïne !" "nous venons d'inventer une machine incroyable pour voir à l'intérieur du corps humain ! On appelle ça des radios ! Et justement les rayons X sont extrêmement bénéfiques pour le corps !"

Ici, pas de manichéisme, pas de gnangnan (le beau docteur toujours propre et poli va t-il épouser l'infirmière ?) Le héros est un médecin cocaïnomane et irascible, qui dévergonde la jeune infirmière innocente. Mais cette dernière n'est pas si naïve et en profite pour gravir les échelons... La seule vraie histoire d'amour se déroule entre une femme aisée, bienveillante donatrice de l’hôpital, et le fils de son domestique, à qui elle a permis de faire des études et de devenir un brillant médecin. Mais comme il est Noir, on lui refuse le droit d'exercer, et comme il est issu d'une famille pauvre, l'histoire d'amour est impossible, la femme doit se plier aux convenances de son rang. La série traite également de l'avortement illégal à l'époque et pratiqué par... une religieuse : elle aide les femmes, souvent prostituées, en leur distribuant des préservatifs.

Les dirigeants de l’hôpital et les médecins doivent ruser pour trouver des subventions ou monter en grade. La série est cynique et très réaliste, elle reflète son époque et interroge la nôtre : si la médecine a progressé, les mentalités (racisme, avortement, préjugés, corruption, ambition démesurée) beaucoup moins...

La deuxième saison se termine abruptement sur un cliffhanger intenable et la troisième saison a été... annulée ! Soderbergh l'explique ainsi : "elle devait se dérouler en 1947 et être tournée en noir et blanc anamorphique. il est possible que cette idée ait contribué au non renouvellement de la série". M'enfin !

 

19/02/2018

Série coup de cœur : En analyse

sériesA chaque épisode, un psy (Gabriel Byrne) fait face à un patient. Un dialogue, des questions existentielles. Toujours le même décor vieillot d'un cabinet de médecin. En huis clos, la caméra bouge peu, des champs contre champs, des gros plans. Les personnages restent assis sur leurs fauteuils. Seules scènes d'action : parfois ils se lèvent pour se faire un café. Suspense insoutenable : vont-ils prendre du sucre ou pas ? Un jour le héros a fait tomber sa tasse: je ne m'attendais pas à un rebondissement (cas de le dire) et à une telle scène d'horreur (un si joli pull taché !) j'ai fait un bond de deux mètres.

Je connaissais la réputation de la série, qui date de dix ans, mais je n'avais pas voulu me lancer jusque-là, peur que ce soit ronflant. Eh bien pas du tout : c'est passionnant et intense, et d'une grande finesse. Chaque épisode se consacre à un patient, que l'on revoit tous les cinq épisodes. J'avais hâte de connaître la suite et j'enchaînais pendant des heures. Une saison contient 45 épisodes de 25 minutes, et on a vraiment l'impression de s'immerger dans d'autres vies, à tel point que je n'ai pas pu encore regarder la saison 2, avec de nouveaux personnages, car je m'étais trop attachée aux premiers.
On suit par exemple Laura, le rendez-vous du lundi matin, dont on comprend au fil des séances que pour se sentir aimer et exister, elle a besoin de plaire et séduire tout le monde, dont son psy... Résistera t-il au transfert et à la drague insistante de sa patiente ? On suit aussi un couple qui ne cesse de se disputer et on en découvre peu à peu les vraies raisons complexes et profondes. Tout le monde peut s'y identifier : les problèmes de communication et leurs malentendus, les attentes trop élevées, croire que l'autre réagit forcément comme nous et devine ce que l'on pense et ressent...
Le psy traite également un pilote d'avion de chasse très narcissique et prétentieux, obligé par sa hiérarchie de consulter après avoir bombardé par erreur une école en Irak. Pour lui il n'a pas de séquelles car il est un dur, mais il dévoile peu à peu ses failles, et on finit par s'attacher à cet homme peu aimable de prime abord.

La série pose aussi ces questions : peut-on soigner et écouter quelqu'un que l'on n'apprécie pas, auquel on ne peut s'identifier ? Et au contraire, peut-on réussir à garder ses distances, ne pas se laisser submerger par les émotions à force d'entendre des gens malheureux ? Les cordonniers sont les plus mal chaussés. Le héros a bien du mal à s'appliquer à lui-même l'écoute et les conseils qu'il prodigue. Son couple bat de l'aile et il doit lui-même voir un psy, où il se révèle sous un autre jour.

En analyse montre comment le patient se mure derrière une langue de bois, une fanfaronnade, comment le psy (et le spectateur) devine qu'il cache quelque chose, comment il l'amène à se confier sans le brusquer...
Je parlais toute seule à mon ordi pour poser les questions à la place du psy, mais à la manière d'un commentateur de match de foot :
"Nan mais j'y crois pas, tu dragues ton psy là ?"
"C'est ça essaie de nous faire croire que tu t'en fous !"
" Ouais en gros t'es anorexique quoi"
"Putain mais comment tu laisses ta nana te parler comme ça ? Mais quelle grognasse ! Pourquoi tu rampes à ses pieds alors qu'elle te traite comme un chien ? Mais quitte-là !"
"Bon c'est quoi ton problème ? T'arrêtes de tourner autour du pot ?"
Tact, diplomatie, finesse... Je ferais une super psy, j'en suis sûre.

 

15/02/2018

Engrenages, une série policière ultra réaliste

sériesEngrenages a débuté en 2005 mais je ne l'avais jamais regardé, car je gardais un à priori sur les séries françaises, forcément du niveau de Julie Lescaut ou Plus belle la vie. Mais face aux critiques élogieuses, je me suis laissée tenter.
Au début, mes craintes étaient confirmées : la mise en scène de la première saison est kitsch à souhait, avec des zooms et une musique tonitruante aux moments cruciaux. Comme souvent aussi dans les séries françaises, je trouvais que les acteurs jouaient très mal, en particulier Grégory Fitoussi, embauché pour sa belle gueule et aussi crédible en substitut du procureur que moi en Lara Croft (quoique, je pense que je serais plus adaptée). En me renseignant, je découvre qu'il a commencé sa carrière dans Sous le soleil... J'ai d’abord pensé qu'il aurait mieux fait d'y rester, car son visage reste toujours inexpressif, qu'on lui annonce l'implication de son meilleur ami dans une affaire sordide ("ah, flûte "), qu'il regarde un cadavre éviscéré ("c'est pas joli. Sinon on mange quoi à midi ? ") qu'il défende un innocent au tribunal ("je crois que c'est pas lui ") ou qu'il déclare sa flamme ("t'es sympa "). Dans la deuxième saison, soit je me suis habituée à son absence de jeu, soit il a enfin pris des cours. La mise en scène ridicule a aussi disparu.

Les premières saisons évoquent plusieurs vraies affaires criminelles. C'est intéressant mais ça donne parfois un aspect décousu, car les histoires ne sont pas assez approfondies, un épisode chacune. Les saisons suivantes se concentrent enfin sur une ou deux histoires, mais elles tirent parfois sur la longueur : les premières saisons comportaient 8 épisodes, les suivantes 12. 4 épisodes de trop selon moi pour résoudre les enquêtes :
Episode 6 : "on a démasqué le tueur ! Reste plus qu'à le choper ! " épisode 7 : "on l'a trouvé !" épisode 8 : "mince il vient de partir" épisode 9 : "flûte, encore raté". épisode 12 (30 ans et 450 meurtres plus tard, les flics en fauteuils roulant et la tremblote) : "c'est bon on le tient ! File-moi les menottes pépé !")

sériesLes enquêtes policières classiques ne sont pas ce qui m'emballent le plus (démantèlement d'un réseau de prostitution (saison 5), de drogues (saison 2), arrestation d'un serial killer (saison 3) de terroristes (saison 4)... Ce qui me plaît, c'est la description fascinante des rouages de la justice, absolument pas impartiale, surtout lorsqu'elle concerne des personnes hauts placées ou des hommes politiques. Le juge d'instruction, seul honnête et intraitable face à la corruption, est vraiment mon héros.
La série explique également très bien la guerre des polices entre la brigade criminelle et la Direction de la Police Judiciaire, qui se tirent dans les pattes pour obtenir des promotions et ne se transmettent pas les infos. Pendant ce temps-là, le serial killer a le temps de courir :
"Mais vous saviez qu'il était là ? Pourquoi vous nous l'avez pas dit ? 
- Parce que c'est lui le meurtrier ? On savait pas ! Pourquoi vous nous l'avez pas dit ? "

Le fonctionnement d'une équipe de police, les rapports humains, le manque de moyens, sont aussi très bien retranscrits, car la série se base essentiellement sur des affaires réelles (comme l'affaire Neyret ou des meurtres de la gare de Perpignan) et les confidences de vrais policiers, ce qui fait toute la force d'Engrenages : son réalisme, ça sent le vécu. Le scénariste Eric de Barahir est un ancien flic.
Le monde des avocats est aussi très bien dépeint (comment défendre des ordures ? Comment garder la distance nécessaire avec ses clients, ne pas trop s'y attacher et mettre ses émotions de côté ?) Audrey Fleurot en avocate avide sans scrupules est bien loin de son rôle de dame du lac de Kaamelott, et elle est aussi garce qu'elle est belle.

Le personnage principal, le capitaine Berthaud, est jouée par une femme, qui m'épate par son charisme, mais devient un peu chiante au fil des saisons. Les scénaristes ont dû penser "il faut qu'on cède aux clichés de la femme hystérique soumise à ses hormones et au besoin d'enfant, on va la faire gueuler et chouiner de temps en temps". Ses collègues sont impeccables aussi, celui qui concilie difficilement vie de famille et boulot qu'il voudrait plus pépère, et Gilou le gros dur au cœur tendre qui a une conception un peu moins honnête de son taf, en fricotant un peu trop avec ses indics et les dealers... Par contre je ne peux pas piffrer le commissaire de la brigade criminelle, je ne comprends pas pourquoi Laure fricote avec ce gros con pédant alors qu'elle a Gilou, un type aux petits soins pour elle sous ses yeux.
Bref, Engrenages, une série à voir, vivement la suite !