Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

13/01/2021

Selfie, de l'influence du numérique sur les honnêtes gens

selfie.jpgLe sujet me rappelle l'essai brillant, limpide, à lire absolument, de Marie-France Hirigoyen (la spécialiste du harcèlement, j'adore ses livres) : les Narcisse, ils ont pris le pouvoir. J'ai choisi ce film pour son sujet qui me parle énormément, et parce que c'est une comédie avec des acteurs que j'apprécie : Sébastien Chassagne, anti-héros de l'excellent Irresponsable, et Fanny Sidney, Camille dans 10 %.  Heureusement que je ne me suis pas fiée à l'avis des critiques, plutôt péjoratif. Le film est pourtant drôle, visionnaire, corrosif. Selfie est pour moi une sorte de Black mirror comique. Je ne vois qu'une explication aux mauvaises notes : il y a que la vérité qui fâche ? Certains critiques trop narcissiques n'ont aucune dérision ? Voir les teasers des sketchs en lien : 

Le premier sketch est à l'image de son actrice principale : grinçant. Blanche Gardin et celui qui incarne son mari mettent en scène sur leur chaîne Youtube "le combat" de leur enfant contre une maladie orpheline. Grâce aux succès de leurs vidéos, ils reçoivent de nombreux cadeaux prestigieux. Une dénonciation acerbe de l'hypocrisie et de la course aux like sur les réseaux de ceux qui exposent leur vie sans aucune décence. Les expressions à la mode agaçantes sont reprises : "c'est une belle personne" "il est dans nos coeurs" "eco friendly" etc... 

Le deuxième sketch, mon préféré, est réalisé par Marc Fitoussi, dont j'ai beaucoup apprécié Pauline détective et Copacabana. On retrouve son humour foldingue et son goût pour les personnages féminins extravagants, à travers Elsa Zylberstein, qui incarne ici avec brio une prof de lettres romanesque et démodée. Celle-ci ne sait même pas se servir d'internet, ses élèves se moquent d'elles sur les réseaux. Lorsque le gouvernement impose un passage au numérique aux enseignants, la prof découvre Twitter. Quand la star youtubeuse (Max Boublil) adorée par ses lycéens passe à la télé, l'enseignante commente sur Twitter sa syntaxe déplorable. Commence alors une relation épistolaire sur le réseau social, entre cette enseignante romancière frustrée et ce jeune inculte....

Autre problème dû au numérique, Manu Payet commande sur internet tout ce que l'algorithme d'un site d'achat lui propose, persuadé qu'il connaît ses désirs mieux que lui. Ce serait probable, à en croire par exemple Comment Trump a manipulé l'Amérique. Ce documentaire révèle que "sur Facebook, avec 10 likes, l'algorithme vous connaît mieux que vos collègues. Avec 100, mieux que votre famille, et 230, mieux que votre conjoint".... 

Les algorithmes sont aussi le sujet d'un sketch sur les sites de rencontre : on ne peut matcher qu'avec les gens qui possèdent la même note que nous, chaque rencontre est orientée. Comme le dénonce Judith Duportail dans son livre l'amour sous algorithme. Elle révèle que les sites de rencontre ne proposent pas à un homme une compagne plus diplômée que lui, ou plus âgée. Pour obtenir une note équivalente à un homme, une femme doit avoir 10 ans de moins que lui, et gagner moins d'argent. A l'inverse, un homme qui a 10 ans de moins que la femme, et gagne moins d'argent qu'elle, sera moins bien notée qu'elle. Comme le commente l'écrivaine : "un homme riche avec une jeunette, mais pas de réciprocité : c'est le modèle patriarcal des relations hétérosexuelles".

Dans le dernier sketch, Smileaks, le plus black mirroresque, le plus effrayant, le piratage d'un réseau social révèle au grand jour tous les messages échangés par les utilisateurs.... Les masques tombent et chacun découvre ce que ses amis et collègues disent de lui derrière son dos, ou les véritables activités de son conjoint...

En résumé, je vous conseille Selfie, en ce moment sur Canal+. Une comédie qui a parfaitement capté l'air du temps !

Rendez-vous sur Hellocoton !

Les commentaires sont fermés.