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03/05/2014

Libre, seul et assoupi, de Romain Monnery

libre seul et assoupi,romain monnery,pôle emploi,chômage,travailJe vous parlais hier du film Libre et assoupi, pour lequel vous pouvez toujours gagner des places de cinéma. Voici maintenant ma propre expérience et des extraits du livre dont le film est adapté :

Avant, j’étais comme le personnage de Bruno, à accepter n’importe quel boulot, et je postulais à tout (cliquez sur ces quelques liens, pour ceux qui n'ont pas suivi mes péripéties de chômeuse) J’ai enchaîné les emplois merdiques, mal payés, avec les collègues aigris, bêtes et méchants. J’ai vu des choses qui m’ont rendues malades (un porc qui tripote les gamines dans une école mais personne ne le signale à part moi « parce qu’on ne veut pas créer d’histoires », une femme qui maltraite ses enfants, etc…) Plutôt que de crever au boulot, j’ai décidé d’arrêter. Sois feignant, tu vivras longtemps. Aujourd’hui, je profite de mon chômage pour chercher enfin un travail qui me corresponde mieux, même si je ne rêve pas trop, je ne trouverai pas de boulot en rapport avec ma formation (cinéma). Même si dans 3 mois, je n’ai plus droit aux allocations, et que faute d’argent, je serai obligée de reprendre la longue suite des petits boulots en intérim. Et puis si les bac+5 prennent les emplois qui ne nécessitent aucun diplôme, comment font ceux qui n’ont même pas le bac ? Le boulot, y en a pas beaucoup, faut le laisser à ceux qui aiment ça. Sois feignant, tu vivras content

J’ai non seulement été affectée à des postes sans intérêt pour moi (aucune créativité), mais souvent aussi, parfaitement inutiles. La plupart du temps, je jouais le rôle d’intermédiaire entre deux personnes qui auraient pu communiquer directement. Ou je recopiais sur ordinateur des textes techniques incompréhensibles, des suites de chiffres écrits à la main par des types qui avaient la flemme d’allumer leur PC ou d’apprendre à s’en servir. Ou j’accueillais des gens dans un lieu où personne ne se présentait, etc. Franchement, je me sens plus utile à écrire un blog, faire connaître des films, des documentaires, des pièces de théâtre et des livres ! Si on pouvait m’embaucher pour ça !

Avant d’être un film, Libre et assoupi était d’abord un livre, devenu un peu ma nouvelle Bible. Ecrit par un Lyonnais de naissance (comme moi) de mon âge et dont le personnage me ressemble beaucoup, comme vous pouvez le constater : 

livre,littérature,libre seul et assoupi,romain monnery,pôle emploi,chômage,travailLibre, seul et assoupi de Romain Monnery, édition Le diable Vauvert : 

« J’étais un enfant de la génération précaire et très vite, je compris que viser un emploi dès la sortir de ma scolarité revenait à sauter d’un avion sans parachute. C’était brûler les étapes. Jeune diplômé comme on en trouvait des milliers sur le marché, j’étais de ceux à qui les entreprises disaient « sois stage et tais-toi ».  Les années 2000 étaient fièrement installées sur leur piédestal mais l’esclavage semblait toujours prospérer. (...)  Je pouvais toujours prendre un job alimentaire, plier des pulls chez gap ou vendre des big mac, mais bon sang, j’avais fait des études. Je choisis alors de faire un stage en le prenant pour ce qu’il n’était pas : un tremplin vers l’embauche.

« Trois mois s’étaient écoulés depuis mon 1er rendez-vous RMI (RSA désormais). Comme on me l’avait annoncé, je fus convoqué pour un nouvel entretien censé déterminer si, oui ou non, mon contrat méritait d’être renouvelé. C’était la règle du jeu. Retour à la case départ, comme au Monopoly. Alors, qu’avais-je fait durant ce laps de temps ? La question méritait d’être posée.

Selon les brefs calculs que j’avais effectués :

  • j’avais dormi + de 1000 heures (siestes comprises)
  • j’avais vu 72 films (pas que des bons)
  • j’avais passé 500 heures devant la télé (clips, pubs, séries)
  • j’avais lu 34 livres (que des poches)
  • je m’étais demandé 272 fois ce que j’allais faire de ma vie.

En somme, je n’avais pas perdu mon temps. Restait à voir si l’emploi de celui-ci serait du goût de la conseillère censée me recevoir, mais, très vite, je compris que non. En arrivant au rendez-vous, une petite femme à l’air sévère vint à ma rencontre. 

- Alors c’est vous le plaisantin ? (...) Je vais vous lire un extrait de la lettre de motivation que j’ai découverte en ouvrant votre dossier : « je n’ai rien contre l’idée de travailler du moment qu’on ne m’y oblige pas ». Vous pouvez me dire ce que ça signifie ? (...) Le problème, c’est que vous avez pris le rmi pour ce qu’il n’est pas : des vacances. » Je protestai comme je pus, arguant du fait que j’avais été à la bibliothèque quasiment tous les jours et que je m’étais cultivé dans l’optique de mon prochain travail (…) « C’est pour votre bien que je dis ça. Vous m’avez l’air de quelqu’un de sympathique, mais il serait temps de grandir. Dans la vie, on ne fait pas ce qu’on veut. Tenez moi par exemple, je voulais devenir danseuse étoile. Mais je ne viens pas au travail en tutu, vous comprenez ? Vous croyez sincèrement que ça m’amuse d’être là ? »

libre seul et assoupi,romain monnery,pôle emploi,chômage,travail« Je regardais dehors et me demandais alors à quoi ressemblerait le film tiré de ma vie. S’agirait-il d’un drame ? D’une comédie ? De science-fiction ? (…) Peut-être faisais-je fausse route. Peut-être qu’une vie n’avait rien à voir avec le cinéma. »

«  L’idée d’un livre me vint alors. (…) Je voulus me convaincre que j’avais trouvé ma raison d’être. Je m’imaginais sur les plateaux télé, parlant de moi, ma vie, mon œuvre et j’anticipais les critiques criant au génie (...) Je rêvais d’un grand livre au goût de madeleine qui se vendrait comme des petits pains mais, en attendant, je ne faisais rien. Comme d’habitude, je préférais penser aux conséquences plutôt que de me consacrer à l’action. Le poil que j’avais dans la main m’empêchait de m’y mettre. Je passais mon temps dans mon lit, l’ordinateur sur les genoux, le regard dans le vague, Internet en toile de fond. Malédiction de la technologie, ma connexion anéantissait tous mes efforts de concentration. Toutes les séries que je pouvais télécharger en un clic me donnaient mal à la tête. J’avais tellement de raisons de ne rien faire ! Je me familiarisais avec l’univers carcéral dans Oz, je m’initiais à la vie de famille aux cotés des Sopranos, je me prenais pour un cow-boy devant Deadwood et je sauvais le monde dans la peau de Jack Bauer. Toutes ces histoires m’empêchaient peut-être d’écrire la mienne mais elles me donnaient l’illusion d’en vivre par procuration. J’aurais pu continuer de la sorte pendant des jours mais j’avais atteint un seuil d’inaction qui remettait en cause mon statut de mammifère. Je ne me levais plus. La forme de mon corps s’était incrustée dans le matelas. J’étais devenu un invertébré, je ne faisais rien, je ne pensais plus. Internet s’en chargeait pour moi. »

Alors, certains jeunes se retrouvent dans ces extraits ? Si vous en voulez d’autres, j’en ai copié encore deux pages…

En faisant des recherches pour cet article, j’ai appris que Romain Monnery a sorti un nouveau livre : Le saut du requin. Je suis pourtant abonnée à sa page facebook depuis son premier roman, mais je ne l’avais pas vu ! Facebook n’affiche plus toutes les actualités. J’ai donc raté les organisations d’interview et rencontres avec l’auteur, quel dommage… mais je m’empresse de lire le nouveau livre et je vous en parlerai… surtout que le personnage principal ressemble à Ignatus, le héros de La conjuration des imbéciles, mon roman préféré. Et que Romain Monnery revendique Philippe Jaenada comme référence.

J’ai lu ici une de ses interview qui conforte nos points communs :

- Que réponds-tu quand on te demande ce que tu fais dans la vie ? (Note de Papillote : mon principal problème dans les soirées) 

« Quand je réponds « je ne fais rien », ça met les gens mal à l’aise. Quand je dis que je suis journaliste, les gens te demandent où et là, tu réponds « nulle part », ça rend aussi les gens mal à l’aise. »

« Je ne me sentirai jamais légitime. C’est une question d’éducation et d’origine sociale. »

« Je suis mal à l’aise avec le côté solennel et sérieux. Du coup, ça me joue des tours à tous les niveaux, car je ne sais jamais comment me positionner par rapport aux gens. Je fais du second degré en permanence et beaucoup de personnes le prennent au premier. »

ça me rappelle quelqu'un... Sur ce, je vous laisse car je n'ai regardé qu'un seul film aujourd'hui (Panic sur Florida beach de Joe Dante) un seul épisode de série (Weeds saison 8) et j'ai encore un bouquin à finir (Demande à la poussière de John Fante) avant d'aller au théâtre (Riviera sur Maurice Chevalier).

 

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Commentaires

Je vais de ce pas lire ce livre ! Comment ai-je pu passer à côté ??
Merci pour la découverte :-)

Écrit par : Laurence | 04/05/2014

Ça me donne vraiment très envie de lire ce livre :-)
Mais, là, j'en ai vraiment beaucoup en attente !!

Écrit par : Rock and Tea | 04/05/2014

Laurence : Merci ! N'hésite pas à revenir nous dire ce que tu en penses après ;-)

Rock and tea : je te le conseille vivement !
PS : tu as loupé un quiz On connaît la chanson ;-)

Écrit par : Papillote | 05/05/2014

Super film!!!

Écrit par : Mélanie | 16/05/2014

Mélanie : merci pour ton retour !

Écrit par : Papillote | 19/05/2014

Les commentaires sont fermés.