Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

06/05/2015

Gaston fait une formation, épisode 3

pierre richard distrait boulot.jpgDifficile pour moi de me présenter de façon codifiée, millimétrée, sans âme, sans originalité. Parce que je suis plutôt créative et passionnée.
Le formateur nous conseille d’expliquer ce que chaque expérience de travail nous a apporté, et en quoi elle peut nous servir pour le poste espéré. Je ne sais pas me vendre ni me mettre en valeur. Je ne vois vraiment pas ce que mes boulots pourris m’ont appris :

« Depuis que j’ai mis sous enveloppe 2000 lettres par jour à la chaîne, je suis devenue experte en pliage de feuille en trois et envoi de courrier, notamment pour Pôle emploi. Cette expérience me servira très certainement dans mon prochain poste quand euh… on me virera ? Vous ne le ferez pas hein ? »

« Mes longues années de baby-sitting m’ont enseigné l'art de changer des couches, et sachez que je saurai quoi faire lorsqu’un client incontinent se présentera »

«  Ah si ! J’ai exercé des emplois intéressants ! C’était super d’être journaliste ! J’écrivais des articles, je rencontrais des célébrités, j’étais invitée aux cocktails… Tout ce que je ne ferai pas dans ce futur boulot quoi. Mais ça peut toujours me servir pour le poste, je pourrai ramener de l’alcool et organiser une fête dans la salle de réunion de l’exécutif, c’est la salle la plus grande ? Je peux écrire sur mon collègue Gérard, la star du bureau 308 et l’expert en taillage de crayon à papier ? »

gaston neuneu.jpgMa présentation qui doit durer 15 minutes n’en fait que trois, car je survole ou passe à la trappe la moitié de mes emplois.
Je ne peux quand même pas dire que, si on compte certains boulots très courts en intérim, j’en ai exercé pile 20. 20 emplois  à mon âge ! Ça ne fait pas sérieux.
Et moi, je suis quelqu’un de très sérieux. (hum)

Le seul point positif que j’ai réussi à sortir, c’est qu’en ayant exercé autant de métiers différents, je suis polyvalente et m’adapte facilement. Dès que je suis arrivée à mon nouveau poste, alors que je classais des dossiers d’une main, je mangeais une papillote de l’autre, et j’ai tout de suite trouvé où était le bouton de la radio. J’ai su m’adapter aux goûts de mon collègue, fan de radio nostalgie comme moi. C’est-à-dire que chaque jour je le persuade d’apprécier la grande chanson française, car j’ai un grand pouvoir de persuasion. (re-hum) Depuis qu’il me connait, il est fan d’Hervé Vilard et de Demis Roussos et m’en réclame chaque matin. Alors vous voyez que j’ai plein de qualités et que je suis indispensable pour ce job !

Suite demain, avec les questions que l'on m’a posées

A la télé ce soir sur Arte, ne manquez pas un film magnifique, le film d'animation le plus triste au monde. Je ne connais pas une seule personne qui n'ait pas chialé devant. Si vous ne le faites pas, vous êtes psychopathe : Le tombeau des lucioles de Takahata.

 

06/02/2015

Tombe la neige et tombe Papillote

chat neige.jpgMon frère me téléphone :
« Je t’appelle pour te dégoûter… »
C’est donc pour me parler d’un événement très important que je rate. Qu’y a-t-il de plus essentiel pour un estomac sur pattes que de manger ? Il téléphone pour la chandeleur, pour me narguer avec ses bruits de mastication « mmm, c’est bon… j’ai mis la crème de marrons maison sur les crêpes… »
Il m’a fait le même coup pour la galette des rois. M’en fous, je l’ai mangée moi aussi, même que j’ai eu la fève ! Enfin c’était pas compliqué, contrairement à mon frère qui était avec toute la famille, donc une dizaine de personnes, on était que deux. Mon amie qui sait que j’ai 10 ans d’âge mental m’a laissé la part avec la fève. (Je vous rappelle dans ce billet en lien qu’il m'est arrivé la même chose dans un ancien boulot). Je ne m’y attendais tellement pas que j’ai mordu dedans de tout mon cœur et j’ai failli me péter une dent sur la figurine « mon ami le boulanger ».  J’ai porté fièrement ma couronne toute la journée.

Moi : « Ouais je sais… tu manges les crêpes… pff…
Frère : - Oh mais ya pas que ça, hihi, je te passe ta nièce :
Nièce : - Ya plein de neige dans le jardin ! Plus de 30 cm ! Et je ne peux pas aller à l’école car le car ne peut pas passer ! On a fait un igloo ! Et on a fait de la luge avec tonton ! C’est quand que tu viens en faire ? »
Tombe la neige, tu ne viendras pas ce soir …

La neige ! Mes meilleurs souvenirs d’enfance ! On se lève le matin, un silence inhabituel, une lumière particulière qui filtre entre les volets, et là on comprend : la neige est tombée ! On ouvre la fenêtre, on voit toute la campagne métamorphosée, magnifiée par le blanc immaculé, dans un silence de cathédrale… On s’habille en vitesse pour courir dans le jardin, se jeter dans la neige dans des postures saugrenues et y laisser l’empreinte des corps. On est euphoriques.
Seuls les chats n’apprécient pas. Ils posent délicatement une patte, se rendent compte qu’ils s’enfoncent, se secouent avec dégoût les coussinets et nous regardent avec dédain « Vous êtes tarés ! Ça mouille ce truc ! Je retourne près du poële moi ! »

bronzés ski.jpgOn appelle toute la famille et tous les amis pour aller faire de la luge.
Mais attention, pas de la luge comme on peut en faire en station de ski : une pauvre piste toute droite d’à peine 20 mètres de long, monotone. Non, de la luge de warrior : dans des prés gigantesques qui couvrent toute une colline, avec pleins de tertres et de monticules. On construit une piste toute en virages et en bosses, pour faire des vols planés. On n’a pas de vraies luges, on glisse sur des sacs de terreaux, sur des pistes verglacées qui font des centaines de mètres. On ne descend pas sagement assis. Non, allongés à même le sol en avant, ou carrément les pieds devant… Des amis en gardent encore les cicatrices sur leurs visages : ils n’ont pas pu freiner et se sont pris les fils barbelés qui délimitaient le pré.
On forme un train : un adulte assis devant qui fait la locomotive, un gosse derrière qui s’accroche à lui, un grand, les autres petits, moi qui ferme la marche (doit-on me compter en adulte ou en enfant ?) On perd toujours des wagons en route et le train déraille souvent avant d’arriver en gare.
On rentre ensuite pour se réchauffer près du feu avec un bon chocolat chaud et des tartines de beurre. On est trempés, couverts de neige et de terre, le dos en vrac à cause des pierres sur la piste, avec des bleus, des cicatrices… Bref on se marre bien quoi.

5 ans que je n’ai pas pu faire de la luge, enfin du sac de terreau.
Au boulot, les titulaires partent tous en vacances au ski, et les derniers arrivés comme moi n’ont pas de jour de congé et bossent deux fois plus pour compenser les absences (je travaille tous les samedis). J’ai bien tenté un timide « il neige à Lyon… » mais ma chef m’a clairement fait comprendre que, comme j’avais déjà été la seule à obtenir mon 24 décembre, je pouvais me gratter pour avoir des vacances maintenant.

Et hier, incroyable, j’écrivais tranquillement devant l’ordinateur, à côté de la fenêtre… Et là, je la vois, la neige ! A Paris ! Enfin !
Je dois justement partir bosser. Je marche allègrement dans la rue, le nez en l’air, à regarder les flocons tomber… Je fredonne :
« Libérée, délivrée !
C’est décidé je m’en vais !
J’ai laissé mon enfance en été
Perdue dans l’hiver, le froid est pour moi
Le prix de la liberté ! »

pierre richard porte.jpgMais on n’est pas dans ma cambrousse. À Paris, la neige ne tient pas. Elle se transforme en gadoue glissante. Je me tords la cheville, comme environ quatre fois par jour. Je vous rappelle qu’on me surnomme Gaston et Pierre Richard : j’ai deux pieds gauches, et dès qu’il y a un obstacle, vlan je me le paie. Je rentre dans tous les meubles.
Sauf que cette fois, au lieu de me plier gentiment la cheville sur le côté et de remonter l’air de rien, je me retourne le pied dans tous les sens, je pars en avant, sur deux mètres, et j’atterris sur…
les poubelles.
Bien sûr, tout cela devant une école à l’heure de la sortie, donc devant tous les parents qui se précipitent sur la clocharde étalée sur les ordures : « vous allez bien ? »
Je m’esclaffe : « oui ça va ! »

bronzés ski jambe cassée.jpgJe reprends ma route, parce que c’est pas le tout, mais je vais encore être en retard au boulot moi (qui a inventé cette machine infernale qu’est la pointeuse ? Le boss sait quand je suis en retard maintenant !)
J’ai un peu mal à la cheville mais bon, je vais survivre, j’ai l’habitude.
Je boite un peu mais bon, on va pas chipoter.          

Le soir je regarde les derniers épisodes de la saison 3 de Game of thrones (vous avez vu ce massacre ?! Puis Jon neige Snow qui abandonne sa copine en pleine bataille, alors qu’elle l’a défendu, qu’elle a trahi les siens pour lui ! Elle le retrouve, elle veut le tuer, et ce petit prétentieux « Je sais que tu ne vas pas le faire… » Il s’est pris deux flèches, bien fait pour sa gueule. « Tu m’aimes, je t’aime, mais je dois rejoindre ma famille, tu comprends… » Ben pourquoi il l’emmène pas avec lui ? C’était mon chouchou, mais alors là, plus du tout. En plus on m’a dit que toutes les filles aiment Jon Snow, et je ne suis pas toutes les filles moi, non mais. Fin de l’aparté et revenons à nos moutons)

pierre richard chevre.jpgBref, j’étais captivée par Games of thrones, mais je pensais tout de même à ma cheville, qui me faisait mal simplement posée sur le lit. Pendant le générique, je la regarde: elle a doublé de volume. Je touche, je sens un truc qui fait « crac » sous mon doigt et je gémis de douleur…
Mais je vais faire comme d’habitude : rien. Voir si ça passe tout seul, et puis j’irai consulter quand je serai au seuil de la mort, et mon médecin me dira encore « mais pourquoi vous avez attendu ?!! »

En plus, je me suis blessée sur le chemin du boulot, c’est donc considéré comme un accident du travail. De quoi gagner des jours de congés (et aller faire de la luge ?!) Mais dois-je vraiment raconter la vérité à mon médecin et à mes collègues : « Je me suis vautrée sur les poubelles ? »