16/10/2015
Green inferno : un film qui prend aux tripes !
Chaque jour, plus de 80 000 hectares de forêt sont détruits... De riches étudiants New-yorkais se rendent en Amazonie pour protéger la forêt et une tribu qui y habite, menacées de destruction par une multinationale qui cherche du gaz naturel. Les jeunes gens se filment enchaînés aux bulldozers, partagent les images sur les réseaux sociaux. Le buzz et l’indignation sont tels que les activistes réussissent leur pari : les travaux sont suspendus. Mais leur avion du retour s’écrase en pleine jungle, et la fameuse tribu les récupère. Et elle est particulièrement hostile… Voir bande annonce excellente en lien.
Green inferno prend aux tripes. C’est le cas de le dire : la tribu est cannibale… J’en suis ressortie dans le même état qu’après Space Mountain ou le manège à l’envers d’Indiana Jones : remuée mais contente d’avoir ressenti des sensations si fortes. Le coup de génie d’Eli Roth (Cabin fever, Hostel…) est de ne pas avoir choisi les habituels ados superficiels têtes à claques qui se font massacrer alors qu’ils passent un week-end à se torcher la gueule. Non, ici ce sont de braves étudiants idéalistes qui veulent changer le monde !
Au début du film, un prof parle des dégâts de l’excision, et les jeunes américains incultes découvrent cette réalité. L’héroïne s’emballe : « mon père travaille à l’ONU ! Je vais lui en parler et Zorro va combattre ce fléau ! » Quand les jeunes activistes réussissent à stopper la destruction de la forêt en 10 minutes chrono et deux vidéos sur twitter, on pense « tiens, si c’est si facile, faisons tous pareils alors ! »
Aah comme c’est mignon, comme ça paraît simple de changer le monde… Mais le film est incroyablement cynique. On comprend qu’évidemment, si on nous parle de l’excision, ce n’est pas innocent, et la menace plane sur l’héroïne tout le long du film. Si les jeunes gens ont réussi si facilement leur coup médiatique, c’est parce qu’ils ont été financés par un riche commercial qui travaille en fait pour la société de démolition concurrente : les travaux reprendront deux jours après, avec cette nouvelle entreprise.
Le réalisateur Eli Roth explique : « tandis que j’achevais le scénario, l’affaire Kony 2012 a éclaté (qui enlève des enfants Ougandais pour en faire des soldats et esclaves) : tout le monde passait son temps à tweeter des infos glanées dans des vidéos sur YouTube, puis à pousser d’autres personnes à les retweeter sous peine de salir leur réputation à eux aussi. Comme si, en ne le faisant pas, on se moquait pas mal du sort des enfants soldats d’Ouganda. J’y ai vu la volonté de certains d’apparaître comme de bons samaritains et, un mois plus tard, le leader du mouvement a été surpris en train de se masturber dans les rues de San Diego. Tout ce dispositif a été inutile. Certes, il a sensibilisé certains à cette cause, mais ce n’est pas en retweetant des liens vers des vidéos qu’on va pouvoir arrêter des criminels ».
Ironie du film : il dénonce les ravages du monde moderne sur la nature et les tribus amazoniennes, mais il est allé filmer en pleine jungle, auprès de villageois paisibles sans contact avec le monde extérieur, sans électricité ni eau courante, qui n’avaient jamais entendu parler de cinéma. Pour avoir l’autorisation de tourner chez eux et de les utiliser comme acteurs et méchants cannibales, Eli Roth leur a montré leur tout premier film. Et pas n’importe lequel, pas un classique, pas un dessin animé gentillet. Non… Cannibal holocaust !! Sympa comme entrée en matière ! C’est certainement pour ça qu’ils ont accepté si facilement de jouer: « ok, on y va, ça doit être normal chez les Américains d’ouvrir le bide de son voisin et lui bouffer le cœur ! »
En retour, le dossier de presse explique que « la production a collaboré avec les habitants pour leur fournir ce dont ils avaient besoin pour améliorer leurs conditions de vie ».
Le tournage a été particulièrement éprouvant : 5 h de trajet quotidien pour atteindre les lieux isolés, des inondations détruisent les décors, une scène tournée dans un champ rempli de tarentules vénéneuses… Du matériel est gardé par la douane, et les maquilleurs doivent utiliser les moyens du bord : des fruits ou des morceaux de viande !
Eli Roth précise : « tous les acteurs se sont coupés, ont été piqués ou ont eu des hématomes. Ils se sont tous engagés pour vivre une aventure, mais ils étaient ravis de rentrer à Santiago. Je me souviens qu’en arrivant à l’aéroport de Lima, ils se sont tous précipités vers le premier Starbucks ! »
Eh oui, la mondialisation et le monde moderne gagnent toujours à la fin…
Le film n’est pas uniquement là pour provoquer des sensations fortes : il interroge la notion d’engagement, de la solidarité (pour s’en sortir : aider ses amis, ou chacun sauve sa peau ?) et le rôle des médias. Green inferno montre que l’enfer est pavé de bonnes intentions…
Cet excellent film d’horreur ne sort malheureusement pas en salles, mais est disponible dès aujourd’hui en e-cinema sur la majorité des services de vidéo à la demande. Si vous êtes fans du genre, je vous invite vivement à voir Green inferno qui relève le niveau !
16:54 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (3) | | Facebook
13/10/2015
Marguerite, l'incroyable Castafiore
Dans les années 20, une aristo (Catherine Frot) se prend pour une soprano. Elle impose à son entourage ses cris de chat qui se fait marcher sur la queue, elle organise des concerts. Personne n’ose lui dire qu’elle chante comme une casserole. Les journalistes se moquent entre les lignes, d’autres peu soucieux abusent de sa crédulité et bienveillance pour lui soutirer de l’argent et la lier à la cause anarchiste. Si elle chante, c’est aussi pour attirer l’attention de son mari, qui la délaisse pour une autre.
Le film s’inspire d’une femme ayant réellement existé, Florence Foster Jenkins. La véritable histoire est plus intéressante que son adaptation : le mari de la Castafiore a deux fois son âge, il la trompe et lui refile la syphilis. Cette maladie et le traitement au mercure attaquent son système nerveux, son nerf auditif, donc son oreille, et peut expliquer pourquoi elle pense être une bonne soprano. Ou bien elle vit dans un délire imaginaire… C’est une femme exubérante, dans son comportement, ses tenues de scènes excentriques. Lors d'un accident à bord d'un taxi, elle découvre qu'elle peut chanter un « fa encore plus haut qu'avant ». Au lieu de poursuivre la compagnie de transport, elle envoie une boîte de bons cigares au conducteur… Elle ne s’aperçoit pas que son public se moque d’elle, pensant être admirée. Mais après un concert dans une vraie salle, le prestigieux Carnegie Hall, les journalistes la critiquent ouvertement. Soudainement consciente de son absence de talent, à 76 ans, elle fait une crise cardiaque et meurt peu de temps après. Je vous invite à cliquer sur le lien de Florence Foster Jenkins massacrant Mozart… Elle aurait également inspiré le personnage de la Castafiore dans Tintin.
Cette stupéfiante biographie n’est pas vraiment exploitée dans le film. Xavier Giannoli n’utilise pas l’anecdote du fa, de la maladie… Et son final est vraiment trop grandiloquent, grotesque, on n’y croit pas. S’il s’était borné à la réalité, il aurait été bien plus efficace et émouvant. Le film débute par la longue préparation d’un concert intime donné chez la soprano. Le suspense est à son comble… sa voix est-elle si nulle que ça ? L’effet d’attente fonctionne à fond, et j’ai ri aux larmes comme je n’avais jamais autant ri, littéralement pliée en deux. Mais ensuite… on a compris qu’elle chantait faux. Et on a de la peine pour elle, moquée, trompée par un journaliste et un anarchiste. Ces deux personnages semblent amoureux de la même fille, une chanteuse aguerrie, elle. Mais ce triangle amoureux passe à la trappe en cours de route, pour revenir subitement à la fin, sans résolution. Le film est assez mal construit, et trop long (plus de deux heures).
Xavier Giannoli a le don pour dégoter des sujets en or, des histoires vraies incroyables, mais il ne sait pas les traiter. Dans A l’origine, un escroc (François Cluzet) se fait passer pour un chef de chantier. Il lance la construction d’une autoroute au milieu d’un champ, employant des dizaines de personnes, mobilisant la municipalité… Un fait divers étonnant, gâché par un film ennuyeux. Marguerite n’atteint pas ce stade, mais il aurait pu être tellement mieux… J’attends avec impatience l’adaptation avec Meryl Streep et Hugh Grant, réalisée par Stephen Frears (Philomena, High Fidelity, Les liaisons dangereuses...)
10:30 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, catherine frot, cinéma français | | Facebook
11/10/2015
Bilan "je suis culturée" de septembre
Peu de sorties ce mois-ci. J’ai profité des derniers beaux jours avant la pluie et l’automne qui s’installent. J’ai passé mon temps libre à flâner et lire dans le parc. Ah, ce beau soleil qui revigore… quelle bonne idée j’ai eu de me promener avant d’aller bosser, comme ça j’aurai la pêche au boulot ! Pourtant, je me sens patraque, sonnée, on me demande si je vais bien « mais si, je reviens du parc! » J’ai chaud, j’ai soif, je manque de tourner de l’œil sur mon bureau… avant qu’on s’horrifie : « aaah t’as le crâne tout rouge ! » Oui, j’ai pris une insolation par 15 degrés en plein automne et aujourd’hui, je pèle de la tête.
3 films au cinéma :
Coup de cœur :
- Green inferno d’Eli Roth
Coup de cœur et surtout coup dans l’estomac. J’en reparle bientôt.
Pourquoi pas :
- Marguerite de Xavier Giannoli
Le cinéaste a le don pour trouver des sujets en or, mais il ne sait pas les traiter. J'en parle demain.
Bof bof :
- Un début prometteur d’Emma Luchini
Et non.
22 films à la télé :
Coup de cœur Canal+ :
- A la recherche de Viviane Maier de John Maloof
Coups de cœur Canal sat :
- A propos d’Elly de Asghar Farhadi
- Vous ne l’emporterez pas avec vous de Franck Capra
Déception :
- J Edgar de Clint Eastwood
Quel manque de souffle dans ce film ! Je conseille de relire plutôt la formidable biographie de Marc Dugain sur le sujet.
3 séries :
Coup de cœur :
- Black mirror, blanc comme neige, avec Jon Hamm
Série toujours aussi excellente. Dans un futur proche, les méfaits des nouvelles technologies sur les relations sociales... Effrayant, car réaliste.
- The brink, avec Jack Black et Tim Robbins
- Wayward pines, avec Matt Dillon
10 documentaires :
Coups de cœur :
- Pollution de l’air : qui nous intoxique ?
Le diesel, évidemment !
- Le ventre, notre deuxième cerveau
Tellement évident pour l'estomac sur pattes !
- French Bashing
- Un jour un destin : Pierre Richard
- Un jour un destin : Marlène Jobert
- Pièce à conviction : Nos très chers députés de Patricia Loison
- Despot housewives
- Discrète chevêchette
- Comment le sexe a changé le monde
- hipstérie
19:35 Publié dans Je suis culturée | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : télé, cinéma, documentaires | | Facebook
02/10/2015
Tatie Danielle, fin
Je somnole sur la chaise longue quand ma nièce vient me voir et demande avec sa petite voix :
« Tu veux jouer avec moi ?
Enthousiasme débordant : - Super… je suppose que tu ne sais pas encore jouer à Mario kart à 3 ans ?
- On fait la clé de saint Georges ! »
Gros retour en arrière car on m’invitait parfois à y jouer dans la cour de récré, quand il manquait quelqu’un. Mais on me donnait rarement la clé (mal aimé, je suis le mal aimé). Exclusion réparée aujourd’hui :
La petite aligne consciencieusement ses peluches en cercle.
« Ok… si je comprends bien ni Lapinou ni le bisounours (hé ! mais c’est mon gros taquin !) ne vont se lever pour ramasser la clé, donc c’est moi qui vais me la coltiner.
Ma nièce chante en tournant autour des peluches et moi :
« Je porte, je porte, la clé de saint Georges…
- Déjà, c’est quoi cette histoire de clé ? Saint Georges a terrassé le dragon, mais la bestiole était enfermée dans sa chambre ou quoi ? Ou bien Saint Georges est une cité ? Répondez, les Français veulent savoir !
- Quand je l’aurais assez portée, je la laisserai tomber
- Ah ben bravo, on te confie une chose importante puis tu t’en débarrasses.
- Au pied d’un rocher
- Bah merci, je ne suis pas une pierre !
- Ne regardez pas le renard qui passe, mais regardez-le quand il est passé !
- C’est quand même n’importe quoi cette histoire, elle ne veut rien dire.
- Ohé matelots, regardez derrière votre dos !
- Qu’est-ce que des matelots viennent faire dans la combine ? Ils n’y étaient pas dans ma version ! Je proteste !
Ma nièce court comme une dératée.
- Ah oui, faut que je regarde. Qui va avoir la clé derrière son dos ? Quel suspense… oh c’est moi ! Je ne m’y attendais pas dis-donc ! Faut que je coure aussi ?!
Courir en rond a fait tourner la tête à mémé. Après trois tournées de bière :
- Je suis épuisée. C’est plus de mon âge tes trucs. Si on proposait à mamie ? Je suis sûre qu’elle va adorer !
- Oh oui, mamie ! »
C’est comme ça que je réussis à me faire remplacer par une vieille dame de 75 ans et que je peux retourner pioncer sur ma chaise longue.
Mais le répit est de courte durée. Je commence à m’endormir, bercée par le doux bruit de la rivière qui coule… Mais ma nièce se met à chanter en boucle le fameux air horripilant, tous les jeunes parents sont passés par là :
- Libérée ! Délivrée !
- Je vais te bâillonner, tu vas voir si t’es libérée…
- C’est décidé je m’en vais
- Oh oui ! merci !!
- Libérée, délivrée !
- Tu ne connais pas les paroles en plus… tu ne veux pas chanter autre chose plutôt ?
- Je voudrais un bonhomme de neige...
- Tu ne vas pas me faire tout le film ? T’as rien d’autre à ton répertoire, d’un peu mieux ? Je sais pas, les Beatles par exemple ? Puis tes parents seront contents, ils sont fans et tu parleras anglais. Il doit bien y avoir des chansons faciles à apprendre pour une enfant de trois ans…
- Libérée, délivrée…
- Répète après moi : Helter skelter ! (je mime la guitare électrique)
La petite me regarde étonnée puis s’en va, attirée par un papillon.
- Comment ça, t’aimes pas les Beatles ? T’es sûre que tu fais partie de la famille ? Tant pis, pour une fois que j’étais motivée pour jouer avec toi ! »
J’exagère bien sûr, j’écris ce que j’ai pensé, pas ce que j’ai vraiment dit, je ne suis pas tatie Danielle… Puis ma nièce aime les Beatles et chante Got to get you into my life en yaourt, comme je faisais à son âge ! La relève est assurée : dans 5 ans je l’accompagne à son premier concert de McCartney !
12:00 Publié dans Oh ? y a des gens autour ! | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : les enfants sont formidables | | Facebook