01/07/2021
Teddy
Dans un village des Pyrénées, Teddy vit avec son oncle adoptif. Sans diplôme, il travaille comme intérimaire dans un salon de massage. Sa petite amie Rebecca elle, passe bientôt son bac et est promise à un avenir radieux. Pour eux, c’est un été ordinaire qui s’annonce. Mais des bêtes sont tuées mystérieusement et les paysans accusent comme souvent le loup. Un soir de pleine lune, Teddy est griffé par cette créature. Les semaines qui suivent, il est pris de curieuses pulsions animales… Voir la bande annonce en lien.
Prix du jury au festival du film fantastique de Gérardmer, Teddy est encensé par la critique. Il a tout pour me plaire : mélange de film d'horreur et de comédie romantique décalée (Shaun of the dead, "une comédie romantique avec des zombies" fait partie de mes films préférés). Satire sociale, avec des ploucs inadaptés qui se vengent des mieux nantis se moquant d'eux (comme d'autres films adorés : Parasite, Coup de tête...) Chronique adolescente avec la première histoire d'amour...
Je loue également l'utilisation de peu de moyens pour un maximum d'effets. Les frères Boukherma ont compris que la suggestion est bien plus efficace que de montrer des monstres de synthèse qui coûtent une blinde. Teddy m'a pris aux tripes, littéralement. J'ai senti mon ventre se serrer devant certaines scènes, comme celle où le héros se rase la langue, ou celle des yeux (je ne peux pas vous dire ce qu'il s'y passe, j'ai carrément détourné la tête !)
Les réalisateurs ont saisi l'essence du film de loup-garou, qui touche à la transformation du corps du héros, qui ne comprend pas ce qui lui arrive. Utiliser un ado qui découvre la puberté et les pulsions sexuelles est ainsi une brillante idée : lorsque Teddy s'inquiète d'une pilosité inhabituelle, le médecin paternaliste le tranquillise "c'est normal, tu deviens un homme !" Quand le jeune homme se plaint d'avoir trouvé des poils sur sa langue, le docteur le blâme d'avoir pris de la drogue, bref d'avoir tenté des expériences pour tester les limites, comme beaucoup de jeunes.
Ce corps qui se transforme à l'adolescence m'a fait penser au génial Carrie (de Stephen King, adapté au ciné par De palma), Carrie est surprise et dégoûtée par la venue de ses premières règles, moquée par ses camarades, et comme Teddy, elle se découvre un pouvoir qui va lui permettre de se venger. Dans Teddy, du sang aussi, des tripes, parfois même un peu trop (la scène des toilettes bouchées était dispensable selon moi !)
Le loup est aussi la créature incomprise, hors normes et exclue. Ici, les bergers l'accusent de tuer leurs bêtes et le chassent, comme Teddy est accusé de perturber la tranquillité du village et mis à l'écart par les gens de son âge, qui ont poursuivi leurs études, eux. Comme son oncle et sa tante handicapée, il est exclu car il ne rentre pas dans la norme, il obéit à ses pulsions, comme le loup-garou qu'il devient.
Les réalisateurs ont également compris qu'il est inutile de mettre la moitié du budget dans le salaire exorbitant des acteurs. Ici, certains villageois jouent leur propre rôle : quoi de mieux pour faire vrai ? La plupart des personnages sont interprétés par des non professionnels. Ludovic Torrent, qui joue l'oncle Pépin (car il s'appelle Le bref) est hors du commun : avec son phrasé si particulier, son air complètement déphasé, il est hilarant. Le film fait tout de même appel à une actrice comique reconnue : Noémie Lvovsky (Camille redouble, la mère intrusive des Beaux gosses...) Elle donne encore toute la mesure de son talent dans son rôle de patronne du salon de massage, qui cache sous un sourire et une voix douce une autorité abusive flippante.
J'ai néanmoins pensé contrairement à la majorité des critiques que l'interprétation de certains n'était pas toujours très juste, faire appel à des non professionnels à ses limites. J'ai aussi trouvé que la mise en scène était parfois faiblarde, me faisant penser à un film d'étudiant, encore maladroit. Mais cet effet est peut-être délibéré, pour renforcer le côté décalé, bouts de ficelle. Teddy m'a rappelé la série P'tit quinquin, si vous y avez été sensible, vous apprécierez certainement Teddy.
Teddy, de Ludovic Boukherma et Zoran Boukherma, actuellement en salles.
17:29 Publié dans On connaît le film | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinéma fantastique | | Facebook
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